Fictions
« La Face cachée du dollar » de Ross Macdonald : Le disparu de Laguna Perdida

« La Face cachée du dollar » de Ross Macdonald : Le disparu de Laguna Perdida

24 May 2023 | PAR Julien Coquet

Poursuivant leur travail de réédition des romans de Ross Macdonald, les éditions Gallmeister publient une nouvelle aventure de Lew Archer où l’enlèvement d’un jeune homme conduit à un hôtel abandonné.

Moins connu que ses deux grands contemporains, Dashiell Hammett et Raymond Chandler, Ross Macdonald n’en est pas moins une figure importante du roman noir américain de l’après-guerre. Dans son Dictionnaire amoureux du polar, Pierre Lemaitre rend ses lettres de noblesse à cet auteur trop peu connu chez nous, et à son détective privé récurrent, Lew Archer. « Le roman noir est une littérature du dégât dans laquelle Macdonald offre à son héros récurrent « un masque de soudeur pour manipuler un matériau dangereusement chaud » ».

Dans La Face cachée du dollar, le « matériau dangereusement chaud » prend la forme de Tom Hillman, garçon échappé de Laguna Perdida, un centre de redressement proche de Los Angeles. Engagé par le directeur de l’établissement, Lew Archer se rapproche du père du jeune homme, riche navigateur. Ce dernier a reçu un coup de fil : son fils, après s’être escamoté, a été enlevé. La rançon pour autant livrée, le fils reste introuvable, et Lew Archer de partir à sa recherche, sur une route parsemée de cadavres.

Il y a, chez Ross Macdonald, une mécanique très satisfaisante du roman policier. Ici, un détective, spécialisé dans les affaires délicates de riches familles, dénoue les fils d’une intrigue tortueuse d’indice en indice. Ross Macdonald balade son lecteur de témoin en témoin, du garagiste au gardien d’un hôtel désaffecté, de la mère de Tom à un lieutenant de police, le tout débouchant sur la résolution de l’intrigue. Si le procédé peut paraître simple et redondant, il n’en est rien pour deux raisons : d’une part, un sens du dialogue incomparable (« – Ça n’a plus d’importance. Elle est morte. – Ça en a, aux yeux des cieux. ») et, d’autre part, dans le même registre, des trouvailles linguistiques très bien rendues par la traduction de Jacques Mailhos (« Le soir tombait comme un lavis de gris sur leurs visages. », « A la voir, on aurait dit que chaque minute de ces quarante-huit heures lui avait traversé le corps comme du fil barbelé. »). Et puis, comme dans tout polar américain d’après-guerre, il y a ce charme de l’Amérique des années 50, avec les grosses voitures, les chapeaux en feutre, les litres d’alcool, les dizaines de cigarettes, les téléphones à cadran… Une écriture classique et intelligente au service d’une intrigue profondément ancrée dans son temps.

La Face cachée du dollar, Ross MACDONALD, traduit de l’américain par Jacques Mailhos, Editions Gallmeister, Collection Totem, 368 pages, 11 €

Visuel : Couverture du livre

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Julien Coquet

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