Musique
Insula Orchestra est né, vive Insula Orchestra

Insula Orchestra est né, vive Insula Orchestra

21 November 2012 | PAR Bérénice Clerc

Insula Orchestra est né à Chaville au son du Meistermusik K477 et de La Messe en Ut Mineur de Mozart. Fruit des amours de Laurence Equilbey et de la musique  dont elle avait déjà un enfant de 20 ans Accentus, sa vie a démarré en pleine santé musicale, émotionnelle, sous les applaudissements et les bravos chaleureux de la foule pour la famille désormais au complet.

Chaville, bourgade ni loin ni proche de Paris comme il en existe tant d’autres, triste à la nuit tombée, silencieuse sous le crépitement d’un néon de supermarché. Une foule se presse à l’Atrium, la salle de concert locale ou les Concerts de Marivel, association voisine, leur ont donné rendez-vous pour un concert orchestre et chœur. Cheveux blancs, tempes grisonnantes et chevelures poivre et sel sont en majorité, parmi eux quelques très jeunes prennent leur place. Savent-ils l’heure grave ? S’attendent-ils à assister à une naissance ? Impossible à deviner mais la détente semble de mise.

Les musiciens entrent en scène, sobres, tous les âges, les genres et les expériences ils s’accordent avec l’air concentré des grands jours, ils savent eux que la naissance est proche.

Le bébé se présente bien, Accentus, grand frère orchestre de voix est là, Laurence Equilbey travaille depuis de nombreuses années avec des orchestres « d’instruments » d’époque, il n’y a donc plus qu’à s’accorder et commencer le chemin vers la vie sonore d’Insula Orchestra.

Dès les premières notes du Meistermusik K477 une histoire se raconte, le son palpite ici et maintenant, une tension dramatique, un suspense, une pâte sonore se crée. Les effets de son des instruments d’époque résonnent, la balance est unique et les spectateurs déjà suspendus au fil de la partition qui apparait sous leurs yeux, au creux de leurs oreilles, dans leur corps tout entier. Le morceau est très court, comme une coupe de très grand champagne aux fines bulles il a éveillé les sens et les attentes d’un menu luxueux à venir La Messe en Ut Mineur.

La Messe en Ut est écrite par Mozart pour remercier Dieu d’être en vie et d’avoir pu épouser Constanze.

Le Kyrie happe, résonne de sincérité vocale et musicale, le mouvement descendant des violons accentué par la descente chromatique des basses, une entrée « fuguée » des chœurs majestueuse, un rythme pointé et la voix limpide, calme, lumineuse de la soprano Julie Fuchs, tout y est déjà.

Laurence Equilbey et ses musiciens rendent lisible la partition aujourd’hui avec toute la force, la sincérité et le respect de l’écriture de Mozart, son architecture, sa vision des instruments, de l’émotion et du contrepoint ici essentiel pour que la Messe en Ut mineur soit poussée à son paroxysme.

La rupture du Gloria éclate, Forte des basses aux sopranos du chœur, interrompu par l’ « et in terra » plus tragique.

Chaque instrument résonne dans son individualité et pourtant la magie orchestrale opère et forme un tout d’une qualité rare particulièrement pour un orchestre dont c’est le premier concert.

Le Laudamus donne à entendre le magnifique hautbois de Marcel Ponseele, les vents sont

exquis, les contrebasses résonnent, les altos et violons virevoltent, les percussions précises, sensuelles, le chœur puissant et délicat, les sopranos brillent dans l’art de la vocalise, l’ensemble est unique, la balance précise malgré une salle étouffant un peu le son.

Laurence Equilbey  tel l’ange de la nativité d’Insula Orchestra, révèle, apporte le message, prie, protège, pourvoit au besoin de ses musiciens, guide, exécute. Elle livre une direction vive, mordante, acérée et sculpte la musique de sa baguette fine et ses doigts attentionnés sans oublier un regard pour chacun, une vision pour tous.

Insula Orchestra, Accentus et Laurence Equilbey embarquent les spectateurs dans leur aventure et transforment le son des instruments en émotion viscérale emportés par la tension dramatique de la Messe en Ut mineur.

La salle applaudit à tout rompre, certains debout hurlent bravo, Insula Orchestra est né, vive Insula Orchestra.

Cela doit en agacer plus d’un mais force est de constater qu’une fois de plus Laurence Equilbey réussit son pari aussi risqué soit il.

Soutenir l’excellence n’est pas chose commune il faut donc saluer Patrick Devedjian et ses contribuables  financeurs de la naissance de cet orchestre, ils contribuent à l’identité culturelle des Hauts-de-Seine en France et à l’étranger où elle brille hélas de plus en plus souvent par son absence ou sa médiocrité… La Culture doit absolument être au cœur de l’éducation, elle est le seul vecteur solide d’une société stable et saine mentalement et offre les fondations nécessaires au monde.

Laurence Equilbey crée un orchestre baroque .3 ou 3G pour les amis de la pomme, quelle joie d’entendre des instruments d’époque résonner sans le cortège de déguisements ridicules, historicisant ou les fausses idées baroqueuses d’un passé qui n’est plus à vivre pour livrer une musique dont l’impératif catégorique est de palpiter et résonner dans notre temps.

Un orchestre débutant est rarement aussi brillant, peu communs sont les si beaux babillages, bientôt il aura son propre langage, sa personnalité, il marchera de plus en plus loin et prendra comme son ainé Accentus son indépendance et ira à la rencontre d’autres chefs. Longue vie à Insula Orchestra.

Si vous êtes en région parisienne courez ce soir 21 novembre à Boulogne Billancourt au Carré Bellefeuille ou à Versailles le 24 novembre à la chapelle royale. Ce programme sera enregistré le 23 novembre et diffusé le 25 décembre à 19h sur Arte.

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Bérénice Clerc
Comédienne, cantatrice et auteure des « Recettes Beauté » (YB ÉDITIONS), spécialisée en art contemporain, chanson française et musique classique.

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