Danse
« Partita 2 », Boris Charmatz et Anne Teresa de Keersmaeker dansent sur Bach dans la Cour d’honneur

« Partita 2 », Boris Charmatz et Anne Teresa de Keersmaeker dansent sur Bach dans la Cour d’honneur

24 July 2013 | PAR Christophe Candoni

Trois solistes (deux danseurs et une violoniste) réunis tout en intimité sur l’immense plateau vide de la Cour du Palais des Papes. Dans un dépouillement total se déploie la danse minimale et organique d’Anne Teresa de Keersmaeker et de Boris Charmatz, portés à des sommets par la magnificence de la Partita n° 2 pour violon seul en ré mineur de Johann Sebastian Bach.

En 2011, la Cour d’honneur accueillait successivement Boris Charmatz et Anne Teresa de Keersmaeker. Le premier, alors artiste associé du festival, faisait faire la révolution à une bardée de têtes blondes dans son spectacle intitulé Enfant,tandis que la chorégraphe et danseuse  nous invitait avec Cesena à la sublime contemplation du lever du jour. C’est à cette occasion que les deux artistes se sont rencontrés. Deux années plus tard, ils sont réunis sur scène pour une création dont on devine un long processus de travail concentré sur la recherche du geste pur, reposant sur une inspiration et un dialogue personnels, intimes et fructueux partagés par deux artistes exigeants, d’un charisme lumineux et d’une complicité évidente, inouïe.

Anne Teresa de Keersmaeker signe la chorégraphie. Boris Charmatz est son interprète. La pièce ne diffère pas de ce qu’on a l’habitude de voir de l’artiste bruxelloise. Même sans se renouveler, son paradigme subtil et rigoureux est toujours aussi beau et fort dans l’épure. La représentation commence une fois encore dans une obscurité ténue. Alors que la nuit vient de tomber, la violoniste Amandine Beyer entre en scène pour interpréter seule à l’avant-scène et dans le noir la Partita n° 2  de Bach qui résonne majestueusement dans la grandeur du lieu. Rien n’est visible. C’est judicieux. Privé de la vue, on se laisse pénétrer par la musique qui suscite un recueillement attentif et l’attente du spectacle à venir. Puis les danseurs prennent place sur scène pour un long et beau pas de deux donné dans un silence total et faiblement éclairé par un rai de lumière qui défile et dévoile à peine plus de la largeur d’une fenêtre du haut mur massif de la Cour. Enfin, la musique et la danse se mêlent, et du manque, l’on passe à un sentiment vibrant d’harmonie, de complétude, d’accomplissement.

Les corps haletants, saccadés, débordants d’énergie, suivent en courant à toute allure la trace d’un cercle imaginaire comme un chemin sans fin qu’ils parcourent ensemble ou séparés, souvent isolés, désynchronisés, jusqu’à trouver des points de rencontre furtifs et se caler dans les pas de l’autre. Les danseurs jouent de la répétition des gestes, de la saturation, des accélérations et des ralentissements, des arrêts sur image, de la vitesse, de l’équilibre. Elle le porte, le traîne ; lui la fait voler sans mal pour même faire quelques pas sur le mur. Une retenue d’abord, puis un élan, une liberté se déploient sur le plateau. L’écoute de la musique transparaît dans chaque geste, jouant des ruptures, des pulsations, des changements de rythmes et de couleurs contenus dans la partition sautillante, languissante ou ombragée de Bach.

Visuel : © Anne Van Aerschot

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