(LA)HORDE tape fort avec Room with a view
Une nouvelle fois, le collectif à la tête du ballet de Marseille envoie valser tous les codes de la danse contemporaine et fait se rencontrer les mondes, en l’occurrence ceux de la fête et de la science-fiction. Room with a view est un grand spectacle populaire qui prouve que l’on peut être exigent et grand public en même temps.
(LA)HORDE rassemble Jonathan Debrouwer, Arthur Harel et Marine Brutti. Ils et elle sont de purs enfants de la télé, ceux collés aux clips MTV à regarder en boucle au début des années 2000. Puis, ils et elle sont devenu.es des ados d’internet. Au début des années 2010, c’est naturellement que le collectif a inventé “les danses post-internet”, le monde d’après quoi ! A ce moment-là de leur histoire, ils et elle s’intéressaient au jumpstyle, cette danse speed à en crever.
Et nous voici dans la décennie actuelle. Ils et elle sont adultes et à la tête d’une énorme structure publique, le ballet de Marseille. Alors, quoi dire et quoi faire quand on a dans ses mains des danseurs et des danseuses pouvant tout faire, de Casse-noisette à François Chaignaud ?
Et bien Room with a view, créé sur le fil du Covid, est à la fois un retour aux premières énergies de la (LA)HORDE et un focus sur le monde de maintenant, mais absolument maintenant, au rythme éphémère d’une story insta. Room with a view vient raconter que ce n’est pas parce que quelque chose ne dure pas, qu’il ne compte pas.
En matière de comptes, cette pièce donne le tournis. 120 BPM par minute joués par Rone ( ROOOONNNNE !!!) en direct, au cœur même du décor ultra présent tout en pierre, et les pas en 8 des interprètes. Pendant l’entrée du public, le dj balance fort. Eux font corps commun autour de lui, seul dieu, seul messie auquel il est autorisé de croire.
Le groupe appuie chaque temps de la musique avec un à-coup produit par les épaules ou les bras. La fête se concentre dans une seule pièce, en hauteur et au milieu d’un monde détruit. Elle est techno et la techno se danse en apparence toujours tout seul.
Évidemment il n’en est rien. Cette humanité est déglinguée. Dans des scènes de mime et de cascades, les couples se font et se défont jusqu’à montrer une insoutenable scène de viol, heureusement tempérée par une vengeance libératrice à la fois pour la victime et le public.
Ce ballet est une machine de guerre, leurs corps sont essorés sans aucun répit et pourtant les danseurs et les danseuses semblent en redemander, et vont jusqu’à supplier le roi DJ de remettre du (bon) son.
Room with a view est super tendance, au point que InFiné, le label de Rone, vend des tee-shirts à la sortie de la salle.
Oui, au Théâtre du Châtelet ! On n’avait jamais vu ça lors d’une représentation de danse !
Si Rone est le roi (LA)Horde est la reine de la nouvelle pop culture. Le collectif arrive à unir le sommet de la hype parisienne au flow des réseaux sociaux. Et, ça, c’est une petite révolution dans le monde du spectacle vivant très cloisonné.
A noter que (LA)HORDE sera à Chaillot pour présenter son exposition dansée, WE SHOULD HAVE NEVER WALKED ON THE MOON, du 27 octobre au 4 novembre.
En attendant, Room with a View se donne au Châtelet jusqu’au 25 septembre.
Visuel : 16 – Room With a View – Théâtre du Châtelet (c)Cyril Moreau