Musique
Jazz sur son 31 : Live Report Rosario Giuliani et Enrico Pieranunzi (11/10/2011)

Jazz sur son 31 : Live Report Rosario Giuliani et Enrico Pieranunzi (11/10/2011)

13 October 2011 | PAR Neil Saidi

Mardi soir à Toulouse, à l’Automne Club plus précisément, scène spécialement installée dans l’enceinte du conseil général de la Haute-Garonne pour la durée du festival «Jazz sur son 31», nous avons eu l’heureux plaisir d’écouter la musique chaleureuse des deux italiens que sont le pianiste Enrico Pieranunzi et le saxophoniste Rosario Giuliani.

Une association peu commune, mais pas inédite. En effet, même s’il est très rare de retrouver ces deux instruments en duo, sans une contrebasse ou une batterie, il arrive que cela se fasse, à l’image du duo Brad Mehldau/Joshua Redman, qu’on a pu écouter cet été à Marciac lors d’une soirée de folie, dont vous pouvez lire le résumé ici.

Les deux musiciens commencent le concert par une composition du pianiste Enrico Pieranunzi intitulée « Anecdote ». L’introduction paraît assez libre, composée de beaucoup de motifs chromatiques, dans une ambiance atonale. On ne saurait dire si elle est écrite ou si le pianiste improvise.  Il est ensuite rejoint par le son du sax alto du maestro Rosario Giuliani, un son vraiment « à l’italienne », qui ressemble grandement à celui de son compatriote et lui aussi altiste, Stefano di Battista. Les deux musiciens jouent au jeu des questions-réponses, l’un joue un motif, l’autre le répète et inversement. Ils jouent également avec les effets sonores de leurs instruments, Enrico Pieranunzi monte puis redescend très rapidement le registre grave du piano pour créer une sorte de bourdonnement pendant que Rosario Giuliani émet des sons polyphoniques, c’est-à-dire qu’il émet deux notes à la fois, comme un pianiste enfoncerait deux touches ou un guitariste gratterait deux cordes, il existe des moyens pour les saxophonistes d’émettre deux notes simultanément, le résultat est une sorte de son roulé, comme un cri de vélociraptor, vous voyez ? Le morceau suivant est une composition du saxophoniste, il est intitulé « More than Ever », un thème beaucoup plus jazzy, le saxophoniste nous joue des phrases bop à un tempo d’enfer soutenues par le « walking bass » d’enrico Pieranunzi, qui parfois alterne avec un plaquage rythmique d’accords sautillant, beaucoup moins évident à suivre pour le soliste en l’absence d’un batteur ou d’un contrebassiste, mais comme vous pouvez l’imaginer les deux hommes sont loin d’être des amateurs et réalisent cet exercice avec brio. Ce type de jeu nécessite un très bon feeling, une grande capacité d’anticipation et une réelle complicité entre les musiciens, c’est une vraie leçon à laquelle on assiste ce soir car les deux italiens remplissent cette mission à merveille. Ils enchaînent avec « Lennie’s Pennies », une composition du célèbre pianiste Lennie Tristano. Rosaria Giuliani joue le thème puis s’efface pour laisser Enrico Pieranunzi développer son solo, le saxophoniste se met en retrait en fond de scène, on le voit s’accroupir et replacer son anche sur le bec de son saxophone (il faut tout soit parfait !). Pendant ce temps Enrico Pieranunzi martèle les touches de la grosse bête, son phrasé est très précis, peu importe la vitesse à laquelle il joue – et il faut dire qu’il fait preuve d’une virtuosité hors du commun – on entend très distinctement chaque note. Tempo beaucoup plus lent pour le morceau suivant, c’est « Pannonica », une ballade composée par Thelonious Monk et dédiée à la baronne Pannonica de Koenigswarter, bienfaitrice et mécène du jazz dans les années 50 et 60. Elle accueillit de nombreux jazzmen chez elle, dans sa maison du New Jersey avec vue sur Manhattan. Beaucoup de thèmes lui sont dédiés, comme par exemple « Nica’s Dream » d’Horace Silver, « Nica’s tempo » de Gigi Gryce, « Tonica » de Kenny Dorham ou encore « Thelonica » de Tommmy Flanagan. Le saxophone introduit le morceau seul, Rosario Giuliani joue des montées successives, il assoie un son grave et gras puis avec vélocité grimpe jusqu’aux notes les plus aiguës de l’instrument, comme pour pousser un cri de rage, de passion, de douleur… difficile à transcrire par des mots. Deux autres thèmes de Monk ont été joués par notre duo ce soir, « Mysterioso » et « Ask Me Now ». A deux reprises les musiciens sont rappelés, la première fois ils choisissent de nous jouer « Blue Waltz » puis, pour le deuxième et ultime rappel, ils choisissent un blues, et pas n’importe lequel, « Straight No Chaser » ! Un thème de Monk encore une fois.

Une soirée que nous ne sommes pas prêts d’oublier, en compagnie de deux musiciens extraordinaires. Merci Jazz sur son 31 !

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Neil Saidi

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