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Une histoire de la presse Rock en France : soixante ans de contre-culture par Grégory Vieau !

Une histoire de la presse Rock en France : soixante ans de contre-culture par Grégory Vieau !

31 October 2021 | PAR Jean-Christophe Mary

Après l’explosion du jazz puis du rock’n’roll, le monde des arts, celui de la musique en particulier, connait une explosion de créativité sans précédent en France. La culture teenager qui ne se reconnaît plus dans la presse généraliste gaullienne se jette sur cette nouvelle presse rock. Grégory Vieau journaliste (Arte, VICE, New Noise) raconte l’histoire de ces magazines spécialisés qui avant les radios libres, étaient le seul moyen de s’informer sur les nouveaux courants de la scène rock internationale.

Dans le sillage de la révolution culturelle anglo-saxonne, la musique rock connait aussi en France une ébullition créatrice qui donne au pays tout entier une bande son pleine de fraicheur et de liberté. Quelques jeunes ados passionnés vont redoubler d’inventivité pour réunir les fonds nécessaires au lancement de magazines dont ils rêvent. L’idée étant que la presse musicale rock ne soit plus considéré comme un parent pauvre au milieu des magazines, mais devienne un vrai outil d’information. Après des débuts sont balbutiants, naissent Disco Revue et Salut les Copains, Rock & Folk ( d’abord hors série de la revue Jazz Mag avant de devenir mensuel !) puis Best, Rock Sound et Rolling Stone France, sans oublier Pop Music, Extra mais aussi Les Inrockuptibles ou les pages musique du quotidien Libération. Couvrant la période de 1961 à nos jours, l’ouvrage relate les temps forts de ces revues à travers la ténacité de journalistes et photographes pour la plupart autodidactes, bien décidés à faire bouger l’ordre établi par la presse généraliste. L’arrivée de ces nouveaux magazines change la donne. Lire devient un rituel car ils sont attendus comme le messie en début de mois. A la différence de la presse nationale ou régionale, le lecteur y puise alors toutes les infos sur les courants du rock, les chroniques de disques, mais aussi les dates et compte-rendu de concerts. L’idée est de dénicher les nouvelles musiques anglaises et américaines, de sillonner les seules scènes rock où ca bouge. Dans la France Giscardienne des 70’s, le mot rock n’est pas pris au sérieux. Si les radios consacrent un peu d’antenne sur le sujet , les 3 chaines qui succèdent à l’ORTF en 1974 TF1, Antenne 2 ou FR3 n’en parle jamais. Les revues spécialisées passent en revue tous les styles, rock, folk, blues, R & B, envoient des reporters dans toutes les villes où la scène rock est en pleine effervescence (New York, Los Angeles, San Francisco, Londres). Ces revues font échos des évolutions cette musique rock en perpétuelle évolution mais traite aussi des mouvements culturels politiques et sociaux. Très rapidement sous la plume de ces journalistes en herbe, les revues deviennent des bibles pour les amateurs de rock avec des tirages qui font aujourd’hui rêver (Best tire à 200.000 exemplaires en 1980, Rock & Folk 130.000 exemplaires en 1981). Fondé par Gérard Bernar sur les cendres de Disco Revue, Best est devient vite l’« insolent rival » du leader Rock& Folk. Edité en monochrome, d’abord bi-mensuel puis mensuel, le magazine compte dans ses rangs Catherine Claude, première femme à écrire sur le rock. Un tour de force dans un milieu largement dominé par les hommes. Plus populaire, Best s’ouvre aux nouveaux styles musicaux quand Rock & Folk se veut plus intello et élitiste. Magazine interactif, les nombreux lecteurs votent chaque mois pour les albums du moment. Sans oublier les posters en page centrale qui décorent les murs des chambres d’ ados. Grégory Vieau a retrouvé et interviewé quelques vétérans de cette épopée fantastique où défile ici une pléiade de rock critiques aux plumes aiguisées, tels Jacques Barsamian (Disco Revue), Alexis Bernier (Rock & Folk , Trax) Michka Assayas (Rock & Folk, Libération), Yves Adrien (Rock & Folk), Philippe Manœuvre (Rock & Folk), Francis Dordor (rédacteur en chef de Best), Patrick Eudeline (Rock & Folk), Sasha Reins ( Best) Christophe Conte (Inrockuptibles, Libération), Franck Frejnick (Rock Sound), Serge Loupien (Libération) Gérard Bar-David (Best, Rolling Stone) ou Laurence Romance (Best) pour ne ne citer qu’eux. Ce précieux ouvrage compile une somme d’anecdotes et d’informations sur la naissance, le fonctionnement et l’apogée de ces revues pour la grande majorité disparues aujourd’hui. Pop, Rock, folk hard rock puis punk rock, les magazines spécialisés se multiplient aussi vite que les genres musicaux se créent. En mage des kiosques et maisons de presse, les magasins de disques alternatifs tel l’Open Market de Marc Zermati et Jacques Dauty au 58, rue des Lombard à Paris relaient cette presse de la contre culture en pleine effervescence. Tout est raconté ici avec des détails croustillants de manière chronologique. Ça se lit d’une traite.

Une histoire de la presse Rock en France. Grégory Vieau. Le Mot Et Le Reste. 464 pages.
Visuel : couverture du livre

Une Conf’ pour sauver la Vie : sauvés par le clown
Pene Pati en benêt magnifique illumine la seconde distribution de L’Elisir d’amore à la Bastille
Jean-Christophe Mary

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