
« Les Maraudeurs » de Tom Cooper : le bayou, trésor d’infortune
Dans un premier roman impressionnant de maîtrise, l’auteur de nouvelles Tom Cooper nous plonge dans les méandres du bayou et des vies amputées de ses habitants. Un récit implacable mais non dénué d’humour, qui nous transporte dans une Louisiane que rien n’épargne.
[rating=4]
Jeannette, patelin paumé de Louisiane, semble maudit des dieux. Il a vu successivement déferler sur les frêles cabanes qui le composent l’ouragan Katrina et la marée noire de la plateforme “Deepwater Horizon”. Le bayou, et ses méandres inextricables, a toujours dévoré ses enfants. Mais il leur laissait au moins des crevettes en abondance, de quoi assurer une relative prospérité. Aujourd’hui, il n’est plus qu’un piège : les pêches sont de plus en plus faméliques, les émanations toxiques des nappes de pétroles omniprésentes. L’alcool, la drogue et les histoires sordides sont le lot quotidien des habitants englués dans ce marais.
Pris entre les puissances conjuguées de la nature et celles de l’argent, les protagonistes – auxquels l’auteur a su donner une épaisseur certaine – n’ont quasiment aucune prise sur leur sort peu enviable.
Le tableau aurait pu être pesant, mais le rythme introduit par l’auteur, les différentes intrigues qu’il nous fait suivre et l’humour qu’il parvient à introduire dans le récit l’allègent considérablement. Dans un style totalement différent, cette légère ironie n’est pas sans rappeler celle de Silvio D’Arzo.
Signalons enfin que la traduction rend parfaitement justice au texte et parvient à maintenir l’atmosphère voulue par l’auteur.
Tom Cooper, Les Maraudeurs, Albin Michel, Mai 2016, 416 pages, 22€.