Cinema
Les Bien-Aimés : Mourir d’amour, tout simplement

Les Bien-Aimés : Mourir d’amour, tout simplement

30 November 2011 | PAR Olivia Leboyer

Au cinéma, le Sida se trouve au cœur de quelques films marquants : les plus réussis sont sans doute Les Nuits fauves (Cyril Collard, 1992) et Les Témoins (André Téchiné, 2007). Mais aussi une comédie musicale surprenante, avec un jeune premier séropositif, Jeanne et le garçon formidable (Olivier Ducastel, 1997).

Dans Les Bien-Aimés (superbe film de Christophe Honoré, 2011), le sida ne constitue pas le cœur du récit : la maladie est là, mais au même titre que d’autres éléments. Rien d’explicatif, de surligné dans ce beau film limpide, dont le fil rouge est l’amour, le sentiment.

On pourrait détourner le titre du roman de Garcia Marquez L’amour au temps du choléra : ici, c’est peut-être L’amour au temps du sida, mais le sujet reste l’amour, pas le sida. Les temps ont changé, l’insouciance a moins de place que dans les années 1960, mais si Véra (Chiara Mastroianni) est si triste, c’est surtout parce que Henderson (Paul Schneider) ne l’aime pas.

Dans une scène très belle et surprenante, Véra demande à Henderson, en chantant, de s’essayer à dire quelques mots en français : l’Américain, sur le mode du badinage, lance alors simplement, au détour d’une rime en anglais « J’ai le sida ». Petit effet de souffle, vite dissipé. Car la maladie d’Henderson n’altère en rien la maladie de Véra, l’amour, qui se révèle plus forte et plus corrosive. Elle demeure l’amoureuse inconsolable, déraisonnable, que le risque n’arrête pas.

Et, dans la scène apocalyptique du 11 septembre 2001, Véra méprise deux catastrophes collectives d’un coup (le 11 septembre et le sida), occupée de son seul tourment intime, qu’elle chante avec une gravité légère, en apesanteur :

Jeunesse passe
Et je m’y fais
L’été, hélas
A mal tourné (Alex Beaupain)

Errant seule dans la ville étrangère, Véra choisit de mourir d’aimer, comme aux temps anciens, comme dans les vieilles légendes.

 

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Olivia Leboyer
Docteure en sciences-politiques, titulaire d’un DEA de littérature à la Sorbonne  et enseignante à sciences-po Paris, Olivia écrit principalement sur le cinéma et sur la gastronomie. Elle est l'auteure de "Élite et libéralisme", paru en 2012 chez CNRS éditions.

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