Le Bourgeois Gentilhomme de Jérôme Deschamps est de retour à Bordeaux
Le Bourgeois Gentilhomme est de retour, dans la mise en scène de Jérôme Deschamps, au Grand Théâtre de Bordeaux. Cette production date de 2019 et les représentations sur la scène de l’Opéra Comique à Paris à l’automne 2020 avaient été annulées in extremis à cause d’un cas de Covid. À Bordeaux, l’équipe complète évolue autour de Monsieur Jourdain, personnage tenu par Deschamps lui-même, et s’en donne à cœur joie pour le plaisir des artistes et des spectateurs.
La partition de Lully intégralement interprétée
L’année Molière est déjà bien entamée et les spectacles ne manquent pas. Pour l’occasion, cette production du Bourgeois Gentilhomme est l’une des premières à remettre la musique de la comédie ballet à sa juste place, car la partition de Lully y est intégralement interprétée. Dans la fosse, des membres des Musiciens du Louvre sous la direction de Thibault Noally jouent, avec beaucoup de finesse, sur instruments d’époque. L’effectif des cordes, fort éloigné des 24 violons du roi, semble bien adapté à la dimension du Grand Théâtre, même si par moments (comme lors de la cérémonie turque), un peu plus de consistance aurait été la bienvenue.
Les éléments visuels festifs
Tout comme la musique, la danse est bien représentée. Avec sa chorégraphie moderne, Nathalie Van Parys mêle harmonieusement des éléments de danse baroque qui vont de pair avec les costumes très colorés et pleins de fantaisies de Vanessa Sannino. Les éléments visuels sont festifs et ravissent les yeux ; ils sont complétés par de petits « gags » (les chansons à boire et le cochon à la table) et les accessoires anachroniques (les objets de ménage avec lesquels Nicole est toujours en train de s’affairer) invitent au rire. En revanche, le décor unique est probablement le point faible de cette production. En effet, les murs qui limitent la scène et les espaces très restreints en hauteur (sur le côté jardin pour les chansons à boire, et sur le côté cour, avec les rideaux, afin d’exposer certains personnages… mais à quelle fin ?) donnent encore davantage le sentiment d’exiguïté des lieux.
Les chanteurs et comédiens hétérogènes
L’équipe de chanteurs est très hétérogène en raison de leurs techniques vocales. Parmi eux, la mezzo-soprano Natalie Perez se démarque par son timbre splendide et l’élasticité de sa voix, et la basse Jérôme Varnier, par son autorité musicale. Il en est de même pour les comédiens ; chez certains, le caractère intrinsèque de la voix ainsi que le fait d’être souvent vers fond de la scène ne met pas en valeur leurs qualités. Néanmoins, Guillaume Laloux (le Maître de danse et Dorante) et Vincent Debost (Corville et le Maître d’armes) sont très appréciés avec leur jeu bien caractérisé et, surtout, une projection agréable. Les mouvements de danseurs dynamisent considérablement les scènes ; il leur arrive même de chanter… et aux chanteurs de danser.
La présence de musique complète – ce qui constitue un vrai plaisir – rallonge le temps de la représentation malgré les nombreuses drôleries. Ou bien, est-ce justement ces drôleries, disparates et bigarrées, qui donnent la sensation de longueur ?
Quoi qu’il en soit, le spectacle est jubilatoire, on y passe un bon moment… et c’est là, l’essentiel !
Le spectacle est visible en replay jusqu’au 21 janvier sur France.tv
Photos © Marie Clauzade