[Live Report] Electric Guest au Trianon
Avec “Mondo“, considéré par beaucoup comme un tour de force, les deux musiciens d’Electric Guest venaient présenter vendredi soir leur premier album, devant un public impatient de les retrouver sur scène : jouissant d’un succès mérité, le groupe originaire de Los Angeles se devait d’accomplir avec brio leur performance. Mais face à un public plutôt timide, voire craintif, le duo a eu du mal à assurer une prestation convaincante et si l’alchimie a pris c’était avec une certaine distance.
A peine les lumières éteintes, voilà qu’on se retrouve nez-à-nez avec un public surexcité. Les cris fusent, les pieds tapent et le sol mouvant du Trianon se retrouve pris de violentes secousses. La raison ? Une première partie bien choisie, idéale pour introduire le concert d’Electric Guest : investissant avec un naturel effroyable la scène, Chateau Marmont réussit le pari (bien trop souvent raté) de faire bouger une foule dès les premières notes de synthé. Ni une, ni deux, ces français originaires de Tarbes, nourris fortement au lait des Daft Punk, proposent avec aisance leur musique électro pop répétitive, porteuse d’une gravité qu’on aurait tendance à oublier quand on parle de pop. Dans un esprit rétro-futuriste, leurs morceaux sonnent comme une évidence : maîtrisant aussi bien les voix robotiques que les boîtes à rythmes, les quatre musiciens n’en n’oublient pas pour autant la brutale esthétique du rock, accordant une place privilégiée à la batterie. Un rêve pour ceux qui déplorent aujourd’hui la trop forte présence d’engins bizaroides dans la scène électro. Au fil des chansons et aidée par le jeu violent de lumières rouges, jaunes et bleues, leur électro dévoile une sensibilité particulière, qui n’est pas sans rappeler celle de Phoenix, un brin sous acide. Le public, pris dans le tourbillon sonore et visuel, semble conquis et savoure, comme un bon vin, la musique tellement énergique des Chateau Marmont.
Pourtant, la magie qui devait opérer avec l’arrivé du duo américain sur scène, ne s’opère pas. Ou peu, dû à un public modéré sur sa démonstration. Si Chateau Marmont avait si bien réveillé les corps, Electric Guest semble les ramollir. Mais ne jetons pas la pierre au public : il faut dire que les chansons s’enchaînent malheureusement comme sur leur très bon premier album. Avec Danger Mouse comme producteur, Asa Taccone et Matthew Compton avaient mis toutes les chances de leur côté pour Mondo : ajoutez y une bonne dose d’électro et des influences venant aussi bien de la funk que de George Michael, de la pop que de Michael Jackson, et le tour était joué. Sauf que sur scène, cette pépite qui pétille si facilement à l’écoute de l’album, ne prend que très peu, malgré l’enthousiasme convaincant des deux musiciens, aussi excités que le public de jouer à Paris. Dès leur entrée, fracassante il faut le dire, avec “Under The Gun”, le public hésite, sautille légèrement, presque par peur de trop se mouvoir sur une musique qui est pourtant faite pour. S’enchaîneront “Waves” puis la très lascive “Amber”, véritable bijou de mélancolie. Le charisme de Asa Taccone n’y fait pourtant rien, et il faudra attendre “This Head I Hold”, le “tube” d’Electric Guest pour que le public puisse apprécier l’électro recherché du groupe. Entre temps, “Awake”, “The Bait” et “American Daydream” se succèdent, joués pareillement que sur l’album. La voilà la faille : interprétant avec un savoir-faire évident tous leurs morceaux, Electric Guest se contente de ce qu’ils ont, sans chercher à étirer les chansons, à les dynamiser, bref, à leur donner vie. Le concert devient plus une succesion logique et attendue, certes parfaitement maîtrisé, mais qui manque cruellement de sueur, de pop et d’un brin de soleil. Les quelques parcelles d’éclats trouveront finalement leur place avec les deux dernières chansons : “Troubleman” et “Holes”, dix minutes de son tortueux pour clôturer le concert.
Même si les deux musiciens n’ont pas exploité toutes les chordes de leur talent et de leur instruments, la prestation restera néanmoins gravée dans les mémoires. Pour preuve, les quelques spectateurs rencontrés sur la ligne deux du métro parisien, qui continuaient de chantonner les premières paroles de “The Head I Hold” : “They call me a little wound-up…”.
Image à la Une : pochette de l’album d’Electric Guest
Capture d’écran du site accrosstheday.com