Amos Gitaï met les mots en scène dans la Guerre des fils de lumières contre les fils des ténèbres à l’Odeon
Amos Gitaï met en scène à l’Odeon-Théâtre de l’Europe la Guerre des fils de lumières contre les fils des ténèbres, jusqu’au 10 janvier. Jeanne Moreau est Flavius Joseph, auteur, acteur et spectateur de “La Guerre des Juifs” qui au 1er siècle a vu la révolte de Judée où les Juifs ont résisté et perdu face aux Romains.
La version présentée jusqu’au 10 janvier est pensée plus épurée pour l’Odeon, le spectacle avait en effet été créé en France pour la carrière Boulbon, lieu classique du festival d’Avignon, carrière de pierre à ciel ouvert à l’allure lunaire et au plateau immense. L’Odeon est à l’inverse un beau théâtre à l’Italienne aux dimensions plus parisiennes.Pour résoudre la double équation du passage du plein air au fermé et de l’immense au grand, Amos Gitaï a choisi de vider l’espace, d’utiliser les échafaudages différemment et surtout de supprimer, à regret pour ceux qui auront eu la chance de voir la précédente version, le rôle de Titus, traducteur en français du père, Vespasien, en anglais.
Le titre La Guerre des fils de lumière contre les fils des ténèbres, est emprunté à l’un des Manuscrits de la Mer Morte, là encore, Amos Gitai va chercher dans les textes et les archives, dans une démarche talmudique du commentaire de chaque mot. Les mots, il les jette en fond de scène et il les fait entendre dans toutes les langues, sans les mélanger, nous sommes à Babel, les échafaudages peuvent être ceux de la tour qui mène à la confusion entre les peuples . Jusqu’où aller pour garder sa terre ? En montrant, le militant Gitaï dénonce : se suicider, manger son enfant ? Non! Répond-il en reprenant le rôle d’Elmosnino , celui qui agit, qui lutte, qui résiste, mais pas à n’importe quel prix, condamnant l’extrême en balançant le texte avec désinvolture.
Les mots, c’est Jeanne Moreau qui les lit, assise au bureau, jouant de sa voix, d’un battement de cil ou de main, elle est l’historien Flavius Joseph qui raconte ce qu’il a vu et ce qu’il a su. Vous assisterez à un spectacle tendant à la lecture, épuré à la Brook, intimiste à la Mnouchkine, c’est-à-dire de ces metteurs en scène qui utilisent un grain de sable pour figurer le désert, un tissu pour faire un radeau et qui eux aussi mettent les musiciens au coeur. Amos Gitai économise la mise en scène laissant l’imagination reine et le symbolique maître. Laissez-vous emmener par l’armée qui tambourine aux portes de Jérusalem, les Juifs qui résistent, ceux qui craquent.
Amors Gitaï fait résonner le passé sans le calquer sur le présent, conscient qu’on ne peut tirer de leçon de l’histoire, juste savoir , apprendre et laisser à chacun le soin de faire son lien avec l’actualité au Proche Orient.
Théâtre de l’Odéon, Place de l’Odéon Paris 6e, M. Odéon – RER B Luxembourg Location 01 44 85 40 40 / theatre-odeon.eu, Tarifs 32€ – 24€ – 14€ – 10€ (séries 1, 2, 3, 4), Horaires du mardi au samedi à 20h, dimanche à 15h. Jusqu’au 10 janvier.
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Commentaire(s)
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yael
Question : si jeanne moreau est tranquillement assise à une table à lire du Flavius Josèphe, en quoi est-ce encore du théâtre… Sans vouloir faire ma vincent delerm : pas de décor, pas de texte, pas etc…
Amelie Blaustein Niddam
Réponse ! ;)
Bonne question.
C’est du théâtre entre performance et concert. Un spectacle vivant.
Elle joue , elle joue sans cesse , dans sa lecture, le regard, le geste.
Le décor est au contraire superbe. Les murailles de Jérusalem deviennent l’armée romaine en fonction de la lumière projetée.
Le texte est la splendeur de Flavius Josèphe, toujours limpide deux millenaires plus tard.
difficile de dire que le théâtre se résume aujourd’hui à la présence d’un certain type de texte et de décor. On est aujourd’hui face à du spectacle vivant qui mixe tous les arts de la scène. C’est ce que Gitaï fait en confrontant les langues parlées et musicales.
et c’est exactement ce pourquoi j’aime le spectacle vivant et adore ecrire pour la boite à sorties!