[Live-Report] Festival Images de la diversité et de l’égalité ouvre avec le poétique “Aujourd’hui” d’Alain Gomis
Comme nous vous l’avions annoncé, la deuxième édition du Le Festival Images de la diversité et de l’égalité (FIDEL) a donné son coup d’envoi dans une ambiance chaleureuse, hier soir. L’affluence était à son comble et les regards et les cœurs tournés vers le Sénégal à travers la belle fable d’Alain Gomis et un documentaire de Sophie Bachelier donnant la parole aux femmes d’immigrés clandestins.
Malgré la pluie et le mot répété que la Porte Dorée est “loin” ( et pourtant pas plus de 20 min de métro de Bastille à heure d’affluence), le public a répondu présent à l’appel du FIDEL pour cette ouverture à la fois chaleureuse et grave dans le contexte étrange du Pavillon d’entrée de l’exposition coloniale de 1931 transformé depuis 5 ans en Cité Nationale de l’immigration, après avoir été vidé de ses collections d’art “premiers” quand le Musée du Quai Branly a vu le jour. Les grandes fresques arts déco représentant les indigènes de la “Plus Grande France” semblaient donc regarder d’un œil étonné l’évènement cinéphile et international.
La soirée a commencé sans chichis, avec un petit mot touchant du directeur Luc Gruson qui a rappelé le lustre d’existence de la Cité, son défaut d’inauguration et l’importance du FIDEL ancré cette année dans la thématique de l’immigration algérienne qui y fait l’objet d’une exposition. En ce cinquantenaire de l’indépendance de l’Algérie, la présidente du FIDEL, Sonia Messaouidi, a rebondi en rappelant combien le cinéma a joué un rôle important dans la possibilité de parler en France d’un sujet longtemps tabou et toujours douloureux.
Puis Alain Gomis et le deuxième rôle du film d’ouverture, Djolof Mbengue, ont dit un petit mot, bref et modeste : le premier s’excusant déjà un peu en avance auprès de ceux qui auraient du mal à “entrer” dans le film et louant l’acteur à ses côtés et le deuxième affirmant que son réalisateur a déjà tout dit.
Sélectionné à Berlin en 2012, porté par le chanteur Saül Williams que l’on découvre acteur extrêmement charismatique, “Aujourdhui” est une fable poétique et colorée qui raconte la dernière journée de Satché, jeune papa, fils, frère et ami, désigné pour être sacrifié à la tombée de la nuit pour le bien de sa communauté. Gomis filme des scènes complétement décalées, qui vont de la procession triomphale dans les rues de Dakar, à la rencontre avec la maîtresse dans une galerie d’art suspendue (Aïssa Maïga) en passant par la rencontre avec le laveur de corps ou des officiels dans une mairie vidée de sens et en finissant par l’intimité impossible dans le foyer pour un Satché qui a l’impression de n’avoir rien eu le temps d’accomplir. C’est sur le visage lisse comme un masque d’un Saül Williams rendu muet que passent tous les stades de l’angoisse, de détachement, de la colère, de la rébellion, de la colère et de l’envie de voler du sens au compte à rebours. Un film lent, majestueux, qui se mérite (il faut en effet “rentrer dedans”) avec certains plans d’une beauté à couper le souffle.
Aujourd’hui, d’Alain Gomis, avec Saul Williams, Djolof Mbengue, Anisia Uzeyman, Aïssa Maïga, Sénégal/France, 1h28, sortie le 9 janvier 2013.
Après une séance d’applaudissements émus d’une salle qui a continué de se remplir jusqu’à ses limites tout au long de la projection, le FIDEL et TV5 monde recevait tout le public pour un buffet éthiopien absolument délicieux. Le jus de gingembre et la convivialité de cette réception ont permis aux fidèles du FIDEL d’échanger librement pendant un peu plus d’une heure avant de réembarquer -cette fois-ci en noir et blanc – pour le Sénégal.
Sophie Bechelier est venue présenter son documentaire sur les femmes d’immigrés clandestins, “Mbëkk Mi, le souffle de l’océan”, expliquant qu’en Wolof “Mbëkk Mi”, c’est se heurter à quelque chose d’infranchissable comme les immigrés clandestins quand il partent sur l’océan avec le double risque de la mort ou de la prison en Europe. Filmant de face, en gros plan, et en noir et blanc des femmes que leurs maris ont quitté pour aller travailler sans papiers en Europe, la réalisatrice leur donne longuement la parole, sans métadiscours superflu. Un film qui a ému peut-être encore plus directement le public que la fiction qui le précédait et a ouvert sur un temps d’échange, cette fois-ci coordonné et très intense.
Le FIDEL continue autour de 3 thématiques l’Algérie contemporaine, les femmes réalisatrices du monde arabe et la mixité, ces 3 prochains jours.
VENDREDI 19 OCTOBRE – ALGÉRIE CONTEMPORAINE
• 14h00 – Projection-débat autour du film de Mehdi Lallaoui, La Moudjahida et le parachutiste (documentaire inédit, France, 2012, 42 min)
• 15h30 – Projections-débat animés par Charles Tesson, avec les réalisateurs des courts métrages projetés : And the road goes on (Sur la route) de Zineb Sedira (Balade poétique, Algérie, 2005, 8 min) ; Demain, Alger ? d’Amin Sidi-Boumediène (Fiction, Algérie 2012, 20 min) ; La Parade de Taos de Nazim Djemaï (Fiction, Algérie, 2010, N&B, 19 min) ; Brûleurs de Farid Bentoumi (Fiction, Algérie, 2011, 15 min) ; Comment recadrer un hors la loi en tirant sur un fil de Lamine Ammar-Khodja (Fiction, 2011, Algérie, 21 min)
• 18h15 – Des vacances malgré tout de Malek Bensmail (Documentaire, Algérie, 1995, 68 min)
• 21h00 – Afric Hotel de Nabil Djedouani, Hassen Ferhani (Documentaire, France, Algérie, 2010, 59 min)
SAMEDI 20 OCTOBRE – FEMMES CINÉASTES DU MONDE ARABE
• 14h00 – Clichés de Nadine Naous (Fiction, Liban, 2009, 7min) ; On ne mourra pas d’Amal Kateb (Fiction, Algérie, 2010, 20min) ; Mollement un samedi matin de Sofia Djama (Fiction, Algérie, 2011, 28 min) ;
• 15h30 – Yasmine et la Révolution de Karin Albou (Fiction, France, Tunisie, 2011, 8 min) ;
Interdits d’Amal Ramsis (Documentaire, Egypte, 2011, 62 min)
• 17h30 à 19h30 – Table ronde « Etre femme, réalisatrice et arabe », modérée par Florence Colombani en présence de Samia Messaoudi (Présidente du FIDEL), Wassyla Tamzali (avocate, écrivaine et militante féministe algérienne) et des réalisatrices Karin Albou, Amal Ramsis, Nadine Naous, Jihane Chouaib, Dalila Ennadre, Sofia Djama et, sous réserve, Amal Kateb.
• 20h30 – Avant-première Pays Rêvé de Jihane Chouaib (Essai poétique, Liban, 85 min, 2012)
DIMANCHE 21 OCTOBRE : LA MIXITÉ, OU L’IDENTITÉ MISE EN QUESTION
• 14h00 – L’Identité nationale de Valérie Osouf (Documentaire inédit, France 2012, 1h35)
• 15h45 à 17h15 – Table ronde « Réflexions sur l’identité nationale animée par la revue Hommes & Migrations en présence des cinéastes Valérie Osouf et Nicolas Ferran.
• 17h30 – Les amoureux au ban public de Nicolas Ferran (Documentaire, France 2011, 1h10)
• 19h00 Clôture : Avant-première Rengaine de Rachid Djaïdani, en présence de l’équipe du film (Fiction, France 2011, 1h15)
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