Cinema

Philibert: comédie improbable, chronique d’un échec annoncé…

07 April 2011 | PAR Gilles Herail

Sortie hier en salles, la comédie historique Philibert et ses 12 millions d’euros de budget a réuni moins de 6000 personnes pour son premier jour, laissant augurer d’une carrière en dessous des 100 000 entrées. Un gouffre financier abyssal pour Gaumont qui n’a pas su vendre un produit inqualifiable, instable, assez raté, mais furieusement hors cadre!

Sans tête d’affiche importante (Jérémie Reigner, Manu Payet ou Elodie Navarre n’attirent pas sur leur nom), Philibert a tenté de surfer sans succès sur la vague des Oss 117. On retrouve à la barre la même équipe de producteurs, Mandarin films et une même ambition de rendre hommage à un genre tout en le détournant avec humour. Après le film d’espionnage franchouillard, Philibert part donc à l’assaut du film de cape et d’épée, entre Princess Bride et Robin Hood: men in thighs. Le titre un peu racoleur (capitaine puceau) cache un film surprenant, manquant cruellement de rythme et de drôlerie, mais assumant son approche très originale.

Comme OSS, il est donc question de reprendre les codes visuels et narratifs d’un genre sans s’engouffrer dans une veine parodique grasse et des gags anachroniques faciles. Si le soin de la réalisation est plus approximatif chez Sylvain Fusée (le réalisateur), l’ambition reste la même. Le langage et la diction utilisés restent cohérents tout au long du film et les éléments clefs du conte chevaleresque sont tous présents : la princesse, le héros valeureux mais naïf, le fidèle assistant malin et le méchant cruel (incroyable Alexandre Astier). Tout ce petit monde surjoue avec conviction mais la mayonnaise ne prend pas.

A trop vouloir éviter les facilités, Philibert semble oublier de faire rire son spectateur et déroule souvent son histoire sans vouloir la détourner, jusqu’à un dernier tiers où un peu de burlesque s’installe. Il y avait pourtant de bonnes idées. Les anachronismes ne viennent en fait que de la construction psychologique des personnages et notamment leur obsession de se « reconstruire » qu’on croirait tout droit sortie d’un manuel de coaching pour les nuls. Le rythme comique de certaines scènes est parfois réussi quand les séquences sont étirées au maximum, l’humour s’installant progressivement par la répétition de certains éléments. On ne peut que louer cette volonté de s’éloigner d’un cadre d’ultra efficacité pour prendre son temps comme dans les meilleurs Monthy Python mais la précision de l’écriture ne soutient pas assez cette technique.

A l’arrivée, Philibert rappelle deux autres accidents industriels majeurs, à la frontière entre le nanar et le chef d’œuvre, penchant surtout vers la première catégorie. On pense à Sa majesté Minor, OFNI incompris de Jean Jacques Annaud en hommage à son co-scénariste de toujours où le graveleux se mélangeait à une poésie le tout dans un univers mythologique hédoniste. On se souvient aussi de Cinéman, projet improbable où Franc Dubosc revisitait les grands classiques du cinéma entre ridicule et passion. Philibert est assez raté car il ne va pas jusqu’au bout de sa logique particulière sans offrir un spectacle premier degré assez divertissant. On s’ennuie donc souvent malgré quelques évasions amusantes. On se souviendra donc d’un projet maudit pour Gaumont qui semble être bien parti pour décrocher la palme de l’échec public de l’année. On préfèrera cependant ce Philibert improbable aux Rien à déclarer, Fils à Jo, La chance de ma vie et autres marquis tout aussi décevants mais n’apportant aucun regard neuf, sans un embryon d’originalité.

Gilles Hérail

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Gilles Herail

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