Livres

Rentrée littéraire : Le vieux rocker blonde

23 July 2008 | PAR Yaël Hirsch

Après avoir décrit la vie d’une Bovary bretonne contemporaine dans « Madeleine », Amanda Sthers choisit la vie déjantée du guitariste des Stones, Keith Richards comme sujet littéraire de son nouveau livre. Licence poétique oblige, Keith embrase la tête de la jeune auteure blonde, jusqu’à ce que leurs trajectoires biographiques s’étreignent. « Ma vie de Keith Richards » (Stock), n’est pas un conte de fées. Sortie le 20 août.

Des épisodes de la vie de Keith Richards s’entremêlent avec le divorce douloureux de l’auteure. Composé comme une fugue qui se terminerait avec une belle boucle blonde, le texte superpose le Kent pluvieux et Paris la grise, l’ambiance électrique des backstages et les dialogues avec les enfants, les lettres de fans, les interview défoncées, les rapports de police et les rêverie d’une jeune fille devenue mère. Keith et Andréa racontent à la première personne, jusqu’à se confondre dans le flot musicale de ces mots. Le rythme a la violence lancinante d’une guitare qu’on gratte. La drogue et la douleur se rejoignent dans un tonnerre de ressenti brut qui arrime la lecture à l’honnêteté. Keith Richards, c’est l’enfance d’Andrea Stein, c’est l’innocence de celui qui sait qu’il a un vrai talent et qui s’y noie.

Qui veut faire l’ange est bien bête, qui a les moyens de devenir Dieu sur scène connaît la descente aux enfers. Ravie, Andrea Stein prend ce train souterrain et entre dans la peau de Keith Richards pour surmonter sa rupture. A grand renfort de métamorphoses et d’ironie, elle se retrouve. La musique accompagne ces mailles du filet, toujours percé, laissant toujours le double corps de Keith/Andréa à découvert. De l’autre côté, les proches, les moins proches, la société observe et commente. Les ruptures comme les overdoses sortent nécessairement de l’intime. Il y a toujours plus d’un corps concerné, surtout quand il y a des enfants. Renouant avec son premier texte publié « Ma place sur la photo », Amanda Sthers retrouve par Keith Richards la voie de l’autofiction. Elle brouille les pistes et paradoxalement, dans une suffocation tonitruante de mots, elle parvient par cette voie détournée du baiser du rocker à se livrer avec encore plus de sincérité.

Amanda Sthers, “Keith me”, Stock, 14,50 euros.

Moi j’ai tout bien expliqué à mes enfants, comme dans les livres […] Alors que j’aurais du leur dire notre échec lamentable. Maman ne fait plus bander papa, les enfants, et tout part de là, vous savez ? Tout. Maman a cru que c’était utile d’être admirée et un peu plus intelligente que les autres filles aux yeux bleus. Nada. Il fallait leur dire ça pour qu’ils gagnent du temps. Que les princes tôt ou tard se barrent sur leurs chevaux blancs dans des contrées lointaines. Que les promesses sont tachées dès qu’elles sont formulées. Si on promet, c’est qu’on choisit. Et finalement, on veut toujours le parfum dans le cornet du copain. Tu es sûr ? Bien sûr ? C’est moi que tu aimes ? Mais oui. Pourquoi tu poses cette question ? Parce qu’il a pas mal d’options dans le reste de l’humanité. C’est toi que je veux. J’aurais du leur dire qu’un jour on se hait. Et que, ça encore, ça ressemble à une histoire. J’aurais du leur dire qu’un jour, on se méprise, on s’indiffère” p. 27

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Yaël Hirsch
Co-responsable de la rédaction, Yaël est journaliste (carte de presse n° 116976), docteure en sciences-politiques, chargée de cours à Sciences-Po Paris dont elle est diplômée et titulaire d’un DEA en littérature comparée à la Sorbonne. Elle écrit dans toutes les rubriques, avec un fort accent sur les livres et les expositions. Contact : [email protected]

4 thoughts on “Rentrée littéraire : Le vieux rocker blonde”

Commentaire(s)

  • Bon…
    Alors Honky tonk woman you’ve got the blues ?

    July 23, 2008 at 19 h 07 min
  • Great site.

    January 25, 2009 at 6 h 09 min
  • galli-douani

    PROCHAINEMENT EN AOUT 2010 SORTIE DU LIVRE

    CLEARSTREAM – EADS :LE SYNDROME DU SARKOZYSME

    Ecrit par Jean GALLI-DOUANI
    Editions BENEVENT
    QUATRIEME DE COUVERTURE

    Les relations ambiguës du sarkozysme avec la haute finance,,,

    En 1993 Edouard BALLADUR s’installe à Matignon, à ses côté, Charles PASQUA ministre de l’Intérieur et Nicolas SARKOZY au Budget occupent des postes stratégiques. Mes fonctions de chef d’entreprise et de responsable de marché public me conduisent alors à côtoyer la redoutable réalité du pouvoir. Je suis pour la première fois confronté à l’affairisme, la corruption et le népotisme.

    Là où la réalité dépasse la fiction, une succession effrénée d’incroyables évènements vous projetteront au cœur des affaires politico-financières des quinze dernières années au sommet de l’état. Témoin dans l’affaire CLEARSTREAM puis, involontairement, EADS, détenant des documents extrêmement compromettants, il est engagé par le pouvoir une véritable chasse à l’homme…

    August 11, 2010 at 13 h 19 min

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