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L’autre monde de Madame Arthur

L’autre monde de Madame Arthur

16 June 2020 | PAR Amelie Blaustein Niddam

Ce lundi 15 juin le célèbre cabaret de la rue des Martyrs est fermé. Mais à l’intérieur, il vit.  Depuis le 9 mai, il  propose un format inédit qui a des allures de défi : lancer un format live tous les samedis avec des magnétos tournés le lundi. Et cette semaine, c’est la dernière… spéciale Céline Dion !

Au moment où nous arrivons, Odile de Mainville, Morian et Charly Voodoo sont habillés. Odile est gothique avec des bottes argentées et un maquillage aux cils immenses. Morian est une tige de deux mètres, il ressemble à un savant fou, costume rose à plumes, talons de vingt dorés ponctués de canettes et rouge à lèvres coulant. Charly est plutôt dévêtu, slip et cape, tout bijouté, le regard noir et la moustache fière. Autour d’eux, ça grouille un peu, comme ça peut grouiller par temps de confinement culturel.

Mélodie Braka, directrice de la communication nous raconte : “Le spectacle vivant nous manquait”. “Nous avions envie d’expérimenter entre mai et juin”. Avant, le cabaret, qui est également une discothèque, était ouvert du mercredi au samedi de 20h à 6h du matin. Et depuis le 9 mai, Madame Arthur propose un spectacle en ligne, payant. 

Charly Voodoo raconte : “Cela offre une petite sensation de vivant, un mal (mâle) pour un bien, ce n’est pas du temps perdu et ce format pourrait être pérenne”. Il dit à quel point l’interaction lui manque “à mort”. “C’est l’ADN qui manque”. Mélodie Braka ajoute : “Le public est présent, sur Zoom, et l’interaction a lieu par le biais d’une seule personne”.

Presque comme un spectacle

Au fil des semaines, la bonne formule a été trouvée. Il s’agit d’un format presque cinéma où la caméra parcourt tout le cabaret. Au milieu du live sont insérés les magnétos tournés le lundi. Nous les interrogeons sur la pérennité du système.

Charly Voodoo pense que oui, l’idée a de l’avenir : “Ça pourrait être comme un talk. Avec un guest , en mode interview”.  Madame Arthur est le seul lieu privé à avoir installé du vivant pendant la fermeture infinie des théâtres. Et le rêve est de rouvrir pour de bon. L’envie est nette de “faire quelque chose pour la fête de la musique” mais rapidement Mélodie ajoute que l’ouverture partielle, comprenant l’obligation de la fermeture de la discothèque sans visibilité, pose la question de la rentabilité.  Ouvrir à demi pourrait devenir un gouffre.

Alors, dans ce contexte, la règle du show must go on est un peu torturée. Ici, les artistes sont payés et leurs numéros touchent plus loin. “En Europe , même New York et Montréal”. Un public qui n’est jamais venu chez Madame Arthur suit le spectacle en direct sur Zoom le samedi soir. Mélodie Braka ajoute : “On insuffle du Français, du Parisien, un peu plus loin”. 

Odile de Mainville nous rejoint pendant que Charly s’installe au piano. Elle est danseuse au sein de la Compagnie Vilcanota, elle est également chanteuse lyrique et travaille pour l’Opéra de Paris. Et puis elle fait partie de la troupe de Madame Arthur qui compte 21 artistes, dont 4 se produisent chaque samedi. Elle raconte : ” Si j’ai accepté ce défi, c’est parce que ça n’a rien à voir avec ce qu’on fait d’habitude. Ce n’est pas du cabaret, le cabaret n’a du sens qu’avec le public. Le cabaret ça ne s’exporte pas, et surtout, c’était vital de reprendre”.

Céline Dion en grand final

Samedi aura lieu le dernier spectacle du confinement étendu à la culture.  J’ai compris tous les mots  sera présenté de 21h à 22H suivi à 22H par le French Test en présence de Sarah et Guigui. Et ce lundi, ça répète, ça tourne. Pendant deux heures, et en deux temps. D’abord enregistrer la chanson “Dans un autre monde” de Céline Dion, écrite par Jean-Jacques Goldman. L’occasion de rappeler que tous chantent et jouent pour de vrai. Ensuite, ça tourne, un clip. La mise en scène est drôle et acide. Un pianiste qui en fait trop, un savant qui ausculte et manipule la lumière et une poupée chanteuse qui semble prête à être assassinée sont réunis pour nous faire entendre ces paroles pas si marrantes :

“Beau, beau de bas en haut
J’aimais manger sa peau, j’aimais boire à ses mots
Mais trop tard, ou brouillard, ou bien trop tôt
C’était la bonne histoire mais pas le bon tempo”.

Nous quittons l’enregistrement avec la chanson bien en tête. Bye Bye mais à bientôt Madame Arthur, déjà en digital ce samedi et puis le plus vite possible, quand comme le hurle Céline , “les nuits seront plus longues, plus longues que mes nuits”

Inscription sur le site de Madame Arthur, 10€. Le spectacle est rediffusé pendant une semaine, du dimanche au vendredi soir à 21h. 

Visuels : ©Yaël Hirsch
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Amelie Blaustein Niddam
C'est après avoir étudié le management interculturel à Sciences-Po Aix-en-Provence, et obtenu le titre de Docteur en Histoire, qu'Amélie s'est engagée au service du spectacle vivant contemporain d'abord comme chargée de diffusion puis aujourd'hui comme journaliste ( carte de presse 116715) et rédactrice en chef adjointe auprès de Toute La Culture. Son terrain de jeu est centré sur le théâtre, la danse et la performance. [email protected]

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