Danse
“La Fille aux cheveux blancs” : l’enchantement du conte chinois

“La Fille aux cheveux blancs” : l’enchantement du conte chinois

21 March 2014 | PAR La Rédaction

Après A Sign of love, chorégraphie signée Bertrand d’At prenant pour cadre Shanghai dans les années 30 ; La Fille aux cheveux blancs est le second spectacle présenté par le Ballet de Shanghai cette saison. Pièce basée sur un conte traditionnel, créée en 1965, elle est l’un des premiers ballets classiques chinois, et l’un des spectacles phares de la troupe.

[rating=4]

La Fille aux cheveux blancs devait, a priori, nous déplaire : œuvre classique de la Chine révolutionnaire, choisie officiellement par Mao Zedong dans son panthéon des œuvres « représentatives » ; le tout dans une mise en scène datant des années 60 et dans une salle – le Palais des Sports – peu propice à l’enchantement. Aussi la pièce est-elle d’un vieillot à peine croyable, kitsch au possible, souvent drôle dans la caricature assumée des sentiments exprimés, de sorte que l’on peut se demander quel intérêt l’on aurait à monter encore une telle pièce de nos jours.

Pourtant, force est de constater que nous avons passé un très agréable moment, une fois mis de côté certains aspects gênants de la mise en scène (les chœurs révolutionnaires accompagnés de poings levés ; les choix très datés, notamment pour ce qui concerne les décors…). Il suffisait d’accepter d’être bousculé dans ses attentes et ses habitudes de spectateurs ; d’accepter d’autres codes de représentation ; d’accepter enfin l’inconnu. Ces concessions faites, il devenait très aisé de se laisser porter, avec une âme d’enfant, par l’histoire universelle d’affranchissement qui est celle de La Fille aux cheveux blancs.

Car le style grossier des traits, l’étrangeté de la musique chinoise aux oreilles occidentales, la féérie un peu ridicule des décors… tout cela servait au finale le conte, et était servi en retour par la maîtrise technique incroyable des danseurs. L’on a rarement vu telle légèreté : les danseuses se mettent sur leurs pointes avec une aisance déconcertante, les hommes, qui semblent également acrobates, impressionnent encore et encore par la hauteur de leurs sauts. Chaque mouvement de tête, chaque regard est chorégraphié ; tout est réglé pour assurer une cohésion entre danse et musique. La caricature du jeu, l’exagération des sentiments et l’expressivité surfaite des danseurs prennent alors la consistance de choix esthétiques assumés : il s’agit de raconter une histoire enchanteresse, un conte pour enfant, en empruntant aux codes des marionnettes ou du mime.

L’on prend goût à l’histoire elle-même qui, en dépit d’un happy-end suspect (et particulièrement glorificateur pour l’armée), présente une vision rafraîchissante et pour le moins étonnante de la femme, principale protagoniste de la libération socio-politique. La grande force de cette pièce réside sans doute dans l’univers appuyé du conte, qui, visant l’intemporel, tout en marquant fortement l’identité chinoise, parvient à nous faire oublier le style largement daté de la mise en scène. Et voilà l’enchantement.

Justine Granjard

[Live report] Le San Francisco Symphony dans John Adams, Charles Ives et Beethoven
La recette de Claude : Quiche Lorraine légère
La Rédaction

Publier un commentaire

Votre adresse email ne sera pas publiée.

Your email address will not be published. Required fields are marked *


Soutenez Toute La Culture
Registration