Classique
Ravel au musée Guimet

Ravel au musée Guimet

20 March 2021 | PAR Gilles Charlassier

A huis clos depuis le Musée Guimet, la saison des Pianissimes ne se laisse pas interrompre par la crise sanitaire et se poursuit avec un récital de Clément Lefebvre consacré à Ravel.

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Si la crise sanitaire sacrifie les moments de convivialité, les Pianissimes, comme d’autres saisons musicales, n’entendent pas être réduits au silence. En ce vendredi 19 mars, Clément Lefebvre présente au Musée Guimet un récital consacré à Ravel. Lauréat du Concours Long-Thibaud en 2019, le jeune soliste, qui a déjà défendu pour les Pianissimes les couleurs de la musique française avec Rameau et Couperin, programme qui avait été l’objet de son premier enregistrement, paru chez Evidence Classics en 2018 et salué par la critique avec, entre autres, un Diapason d’or découverte, confirme son affinité avec ce répertoire en mettant en avant un maître du début du vingtième siècle qui ne dissimule pas son admiration pour les modèles de l’âge baroque. Toute en nuances et en raffinements, la poésie de l’horlogerie fine de Ravel trouve en Clément Lefebvre un remarquable avocat qui conjugue la lisibilité de la ligne et de la forme avec une authentique sensibilité de l’expression, retenue mais sans maniérisme ni pudibonderie importune.

Le naturel de ce jeu s’entend dès la Sonatine qui ouvre le concert, avec une lecture habilement contrastée, où la clarté de l’articulation magnifie la respiration dans cette pièce brillante, et ne confond pas virtuosité et vanité. Cet équilibre de la sonorité se confirme dans deux numéros des Miroirs, les scintillements irrésistibles d’Une barque sur l’océan et la pulsation rythmique nourrie d’hispanismes et non dénuée d’une certaine ironie d’Alborada del gracioso. Sensualité calibrée et imagination évocatrice vont de pair avec une certaine décantation jamais austère qui sert magistralement les Valses nobles et sentimentales. Quand d’aucuns aiment à se laisser aller au flux affectif de ces miniatures, le pianiste français s’attache à ciseler chacune, dans un kaléidoscope qui les individualise et rend immédiatement perceptible le rythme du cycle dans l’alternance des caractères. Enfin, le Tombeau de Couperin referme ce spicilège ravélien dans un prolongement de son premier disque : l’instinct de la forme et la palette de couleurs offrent une lumineuse conclusion à un programme qui fera très prochainement l’objet d’une gravure.

Si la soirée ne peut pas se poursuivre, comme c’est, en temps normal, l’usage aux Pianissimes, avec un verre convivial où le public peut approcher l’interprète, l’échange avec les auditeurs, derrière leur écran grâce à la plate-forme RecitHall qui diffuse le concert, se fait par des questions envoyées sur le tchat et que transmet Olivier Bouley au soliste dans cet after à distance. Le virtuel ne manque certes pas de vertus, mais le retour en salles permettra indéniablement aux Pianissimes de retrouver leur véritable identité, celle d’une rencontre quasi intime entre les mélomanes et les artistes.

Gilles Charlassier

Les Pianissimes, récital de Clément Lefebvre, en direct du Musée Guimet sur RecitHall le 19 mars 2021, et en replay pendant 15 jours sur RecitHall

©Jean-Baptiste Millot

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