Les Apaches de Macha Makeieff, c’est Paname à Créteil !
C’est une fin de saison sous le signe du music-hall que propose la Maison des arts avec Les Apaches, le spectacle de Macha Makeieff, l’actuelle directrice du Théâtre de la Criée à Marseille. Elle signe la mise en scène, les décors et les costumes d’un spectacle qu’elle a conçu pétillant, drôle et joyeux, un brin insolent, porté par une bande d’artistes génialement doués.
Impossible de confondre les apaches avec les artistes des sentiers battus. Eux, sont plutôt à la marge des codes et du conformisme culturel. La rue est leur scène, ils sont rebelles et violents, narguent l’autorité, se donnent avec passion. Ils font avec ce qu’ils sont : des voyous, des artistes, indissociablement. C’est cela qui les rend encore aujourd’hui intéressants et salutaires.
Le spectacle que signe Macha Makeieff est une succession de numéros comme une revue de music-hall. On lui trouve quelques défauts inhérents à la forme comme la répétition et l’inégalité de certains passages, la difficulté de trouver des enchaînements toujours adéquats, mais aussi et surtout les qualités jouissives d’un spectacle comme on n’en fait plus. Ainsi font mouche la variété des prestations dont certaines sont éclatantes et mémorables et enfin la façon dont tous les interprètes sont rois et se donnent sans compter à l’image de ces deux brutes épaisses mais sensibles, play-boys aux muscles saillants et coeurs de midinettes. Dans un décor de café-concert – son air décrépit est un petit plus dans le charme rétro du spectacle – ils sont 8 artistes polyvalents, musiciens, chanteurs, danseurs, acrobates. Ils impressionnent et font revivre toute l’époque début du siècle en passant en revue l’attrait pour le cinéma muet naissant, le rêve américain (de drôles d’hommages à Joséphine Baker et à la comédie musicale façon Cole Porter dans une reproduction de la traversée transatlantique). Ils ravivent avec gaieté et plaisir le besoin d’affranchissement à travers l’art, le libéralisme des mœurs, l’ambiguïté sexuelle qui font changer la société et le regard des gens à ce moment de l’histoire. Les pantomimes très précisément chorégraphiées sont un bonheur mais il est dommage de n’avoir pas affaire à un texte dialogué plus écrit.
Sensualité, humour, rébellion, mélancolie, une gamme variée de sentiments traverse les spectateurs et hisse la pièce au-delà du simple divertissement.
Visuel : (c) Anne-Christine Poujoulat