Essais
« Le dictionnaire amoureux de Stendhal » de Dominique Fernandez : un air de fraîcheur

« Le dictionnaire amoureux de Stendhal » de Dominique Fernandez : un air de fraîcheur

10 February 2023 | PAR Bernard Massoubre

Dans Le dictionnaire amoureux de Stendhal, essai qui se lit comme un roman, Dominique Fernandez s’attaque à un monument de la littérature française.

Les éditions PLON ont choisi Dominique Fernandez à dessein pour écrire ce dictionnaire amoureux. Car, qui est plus légitime qu’un homme de lettres, amoureux des Arts et de l’Italie pour parler de Stendhal ? Avec virtuosité, Fernandez a sorti l’écrivain d’un placard où les esprits chagrins l’avaient rangé. Il était devenu pour ceux-ci le romancier désuet d’un temps révolu.

Stendhal n’eut pas de prénom, mais il eut un destin.

Il écrivit deux chefs-d’œuvre, Le Rouge et le Noir et La chartreuse de Parme. Ces textes traitent de l’absolu de la passion qui anime ses personnages. En fait, la psychologie de Julien Sorel et Lucien Leuwen est fine parce que leur créateur est un homme de fougue, de virtù. La virtù stendhalienne (à ne pas confondre avec la vertu) est « l’énergie de faire les grandes choses que la société ne permet pas toujours, de s’exposer à sa réprobation ».

Homme du romantisme

L’était-il ? Pas selon les critères énoncés par Dominique Fernandez : « voiles gonflées, vents en rafales, orageux aquilons, souffles brûlants de la nuit… ». En fait, Stendhal était pétri de contradictions : « Par la raison, il devait haïr Lamartine, par le cœur, il ne pouvait qu’être d’accord avec lui ». Ainsi, dans Henry Brulard, il ne cache pas qu’il est à la fois romantique et antiromantique.

Homme de convictions

L’argent

Malgré la complexité de son jugement, l’écrivain opposa aux hommes « à argent » (banquiers, hommes d’affaires, …) les hommes « à imagination ». Pour lui, les Arts ne devaient pas être une activité mercantile.

L’Église

Sa haine de Dieu remonte à la mort précoce de sa mère, quand il avait sept ans. Il n’aimait ni l’abbé de la famille, ni son père dévot, ni sa tante bigote. Pourtant, Stendhal n’était pas un idéologue de l’anticléricalisme, son rejet n’était qu’un cri de vengeance contre son milieu familial. Il eut un goût très vif pour les cérémonies religieuses, la liturgie et les fastes de Saint-Pierre de Rome.

La politique

L’écrivain était artistocrate de tempérament, mais il fut aussi révolutionnaire pour s’opposer à ses parents royalistes. Et puis, à la mort de son père, il proclama son dégoût du régime démocratique.

Homme de voyages

Stendhal a aimé la France, la Russie et surtout l’Italie.

Même si l’image de Stendhal n’y est pas associée, c’est d’abord à Paris qu’il a séjourné, après avoir quitté Grenoble en diligence. Il y eut même vingt-neuf logements différents.

L’écrivain a aussi suivi Napoléon en Russie. Il est entré dans Moscou et a été pris dans l’incendie. Il fut subjugué par l’immensité de l’espace, la démesure et la beauté des palais.

Mais « l’Italie étant pour lui le degré le plus élevé qu’il soit possible d’atteindre sur le thermomètre des émotions ». Ce fut sa grande histoire d’amour. Parme, Milan, Naples, Rome…Stendhal considérait que les Italiens étaient plus sensibles à la musique et à la peinture que les autres peuples. Dans une lettre à Félix Faure, il écrivait d’ailleurs : « Depuis que j’ai vu Milan et l’Italie, tout ce que je vois me rebute par la grossièreté ».

Homme de plaisirs

La musique

Elle est avec, l’amour, la grande affaire de sa vie. Il disait qu’elle fut sans doute sa passion la plus coûteuse. Le premier livre de Stendhal (qui fut un four) était consacré à la musique.

Mais, l’écrivain n’aimait pas toutes les musiques, elles devaient être source de plaisir. Il avait dans ses préférences Mozart, Cimarosa et Rossini.

L’amour et les femmes

Il aima. Il aima les femmes (dont la belle Mathilde Dembovski), les Arts dont la musique, l’Italie…Il aima beaucoup.

Dans ses romans, Stendhal se livre sur l’amour « par des saillies, des ébauches de pensées, des analyses saugrenues, des rêveries, échappées comme par hasard de sa plume ».

Avec Le dictionnaire amoureux de Stendhal, Dominique Fernandez nous fait partager son engouement pour cet écrivain du début du dix-neuvième siècle. Le pari était difficile mais il l’a gagné.

Le dictionnaire amoureux de Stendhal de Dominique Fernandez. Éditions PLON, 2023, 820 pages, 14€.

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Duras par Thomas Lebrun à Faits d’Hiver
Bernard Massoubre

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