Cinema
Festival de Deauville 2022 – 1-800-HOT-NITE : Les fractures sociales de la jeunesse américaine d’aujourd’hui

Festival de Deauville 2022 – 1-800-HOT-NITE : Les fractures sociales de la jeunesse américaine d’aujourd’hui

05 September 2022 | PAR Yohan Haddad

Pour son premier film en compétition à Deauville, Nick Richey explore le destin de trois adolescents au coeur d’un voyage initiatique dans une Amérique pauvre et sans espoir.

Trois garçons. Trois avenirs incertains. Liés par une seule et même idée : parler à une “sex hotline”, équivalent du téléphone rose européen où une voix féminine propose un déshabillage vocale pour 99 cents la minute. Au cours de cette scène d’introduction brillamment bien écrite, le caractère de ces trois jeunes se dessinent : c’est le temps de l’insouciance. Le temps de l’amour, mais aussi le temps de la rébellion et de la violence physique et verbale. Dans ces États-Unis au détour d’une nouvelle décennie, tout  semble s’écrouler, en particulier vis-à-vis des minorités sociales et des marginaux, des reclus et des incompris.

Avec 1-800-Hot-Nite (et son titre bien trop difficile à prononcer pour les francophones), Nick Richey signe un deuxième long-métrage aux idées foncièrement contradictoires. C’est une ambition réaliste qui semble se déployer durant les premiers instants du film, notamment à travers le personnage de Tommy, jeune garçon plein d’espoir qui se fait rattraper par le passif de son père. À travers cette figure criminelle, Tommy se (mé)prend pour un dommage collatéral. Cette contradiction illustre parfaitement le personnage, dans le plein tourment de l’adolescence, où l’enfant devient finalement adulte. Pourtant, derrière cette idée, se cache une poignée de clichés ambulants et sentimentaux, qui vient totalement briser cette barrière du réalisme. La rencontre avec la dame de la « hotline » en est le paroxysme le plus fulgurant. Comment croire à cette rencontre entre ce jeune garçon à qui elle parle pendant 5 minutes, jusqu’à venir à sa rescousse et lui faire la morale ? 

La trame narrative du récit en devient donc forcément inégale. Les séquences se suivent et s’affirment comme indépendantes, devenant par addition incohérentes. Une séquence de 2 minutes dans les rues de la ville est suivie par une séquence de tension  de près de 15 minutes (comme celle où Tommy se retrouve enfermé dans une maison avec trois hommes aux intentions discutables, proches de la pédophilie).

1-800-HOT-NITE est donc une tentative ratée d’explorer les enfances d’une Amérique fracturée, dans une sincérité souvent excessive bien que toujours proche de son personnage principal, dans un style très (trop ?) volontairement “indé”, ne s’affranchissant d’aucun des codes classiques du cinéma à “l’américaine”, entre jérémiades sur l’avenir et maximes sur l’insouciance du présent.

© Visuel : HALFWAY CROOKS

 

 

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