Danse
Sylvain Groud fait danser le lyrique avec ses Héros Ordinaires

Sylvain Groud fait danser le lyrique avec ses Héros Ordinaires

13 November 2011 | PAR Amelie Blaustein Niddam

Le normand Sylvain Groud, danseur phare des plus grands hits de Preljocaj , en orang-outan dans Paysage après la bataille ou en Jean-Pierre dans la Cour d’Honneur du festival d’Avignon hystérique pour Personne n’épouse les méduses. A 42 ans, marié, deux enfants, il est aujourd’hui un chorégraphe ultra humain, anti bling bling et adepte des expériences in situ.

“Donne moi un endroit, le plus insolite possible, où je n’ai pas dansé, tu ne peux pas le trouver” ! Cela donne le ton. Pour son tout nouveau spectacle Héros Ordinaires, présenté au formidable festival Automne en Normandie,l’originalité, tout autant que l’exigence, vient à la fois du casting et du mouvement.

Sur scène ils sont cinq danseurs, quatre chanteurs lyriques et un désigner sonore. Nous voilà dans un hall sujet aux transports : changement sur les tapis roulants du métro Châtelet, en partance Gare de Lyon ou à Roissy ? Voilà nos interprètes se pressant, courant, aidés dans leur chevauchée urbaine par des outils : escalators, ascenseurs qui les transforment en ressorts. Dans la rue, les clochards sont invisibles, au sol, les danseurs les enjambent en toute désinvolture.

Une histoire dansée et chantée, où les chanteurs sont aussi danseurs, où les mouvements, radicaux, ne cèdent, heureusement, que rarement à un parti pris esthétisant. La musique offre un déroulé brillant concocté par Vincent Manac’h : les airs de Purcell, Nina Hagen, Mariah Carey ou Zelenka, entres autres, sont chantés en live alors que les danseurs évoluent dans des mouvements proches du travail de Boris Charmatz. Dans un expressionisme assumé, c’est l’épaule qui vient toucher le sol, emmenant le reste du corps de façon anguleuse. La rondeur et la douceur n’est pas de mise dans la jungle urbaine.

Le temps de deux instants, Sylvain Groud nous fait mentir en nous offrant, d’abord un solo de verdure, petit carré sur roulette très Central Park à l’appui. Tel un ange qui regarde tout ce petit monde s’agiter d’en haut, il virevolte en virtuose usant des torsions dans une rare dextérité. Vient plus tard un pas de deux magistral qui joue sur un enchainement de portés.

Critique, Sylvain Groud vient jeter un regard acide sur nos sociétés en livrant une image tranchée qui résume le spectacle : un homme noir récolte les prospectus à l’aide d’une pique. Dans l’ambiance qui est installée, la comparaison avec les esclaves noirs ramasseurs de cotons est immédiate et superbe. L’humour vient apporter une respiration salutaire dans un mambo rouge survolté, un pétage de plomb citadin que l’on souhaiterait réel aux heures de pointe dans le métro ! “Héros Ordinaires”, un nid d’idées pour la rapt, à creuser ? En tout cas, c’est en RER C que vous irez le découvrir pour deux représentations inratables au Théâtre de Saint Quentin en Yvelines les 15 et 16 novembre prochain.

Visuel : © Eric Bénard.

Ogres, brigands et compagnie écrit et illustré de Tomi Ungerer
Clémence Poesy est Jeanne captive
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Amelie Blaustein Niddam
C'est après avoir étudié le management interculturel à Sciences-Po Aix-en-Provence, et obtenu le titre de Docteur en Histoire, qu'Amélie s'est engagée au service du spectacle vivant contemporain d'abord comme chargée de diffusion puis aujourd'hui comme journaliste ( carte de presse 116715) et rédactrice en chef adjointe auprès de Toute La Culture. Son terrain de jeu est centré sur le théâtre, la danse et la performance. [email protected]

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