Classique
Guimet invite Berlioz

Guimet invite Berlioz

06 November 2017 | PAR La Rédaction

Le vendredi 3 et le samedi 4 novembre, le Musée national des arts asiatique-Guimet a organisé, en partenariat avec le Festival Berlioz de la Côte-Saint-André, quatre concerts. Ces derniers étaient inspire?s par les textes de Berlioz de?couvrant les pavillons exotiques de l’Exposition universelle de Londres, en 1851 : « Concert sur la jonque chinoise », « Les flûtes enchantées », « Compositions persanes et mélodies de l’antique Iran », et « L’Asie entendue à Paris au temps d’Émile Guimet ».

Le samedi, « Les flûtes enchantées » propose un voyage dans les répertoires évoquant la figure du joueur de flûte aux pouvoirs magiques. Samuel Bricault à la flûte traversière et Rishab Prasanna à la flûte indienne bansuri, liée au dieu Krishna, livrent à un jeu de miroirs avec Préludes à l’après-midi d’un faune de Debussy, Orphée et Eurydice de Gluck, Daphnis et Chloé de Ravel, mais aussi de la musique hindoustanie (musique classique indienne) à grands ragas, ainsi que des improvisations, parfois faisant imiter sur l’instrument occidental la technique et le jeu de l’instrument oriental. Le concert est ponctué de quelques commentaires sur les pièces jouées et de lectures, notamment du Traité d’instrumentation et d’orchestration de Berlioz à propos de la flûte. Une approche pleine d’intérêt, mêlant musique et poésie, qui montre que le pouvoir attribué à cet instrument est universel.

À ce concert succède un autre, consacré à la musique classique d’Iran, des 11e au 19e siècles. Le tambour tombak (ou zarb), le tambourin daf, les luths tanbur, setâr et târ, et le vièle kâmanche forment un ensemble, purement instrumental ou accompagnant le chant. Les pièces interprétées sont en modes Mâhur, Delkash, Homâyun, Shushtar, Bakhtiari, Dogah… Malgré notre totale ignorance sur les gammes persanes, nous devinons la grande subtilité de ces musiques, contemplative, épique ou festive.

Vient enfin le concert qui clôture le week-end, dans la cour Khmer du musée, où les musiciens de l’orchestre Les Siècles s’installent entourés de gigantesques sculptures sud-est asiatiques. Le programme fait écho au voyage de Guimet en Asie en 1876. L’ouverture de La Princesse Jaune, premier opéra créé de Saint-Saëns (1872), l’air « Le jour sous le soleil béni » de Madame Chrysanthème de Messager, et des extraits de Lakmé de Delibes, nous emportent dans un Orient imaginaire, alors que Maurice Delage s’inspire de son séjour en Inde pour Quatre poèmes hindous dédiés à quatre villes, Madras, Lahore, Bénarès et Jaipur. Dans Les Troyens (cinq morceaux de ballets), Berlioz nous amène en Asie mineure et Ravel en Chine de conte de fée avec « Impératrice des pagodes », extraite de Ma Mère l’Oye. Mais le clou de la soirée revient à l’ouverture de Taï-Tsoung, opéra en cinq actes écrit par Émile Guimet lui-même, relatant la vie (imaginaire et légendaire) d’un empereur chinois. L’unique représentation de l’opéra fut réalisée à l’Opéra de Marseille en 1894. La musique, jouée pour la première fois dans le musée fondé par le compositeur, est quelque peu décousue, avec une multitude d’idées qui ne sont pas efficacement ordonnées. D’une grande fanfare du début à un allegro aux harmonies, puis à l’ensemble final, en passant par une partie lente à la prédominance des cordes et un passage belliqueux, des scènes se succèdent, telles des séquences cinématographiques… L’interprétation énergique et enlevée de l’orchestre fait résonner pleinement la musique de Guimet dans un espace où l’acoustique est très généreuse, qui convient mieux à la musique de chambre ; les musiciens, et surtout le chef François-Xavier Roth très ému, transmettent leur enthousiasme (plus qu’habituel) au public, ravi.

Au cours de ce dernier concert, nous avons découvert la soprano coréenne Dongmin Lee, née à Séoul en 1990. Formée dans sa ville natale puis à Cologne, elle possède une voix riche et colorée à une bonne émission naturelle. Si elle a chanté sans tellement de difficultés les contre-mi de l’Air des clochettes, son timbre, loin de colorature, semble mieux adapté à un autre répertoire, plus expressif. Elle rejoindra officiellement Les Siècles en décembre prochain.

Les Flûtes enchantées :
Œuvre de Claude Debussy, Maurice Ravel, Christoph Willibald Gluck, Sour-Dâs, improvisations.
Samuel Bricault, Roshab Prasanna, flûtes.

Compositions persances et mélodies de l’Antique Iran :
Chant de Lorestan : Ouverture de l’épique du Shahnâmé de Ferdowsi, Suites classiques en modes Mahur et Homâyun, Chansons festives de Boudkara, duo de tambaks.
Znsemble Leyli : Asaré Shekartchi, chant, kâmantche, tombak ; Leyli Atashkar, setâr, târ ; Jean During, tanbur, târ, daf ; David Alidad During, tombak

L’Asie entendu à Paris au temps d’Emile Guimet :
Camille Saint- Saëns, La Princesse Jaune, ouverture
Maurice Delage, Quatre Poèmes Hindous
André Messager, Madame Chrysanthème « Le jour sous le soleil béni »
Hector Berlioz, Les Troyens, ballet
Emile Guimet, Taï-Tsoung, ouverture
Maurice Ravel, Ma Mère l’Oye « Laideronette Impératrice des Pagodes »
Léo Delibes, Lakmé « Les Fleurs me paraissent plus belles », airs de danses, « Légende de la fille du Paria »
Dongmin Lee, soprano ; Orchestre Les Siècles, François-Xavier Roth, direction

visuel : affiche de l’événement

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