Musique
La playlist made in Jean-Louis Murat

La playlist made in Jean-Louis Murat

29 May 2023 | PAR Antoine Couder

Cette semaine c’est tout pour Jean-Louis, le Jean-Louis de trois grands disques, le Jean-Louis pour qui jamais notre chagrin ne pourra s’éteindre.

Le parcours de la peine — Le manteau de pluie

Au début, c’est presque la version mélancolique du Daho de “Laisse tomber les jaloux”,   du Darcel à la petite cuillère Chamfort – celui-là, l’a-t-il descendu au lance-flamme ? Je ne sais plus- qu’importe,  il y aura toujours un peu plus avec Murat, comme cette phrase anodine et malicieuse, trainarde comme ce corps que l’on imagine exulté encore un peu avant de s’offrir à sa toute belleoh dis-moi, quel et le bon, le mauvais, que puis-je croire ?  Les yeux implorants de cet amour à portée des mendiants à Rio.

Bang bang — Mustango

Toi, tu le sais (oui, tu le sais, cette énergie circule de tes yeux vers mes yeux), il suffit de prononcer ces mots,  tous vos désirs me dominent, tous vos rires, tous vos enchantements  et puis peu à peu, tout se précise. Murat ne parle que de cette intensité qui monte et modifie l’être au plus profond. Catho lyrique de l’explosion, de l’implosion, de la transformation. De la grâce.

Aimer — Dolores

Au plus simple, au plus conquérant, tomber le manteau de pluie du parcours de la peine. Baudelaire dans une euphorie du MDMA. Il faut, il faut !! La philosophie de l’amour coupable se fait plus allemande. Il faut retrouver cet amant au corps ruisselant. Vite.  Et tu arriveras à cette question dont tu as déjà la réponse :  as-tu aimé poser ton cœur à l’intérieur d’un être heureux ? 

Gorge profonde — Le manteau de pluie

À terre cette fois, les larmes chez Murat jamais ne tâcheront ses yeux clairs, elles resteront à l’intérieur, toujours coincées dans cette gorge qui contient à la fois le bonheur et le lucre. Le texte alors se fait bref, il s’adresse à l’invisible, à l’aveugle … Quel est ton nom ? Ce sera celle dont la présence se fait plus insistante, ce sera la messagère, toi … ma gorge profonde. tu es la pluie, tu es le beau temps, tu dis et redis qu’il n’y aura jamais de fin à cette ronde qui s’éveille dans l’amour.

Réversibilité — Dolores

Et puis on finit par se connaître, se reconnaître, toujours ces mêmes intros presque militaires, ces vice versa  qui aimantent les émanations de ces corps enchantés vers le retournement,  l’équation de la réversibilité.  Un temps c’est la folie de l’amour, du don de soi et l’instant d’après, ce sera l’obscurité vertigineuse, la hantise du néant. Ange plein de gaité, connaissez-vous l’angoisse,  la honte, les remords, les sanglots, les ennuis  … Ange plein de bonté, connaissez-vous la haine ?  Cette fois, c’est vraiment du Baudelaire, mais celui-ci a rencontré Kafka dans cette sorte de brutale lucidité qui surgit lorsque la fin arrive. Le coeur qui s’arrête, l’étouffement. 

Visuel  : pochette

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Antoine Couder
Antoine Couder a publié « Fantômes de la renommée (Ghosts of Fame) », sélectionné pour le prix de la Brasserie Barbès 2018 et "Rock'n roll animal", un roman édité aux éditions de l'Harmattan en 2022. Auteur d'une biographie de Jacques Higelin ("Devenir autre", édition du Castor Astral), il est également producteur de documentaires pour la radio (France culture, RFI).

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