« J’ai mille ans » de Jean-Marie Quéméner : voyage au bout de la nuit
J’ai mille ans est le récit de la fuite en avant d’une mère et de sa fille, originaires du Nord-Soudan, vers une vie moins pire. Une écriture au cordeau du grand reporter Jean-Marie Quéméner.
L’auteur a vécu quatre ans au Soudan. Ce qu’il décrit n’est pas un fantasme d’écrivain en mal de sensations morbides. J’ai mille ans est un reportage retranscrit sur du papier par des mots qui font mal, qui font mouche, comme la réalité du pays. De la géopolitique en temps réel. Le sort des réfugiés, le Darfour, le rôle de la Lybie, les groupes paramilitaires…mais aussi les géologues et les ouvriers pétroliers.
Le style de Jean-Marie Quéméner est sobre, percutant, incisif, violent.
Les deux premières phrases, les deux premières lignes, du roman sont aussi les deux dernières. « Je viens de naître. J’ai mille ans ». Tout est dit.
Ainsi, « J’ai mille ans » revient à intervalles réguliers dans le roman, comme un mantra, une litanie. Amal, la jeune fille, est vieille avant d’avoir vécu. Mais, elle porte aussi en elle l’héritage de la tradition orale et la sagesse des Africains.
Amal, c’est la petite princesse dans un monde de barbares qui s’adresse sa mère et lui dit : « dessine-moi un espoir ».
J’ai mille ans est un roman fort, écrit avec des mots simples, qui n’hésite pas à déranger le lecteur pour une noble cause.
J’ai mille ans de Jean-Marie Quéméner. Éditions Récamier, 2023, 214 pages, 20€.