Essais
Erwan Seznec décrypte un grand scandale immobilier

Erwan Seznec décrypte un grand scandale immobilier

28 July 2013 | PAR Jean-Paul Fourmont

 

Erwan Seznec est journaliste économique pour « Que choisir ? ». Il est déjà l’auteur de Syndicats, grands discours et petites combines (Hachette, 2006) et a co-dirigé Une histoire secrète du patronat (La Découverte, 2006). Il vient de consacrer un ouvrage au thème de l’immobilier.

LOIS ROBIEN, SCELLIER, GIRARDIN, DEMESSINE ET MAINTENANT… DUFLOT
Dix ans de défiscalisation, dix ans d’abus et de mensonges… Et en fin de compte beaucoup de personnes ruinées et endettées. Depuis de nombreuses années, des professionnels de la défiscalisation font croire à l’investissement dans la pierre et à la promesse de substantielles économies d’impôts. Les Français achètent des biens trop chers, qu’ils n’arrivent pas à louer, et ils doivent rembourser pendant cette période les emprunts bancaires. Le bilan des lois organisant l’immobilier est, selon l’auteur, peu reluisant.

LES MÉCANISMES DU SYSTÈME IMMOBILIER
Il existe une chaîne de responsabilités qui comprend les maires qui délivrent les permis de construire, les banques qui prêtent, les promoteurs qui construisent et les notaires qui ont une obligation contractuelle de renseignement et de loyauté (aux termes notamment des articles 1134 et suivants du Code civil) et qui régularisent les ventes immobilières.

Pour Erwan Seznec, tout le monde sait que les acheteurs vont dans le mur et pourtant personne ne s’en offusque. Du fait de leur inertie et du phénomène de répétition, les responsables politiques se font les complices de tout cela. L’Etat espère que, moyennant une carotte fiscale (déduction ou réduction d’impôts), le propriétaire s’engage à louer pendant un certain temps, en respectant un barème encadré et plafonné.

LES ENJEUX DU SYSTÈME IMMOBILIER
Ce qui est en jeu, c’est l’épargne des classes moyennes qui est engloutie pour soutenir fort artificiellement le secteur du bâtiment et augmenter le parc locatif des gens modestes. Cela représente 15 milliards d’euros de préjudice et 40 millions d’euros par personne. Plus de 50 investisseurs se sont fait avoir.

L’ECHEC
En général, on essaie de vendre dans des régions éloignées du domicile de l’acheteur, souvent à l’autre bout de la France. Ainsi les acteurs de ce système ne se rendent pas toujours compte de la réalité du marché de l’immobilier. Souvent, la vente a lieu sur plan, si bien que quand l’acheteur achète rien n’est construit et ce dernier doit donc payer au fur et mesure de l’avancement des travaux. L’offre est régulièrement supérieure à la demande et les plafonds des loyers ont été surévalués. On vend souvent des produits à prix d’or, là où le foncier n’est pas cher, et souvent le promoteur ne fait pas faillite. On a construit à la demande des lobbies des promoteurs dans des zones, où il n’y avait pas de pénuries de logement.

Eclairant, l’ouvrage d’Erwan Seznec analyse certaines des tendances lourdes du marché de l’immobilier. Il arrive tout de même, et c’est normal, que tout se passe bien. Cette enquête est très documentée, innovante et concrète. Le bâtiment est un secteur important, puisque « quand le bâtiment va, tout va ».

En tant qu’élus locaux, les hommes politiques empochent des taxes. L’idée sous-jacente est apparemment de faire financer une rénovation urbaine par des contribuables dans toute la France, sans se préoccuper se savoir si les investisseurs y trouvent leur compte. Le bâtiment est plus subventionné que l’agriculture et tout ceci coûte cher au budget (déjà déficitaire) de la nation.

Cet ouvrage ouvre beaucoup de pistes de réflexion, notamment sur la crise du logement. Selon l’auteur, il n’y a pas de crise locative, sauf en région parisienne. Un bon et profitable essai pour avancer.

Erwan Seznec, « Robien, Scellier… Ruinés. Le plus grand scandale immobilier de l’après-guerre », Le Seuil, mai 2013, 191 p., 17,50 euros.

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Jean-Paul Fourmont
Jean-Paul Fourmont est avocat (DEA de droit des affaires). Il se passionne pour la culture, les livres, les gens et l'humanité. Contact : [email protected]

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