La vie clandestine : l’action directe de l’écriture par Monica Sabolo
Après Summer, Tout cela n’a rien à voir avec moi (Prix de Flore, 2013) et Crans-Montana (Grand prix de la SGDL, 2015), Monica Sabolo pensait se lancer dans un thriller d’enquête qui n’avait rien à voir avec elle. Mais écrire sur le groupe terroriste Action Directe était en fait une opération bien plus proche qu’escomptée…
Un père disparu et oublié
Ce n’est qu’à l’âge de 27 ans que Monica Sabolo a pu poser des questions sur son vrai père, italien, mystérieux, alors que c’est son beau-père qui l’a élevée avec sa mère en Suisse. Alors qu’il y a aussi eu longtemps un non-dit traumatique avec ce beau-père l’écriture quasiment intime de la vie quotidienne d’un des couples phares du groupement terroriste Action Directe vient percuter cette absence mystérieuse du père dans une écriture à vif et troublante.
Deux couches de textes
À ce récit simple et terrible, assez en pointillés, car l’on ne sait pas tout et écrit par recoupements, s’ajoute un travail d’enquête sur à la fois sur Action Directe et sur soi. Le refoulement se fait corps ; il ne se dissipe pas comme de la brume, mais devient presque plus menaçant au fur et à mesure que l’auteure va chercher des témoins directs – qui ont toujours été là, mais qu’elle n’avait pas interrogés avant. La grande force du texte est d’évoquer beaucoup, tout en conservant de grandes zones d’ombre et de flou. Tout avance comme un thriller, mais nous n’avons jamais le vrai mot de la fin qui est peut-être caché quelque part avec la figure la plus mystérieuse du livre : la mère.
Monica Sabolo, La vie Clandestine, Gallimard, 380 p., 21 euros. Sortie le 18 août 2022.
Visuel (c) Couverture du livre