Jazz
NOUVEL ALBUM DE FRANCIS LOCKWOOD & SON QUARTET: MINTON’S BLUES. UN ÉCLAIR BLEU DANS LA NUIT, A QUELQUES PAS DU PARADIS

NOUVEL ALBUM DE FRANCIS LOCKWOOD & SON QUARTET: MINTON’S BLUES. UN ÉCLAIR BLEU DANS LA NUIT, A QUELQUES PAS DU PARADIS

06 November 2018 | PAR Aaron Zolty

Derrière la porte, sur scène, un nouveau langage jazz libérateur de notes livre ses marques. Francis Lockwood et son quartet en ouvre la porte avec treize titres éclatants autant qu’équilibrés qu’une forme de fraternité préside, rare, particulière.

Chacun s’harmonise à cadrer le terrain du compagnon, lui offrir les voix de la création, de l’improvisation, hors les sentiers rabattus. Dans ce sens exprimé par John Coltrane : « “Le jazz est selon moi une expression des idéaux les plus élevés. Par conséquent, il contient de la fraternité. Et je crois qu’avec de la fraternité il n’y aurait pas de pauvreté, ni de guerre. ” Je ne pense pas trahir la pensée du généreux Francis en l’accordant à la pensée coltranienne.

« Fallait que tu sois bon. » Quelques mots de Miles résumant l’ambiance physique et humaine du lieu. Il faisait la queue comme des centaines de musiciens devant la porte du Minton’s club. Une fois entré, il s’asseyait à une table, prenait des leçons, écoutait la liberté, le cri du vivant qui n’est dans aucun livre ou contrat d’éditeur interdisant les jams. Be bop, bop, avant la création du cool jazz. Francis Lockwood, pianiste. Francis Lockwood, compositeur, les bagages bien pleins d’un socle musical de haut vol et de compositions du même acabit. Venu d’une époque où la bible des grilles de jazz n’existe pas, où tout s’écoute, se retranscrit note à note pour, non pas reproduire mais faire sonner et vivre. Francis Lockwood et son quartet réinvestissent avec un brio particulier, lumineux, l’esprit créatif, insolent et jubilatoire de ce blues, incandescent et libérateur du Minton’s et de ses héros de Harlem. « Fallait que tu sois bon, Francis ! » Cet album en témoigne. Un enregistrement vif, Vivant, Intelligent et Fluide.

Latitude et ambiance : Minton’s club, 206 w. 118th street, New-York (Harlem), club de jazz de l’hôtel Cecil, ouvert par Henry Minton en 1938. Les couloirs laissent entendre les esprits de Charlie Christian, Monk, Clarke, Parker, Gillespie, Bird & Dizzy. « Chez Minton, tu as apporté ton cuivre et espéré que Bird et Dizzy t’inviteraient à jouer avec eux sur scène. Et quand cela se produirait, tu ferais mieux de ne pas exploser … Les gens guettaient les indices de Bird et Dizzy, et s’ils souriaient lorsque vous avez fini de jouer, cela voulait dire que vous jouiez bien ». Miles Davis.

Binaires de folie, morceaux sans longueur, sans blablas, comme quelque chose de très très beau façon Neal Cassidy (poète américain proche de Jack Kerouac), un style musical proche des correspondances épistolaires avec des références à Parker, Monk, Hemingway et la louange intime, spirituelle que l’on offre/doit à son frère. La rythmique harmonise d’éclats modernes et chaloupés de standards les échanges entre le remarquable et saisissant Baptiste Herbin, d’une musicalité vitale ashtag Bird (Charlie Parker). L’improvisation, la répartition des chorus, c’est du travail, beaucoup de travail pour être ensemble. Re Miles Davis : La musique, ce n’est pas la compétition, c’est la coopération, il s’agit de faire des choses ensemble et de bien s’insérer. Miles Davis ( in Miles l’autobiographie de Miles Davis & Quincy Troupe. Presses de la Renaissance, 1989). Pas de minimalisme. Du jeu, du jeu encore, toujours du jeu, sans pose. Un peu comme les acteurs anglais, incarnés, expressifs, shakespearien. In love with bop et tellement plus. La musique sans catégorie.

Le pianiste. Il pourrait déballer sur la nappe harmonique les traits d’Eroll Garner, Oscar Peterson, Thelonius Monk. Il cherche, pose, ouvre les chants possible, fluide, précis, esthétique et fin. Toujours. Il déclame Treize titres au vif. Vivant serait juste. Même dans les hommages à Didier, il joue sans concept, sans intellectualisation sensée être de mise comme dans le Free jazz. On bosse, on balance, on fraternise et on envoie. Et c’est bon. Très bon. Spiritual ways et Blue Night ont le parfum des fleurs africaines, des traits libres qui contiennent cet esprit bebop et s’il fallait du cool il y en aurait. Minton Blues embrasse Parker en mode question-réponse, Didier est un magistral ternaire sans sentimentalisme, comme une photo musicale que l’on poserait sur son piano, en protection. Et puis ces deux thèmes qui auraient pu accompagner un cocktail d’Ernest au El Floridita à quelques pas de la chambre 511 de l’hôtel Ambos Mundos, nous font lever la tête dans l’observation de la voûte étoilée de la Havane. Quant à Crazy Boubou, on n’ose pas compter la valeur de la noire tant ça déroule à une Vitesse de …coureur de cent mètres cubain ashtag Ornitholgy (Charlie Parker).

Le socle est là, dans l’esprit du blues, novateur, toujours. Eternel encore, car il vit, swingue, donne la fraicheur et ce sentiment que d’écouter fait de l’auditeur un compagnon de voyage, intelligent et cultivé. Vendredi 9 novembre, à 21 heures, Francis Lockwood sera au Pan Piper dans le onzième arrondissement pour offrir ce blues fort et vieux comme un alcool sans âge, généreux et précis, libre et bon, hors catégorie. Toujours en question.

“Afin de permettre aux ingénieurs de vérifier leurs appareils, je priai Erroll de jouer n’importe quoi. Il joua une minute ou deux ; le son était bon, aussi lorsqu’il s’arrêta, je lui demandai, de la cabine, s’il désirait que l’on commence.

– Prêt ! Répondit-il.

– Bon, Dis-je. Qu’est-ce que vous jouez ?

– Je ne sais pas encore… Faites partir la bande… »

Erroll Garner et George Avakian pendant l’enregistrement du Erroll Garner Trio (1956), cité in Derrière la Zizique de Boris Vian. Christian Bourgois Editeur, 1997

Francis Lockwood live au Pan Piper (11ème arrondissement, métro Philippe Auguste)

https://pan-piper.com/live/events/francis-lockwood-quartet-mintons-blues/

Direction artistique : Production : DAVID SECHAN (ENCORE MERCI)

Label : FREMEAUX & ASSOCIES

DAMIAN NUEVA CONTREBASSE • FREDERIC SICART BATTERIE • FRANCIS LOCKWOOD PIANO • BAPTISTE HERBIN SAX ALTO

SPIRITUAL WAYS • BLUE NIGHT • MINTON’S BLUES • THE QUESTION • DIDIER • HABANA NIGHT • CARIBBEAN PROCESSION • BLACK MOVIE • CRAZY BOUBOU • MONK • VINTAGE THEME • TO MY BROTHER.

L’Image Originelle: Collection inédite de documentaires sur les premiers pas de grands noms du cinema
Arras Film Festival : “Day 2” Leto et Funan marquent les esprits
Aaron Zolty

Publier un commentaire

Votre adresse email ne sera pas publiée.

Your email address will not be published. Required fields are marked *


Soutenez Toute La Culture
Registration