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[Live Report] Raphaël Pichon et l’ensemble Pygmalion fêtent la Saint Michel

[Live Report] Raphaël Pichon et l’ensemble Pygmalion fêtent la Saint Michel

16 October 2014 | PAR Victorine de Oliveira

Dans le cadre du cycle « Guerre et paix » organisé par la Cité de la musique, Raphaël Pichon et son ensemble Pygmalion terrassaient le dragon armés de cantates acérées.

C’est un de ces dimanches mornes et pluvieux dont Paris a le secret. Sur le parvis de la Cité de la musique, les passants sont rares et pressés, peu bifurquent vers la salle de concert. L’un des ensembles baroques les plus enthousiasmants fondé ces dernières années s’apprête pourtant à monter sur scène : l’Ensemble Pygmalion, mené par son jeune chef Raphaël Pichon (trente ans !).

« Saint Michel et le dragon » : voilà pour le programme. L’occasion de réunir un bouquet de six cantates triomphales signées Bach, père et fils. Une salle pour moitié vide – quel dommage ! – n’empêche pas les musiciens de jouer avec envie et sourire. La battue de Pichon, précise et sautillante, imprime précision et finesse des articulations à un chœur impeccable. Tiré du Livre de l’Apocalypse, l’épisode dont sont tirés les textes mis en musique raconte le combat de l’archange Gabriel contre le dragon jaloux. L’animal démoniaque, « serpent furieux », « dragon des Enfers », est bien entendu vaincu. Autant vous dire que textes et musique exultent en célébrant la puissance du ciel, de la lumière et des anges !

A programme festif, solistes chatoyants. La soprano portugaise Ana Quintans déploie un timbre clair, une voix lumineuse et souple, sans trop d’effets. Celle d’un d’ange ? C’est facile, mais oui, allez ! Le contre-ténor Damien Guillon, ici présenté comme alto, fait entendre des ombres aussi troublantes qu’intéressantes, bouleversantes. Un peu moins emballé par le ténor Nick Pritchard, à la faible projection, on n’oublie pas les vocalises de Christian Immler, superbes dans l’air de basse « Kraft und Stärke sei gesungen Gott » (« Que la force et la puissance de Dieu soient chantées »).

Les chœurs offrent d’intenses moments de joie musicale, notamment dans la surprenante cantate Heilig de Carl Philipp Emanuel Bach. Ecrite à double chœur, propice aux effets de spatialisation, elle fait tout à coup trembler une Cité de la musique pourtant pas toujours adaptée à la faible puissance sonore des instruments anciens. Mais les plus belles pages sont peut-être celles où dialoguent soliste instrumental et soliste vocal : basse et basson dans l’air précédemment cité, ténor et traverso dans « Lass, o Fürst der Cherubinen » (« Laisse, o Prince des Chérubins »). On vous conseille d’ailleurs vivement d’écouter l’entrelacement du violon à la voix de Damien Guillon sur un « Erhalte mich » tiré de la Köthener Trauermusik de Bach, disque de l’Ensemble Pygmalion récemment paru chez Harmonia Mundi : c’est tout bonnement à pleurer.

A entendre une jeune fille louer « un répertoire enthousiasmant » une fois le concert terminé, on se dit que, même peu nombreux, le public a su goûter la fête !


visuel: Raphael Pichon © Franck Ferville

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Bastien Stisi
Journaliste musique. Contact : [email protected] / www.twitter.com/BastienStisi

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