Danse
THE SEA WITHIN coule Lisbeth Gruwez

THE SEA WITHIN coule Lisbeth Gruwez

20 June 2018 | PAR Amelie Blaustein Niddam

Le nom de Lisbeth Gruwez sonne normalement juste à nos oreilles. Pourtant, sa dernière création, donnée deux soirs au Festival de Marseille, nous laisse interdits, face à une proposition jolie, insipide et faussement politique.

Imaginez que vous ne saviez pas que cette chorégraphie-là était signée de l’immense danseuse et chorégraphe flamande ? The Sea Within est une énigme, une tache dans la carrière de la muse de Fabre. Incompréhensible même.  Comment expliquer ce choix, tellement dans l’air du temps vicié par les excès du #metoo pour celle qui jamais ne flirte avec le populaire ?

Lisbeth Gruwez est danseuse et chorégraphe de plus en plus en vue, ses spectacles font date : L’origine en 2011, It’s going to get worse and worse my friend (2012) et AH/HA (2014). En 2016, elle tape fort en s’emparant d’un thème a priori hostile avec We’re pretty fuckin’ far from okay, un pas de deux sur l’angoisse qui agit comme un catalyseur.

Tout est girly ici. Le tapis rose, les costumes tirés d’une publicité pour les produits laitiers (culottes taille haute et petits hauts sexy l’air de rien), la musique vaporeuse de Maarten Van Cauwenberghe, Elko Blijweert et Bjorn Eriksson, et la chorégraphie…

Tout commençait plutôt bien avec un solo lent, animal, arythmique. Malheureusement, cela ne dure pas. Très vite arrive une pièce chorale où tout ondule, les corps comme les cheveux dans un militantisme idiot anti-mecs. Il y a cette scène de montée d’orgasme (sans atteindre le graal) , très empruntée à Jan Fabre, que l’on peut sauver du naufrage, mais rien d’autre. Ni les scènes de groupes où les dix danseuses tentent de faire un corps, ni les explosions qui, épuisées par la lumière douce et la musique très jolie n’ont aucune urgence, aucune violence.

En voulant faire une pièce féministe, l’immense danseuse crée un spectacle d’un machisme clair où les filles jouent des codes des films de cul sans second degré. Loin de nous l’idée d’effacer le sexe des plateaux, au contraire ! Il faut se souvenir de Lisbeth glissant dans l’huile, dans un geste érotique brulant. Mais ici, les nappes et les ondulations des corps jouent des codes de la misogynie sans l’assumer. On s’attend vraiment à voir surgir Beyonce en body puisque tout danse dans ce sens. Mais non, ce n’est pas une mauvaise plaisanterie, il faut garder en tête le talent de Lisbeth Gruwez et oublier rapidement ce bonbon bien trop chargé en colorants pour filles.

Visuel : ©Danny Willems

“Le Club des veuves qui aimaient la littérature érotique”, roman audacieux de Balli Kaur Jaswar
Joy Crookes, princesse du Sud de Londres
Avatar photo
Amelie Blaustein Niddam
C'est après avoir étudié le management interculturel à Sciences-Po Aix-en-Provence, et obtenu le titre de Docteur en Histoire, qu'Amélie s'est engagée au service du spectacle vivant contemporain d'abord comme chargée de diffusion puis aujourd'hui comme journaliste ( carte de presse 116715) et rédactrice en chef adjointe auprès de Toute La Culture. Son terrain de jeu est centré sur le théâtre, la danse et la performance. [email protected]

Publier un commentaire

Votre adresse email ne sera pas publiée.

Your email address will not be published. Required fields are marked *


Soutenez Toute La Culture
Registration