“Un crime sans importance” : Irène Frain parle du meurtre encore impuni de sa soeur
Avec Un crime sans importance, Irène Frain revient sur l’assassinat brutal de sa sœur de 79 ans, Denise, quatorze mois après les faits. Mise en cause implacable d’une justice lente par l’écriture, ce roman à fleur de peau se déploie comme une fleur noire et entêtante. Un livre justement sur la liste du prix Goncourt.
Une vieille dame comme il y en a des milliers en France, indépendante, capable de conduire et mener une vie solitaire, malgré ses maladies, se fait agresser et battre à mort dans une ville comme il y en a mille en France. Quatorze mois plus tard, au moment où sa sœur prend la plume, la justice n’a pas avancé d’un iota pour trouver et juger le coupable de ce Crime sans importance.
Commençant par les faits, le plus abstraitement possible pour après rendre un visage à sa sœur, Irène Frain intervient tardivement comme personnage principal de ce livre. Et pourtant quel “moi” elle nous livre : en colère, en recherche et aussi se regardant faire. Elle revient sur les aspects biographique nécessaire à la compréhension de l’intrigue. C’est-à-dire pourquoi c’est elle qui monte au créneau pour demander justice pour une sœur qu’elle n’a pas vue depuis des lustres. Lucide sur ses motivations et ce rôle qu’elle doit jouer, elle est d’autant plus implacable dans sa dénonciation du processus d’enquête et de justice, qu’elle se juge elle-même, n’est jamais hargneuse, et ne généralise jamais pour rester au cœur d’un exemple parfaitement littéraire. L’écriture naît en direct sous les yeux du lecteur pour pallier le manque de justice, en espérant toujours que celle-ci advienne. Désormais on attend avec elle. Un livre où le style agit et qui est dont d”une force tout particulière.
Irène Frain, Un crime sans importance, Seuil, 18 euros, sortie le 20/08/2020.
visuel : couverture du livre