Jazz
Robin Mansanti : « En une nuit, j’ai su que c’était ce que je voulais faire ! » – Interview

Robin Mansanti : « En une nuit, j’ai su que c’était ce que je voulais faire ! » – Interview

02 March 2023 | PAR Geraldine Elbaz

Il s’appelle Robin Mansanti, il a 35 ans. Il chante et joue de la trompette comme personne. Il s’entoure des meilleurs et quand il se produit sur scène, le public est unanime. Sa voix est un don, un bijou d’émotions. Quand il souffle dans sa trompette, le temps s’arrête et vous vivez une expérience unique. Le nouveau phénomène du jazz sort son premier album, Nuit Américaine, chez LP345 Records. Il sera en concerts au Sunside les 18 et 19 avril 2023. Précipitez-vous et retenez bien son nom, il n’a pas fini de faire parler de lui. Entretien avec l’artiste.

En quelques mots, pourriez-vous nous parler de votre parcours ?

J’ai un parcours d’autodidacte. À 17 ans, j’ai été profondément marqué par une vidéo d’un concert de Chet Baker au Ronnie Scott’s de Londres, en trio avec Michel Graillier au piano et Riccardo Del Fra à la contrebasse. En une nuit, j’ai su que c’était ce que je voulais faire ! Alors, je suis allé à l’école de musique la plus proche et j’ai loué une trompette. J’ai appris en copiant ce concert. Je dessinais trois cercles sur une feuille de papier et je mettais une croix quand Chet appuyait sur un piston. 

Le 3 mars 2023, vous sortez votre premier album Nuit Américaine. Pourriez-vous nous le présenter ? 

La genèse de cet album, c’est ma rencontre avec Laurent Courthaliac. Nous partageons le même amour pour les standards de jazz et nous en avons exploré beaucoup. C’est Daniel Yvinec, le directeur artistique, qui a constitué l’équipe de Nuit Américaine et j’en suis ravi. Il a eu l’idée d’appeler Nelson Veras, merveilleux guitariste que j’avais entendu quelques années auparavant, lorsqu’il jouait dans le trio d’Eric Le Lann. J’ai beaucoup de chance de l’avoir sur ce disque.

L’idée était de jouer des chansons venues de différents horizons, de différentes époques et, cependant, de trouver une unité et un son. Il y a des chansons que j’avais envie de chanter depuis longtemps. « L’étang » de Paul Misraki par exemple. Je l’ai entendu la première fois au petit Journal Montparnasse, lors d’un concert de la chanteuse Mathilde, en duo avec le pianiste Alexis Pivot. J’avais adoré. J’ai réécouté ce titre chanté par Danielle Darrieux, accompagnée par un grand orchestre, c’était magnifique. C’est le premier titre de l’album que l’on joue avec Nelson Veras. Notre version a été faite de manière assez spontanée. « Tendre rêve », c’est la chanson de Cendrillon ! J’ai toujours eu envie de la chanter. Je la trouve encore plus belle qu’« Un jour mon prince viendra » (Blanche-Neige). « I Spend My Days », c’est une composition que j’avais faite pour les Trophées du Sunside, il y a quelques années. J’ai trouvé la mélodie en marchant une nuit en Bourgogne.

Comment avez-vous eu l’idée de ce titre Nuit Américaine ?

C’est Daniel qui m’a proposé ce titre. En plus d’évoquer le film, il évoque le procédé qui consiste à tourner une scène de nuit le jour. Ce qui est drôle, c’est qu’on vit tous la nuit et qu’on a enregistré en plein après-midi. C’est donc exactement ce qu’on a fait ! Et puis l’album avait une couleur très cinématographique.

Sur cet album, vous êtes entouré de très bons musiciens : Nelson Veras à la guitare, Laurent Courthaliac au piano, Thomas Bramerie à la contrebasse, Fabrice Moreau à la batterie et Camille Bertault au chant sur un titre. Un petit mot sur votre collaboration ? 

L’idée était de mettre en valeur les mélodies, il fallait de ce fait des musiciens d’une grande sensibilité, capables de « s’effacer ». Lorsque Daniel m’a proposé de faire appel à Thomas Bramerie et Fabrice Moreau, j’en étais très heureux. On s’est tout de suite très bien entendus. On partageait tous le même amour pour les chansons. 

En ce qui concerne le choix de la guitare, j’ai toujours aimé les formations où elle se mêle au piano, particulièrement dans le jazz moderne. J’aime énormément les disques de Bill Evans/Jim Hall, de Lennie Tristano/Billy Bauer. Cela offre des possibilités de couleurs très originales.

Camille Bertault chante avec vous sur le titre « New York Herald Tribune », votre version est sublime. Comment s’est créé ce duo ?

J’avais depuis longtemps envie de reprendre la musique « New York Herald Tribune » du film À bout de souffle, composée par Martial Solal. Dans cette chanson, il y a un côté impressionniste et Camille a vraiment quelque chose de ravélien. Personne d’autre qu’elle ne pouvait faire ça ! Il y a une dimension instrumentale dans sa façon de chanter et l’idée était de donner le sentiment d’une conversation entre son chant et la trompette. Les entretiens de Jean Seberg et Jean-Paul Belmondo, pourrait-on dire.

Pourriez-vous nous raconter une anecdote sur cet album ? 

Celui qui a pris la photo de la pochette est un ami qui s’appelle Bertrand Fèvre. Il est réalisateur, photographe. Il a réalisé un court métrage avec Chet Baker intitulé Chet’s Romance, qui est en fait une chanson filmée, « I’m a Fool to Want You », avec Alain Jean-Marie au piano, Riccardo Del Fra à la contrebasse et George Brown à la batterie. C’est un très beau film en noir et blanc qui a reçu en 1989 le César du meilleur court métrage documentaire.

En fait, j’avais été invité pour les 20 ans du Jazz Club d’Annecy à jouer en trio avec Tom McClung au piano et Jean Bardy à la contrebasse. Le film de Bertrand était projeté à cette occasion et c’est là qu’on s’est rencontrés. On a tout de suite sympathisé. On avait des goûts en commun, comme Chet Baker, João Gilberto, qui sont très liés artistiquement. 

Par la suite, nous nous sommes revus à la Maison de la Poésie, où j’ai joué avec Alain Jean-Marie et Jean Bardy. C’était évident pour moi que c’était Bertrand qui allait faire la photo du disque et c’est Dave Guccione, un artiste vénitien, qui a réalisé le graphisme. Je suis très content de cette pochette. Les Italiens ont toujours beaucoup de goût (rires).

Quels sont vos projets pour cette année ?

Les 3 et 4 mars, je serai en trio à Saint-Malo pour un hommage à Chet Baker au Festival Jazz à l’Étage, organisé par Yann Martin. Les 18 et 19 avril, je serai au Sunside pour présenter l’album en concert avec Hugo Lippi à la guitare et Gautier Garrigue à la batterie. J’aimerais jouer cet album autant que possible. 

Visuel : (c) Bertrand Fèvre_Robin Mansanti

Robin Mansanti 

Nuit Américaine

Sortie le 3 mars 2023

LP345 Records

Judith Owen de retour au Duc des Lombards pour une soirée mémorable
Hamlet de Thomas au miroir de Cyril Teste : une éclatante réussite à Liège
Avatar photo
Geraldine Elbaz
Passionnée de théâtre, de musique et de littérature, cinéphile aussi, Géraldine Elbaz est curieuse, enthousiaste et parfois… critique.

Publier un commentaire

Votre adresse email ne sera pas publiée.

Your email address will not be published. Required fields are marked *


Soutenez Toute La Culture
Registration