
« Proies » d’Andrée A. Michaud : la douche froide
Dans son dernier roman Proies, Andrée A. Michaud, auteure québécoise, nous accompagne sous une canopée de maux et de mots.
Trois jeunes amis, Jude Abe et Alex, partent sac au dos pour une balade de plusieurs jours dans la forêt de La Brûlée. Ils laissent sans le savoir un monde paisible où règnent la concorde et l’harmonie.
La construction du livre est originale, intéressante aussi. Les premières pages, malgré une ambiance bucolique, annoncent de façon placide les horreurs à venir. Andrée A. Michaud nous indique aussi que Proies n’est pas un remake de Deliverance (de John Boormann) mais nous supputons qu’elle ment.
Le style de l’écrivain influence en profondeur Proies. La linguiste qu’elle a été marque son territoire par ses phrases.
Elles sont directes, percutantes, belles : « C’est la dernière image enjouée qu’il garderait de sa fille, celle d’une frêle silhouette baignée de lumière piétinant l’ombre longue qui la devançait ».
Mais aussi d’une préciosité qui n’apporte rien au polar. « Ce n’était rien, des branches qui se caressaient, frottaient l’une contre l’autre leurs feuilles alanguies, ou alors un petit animal apeuré attiré par les odeurs du campement, ses piétinements produisant l’effet d’un chuchotement, d’un froissement de tissus ».
Malgré tout, l’intrigue de Proie est forte. Ainsi, un climat malsain plonge le lecteur dans la sidération, entraînant chez lui une respiration lourde et saccadée.
La maison d’édition classe Proies dans la catégorie des « romans noirs littéraires » sur la quatrième de couverture. Le polar est une grande famille ou une auberge espagnole, c’est selon.
Proies d’Andrée A. Michaud. Éditions Rivages/Noir. 2023, 233 pages, 21€.