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Inédit : Je veux seulement que vous m’aimiez de Rainer Werner Fassbinder, en salles le 20 avril

Inédit : Je veux seulement que vous m’aimiez de Rainer Werner Fassbinder, en salles le 20 avril

13 March 2011 | PAR Yaël Hirsch

Après avoir dernièrement réédité en Dvd, “Le monde sur le fil” (1973), Carlotta continue son travail avec la Fondation Rainer Werner Fassbinder et diffuse sur grand écran un téléfilm social réalisé par Fassbinder pour la Westdeuscher Rundfunk en 1976, “Je veux seulement que vous m’aimiez”. Avec le “Mariage de Maria Braun” (1980), c’est certainement l’un des films les plus fins du réalisateur dans sa dénonciation de l’oubli d’humanité que cache le Witschaftswunder allemand. Sortie le 20 avril 2011.

Peter (émouvant Vitus Zeplichal) est un jeune ouvrier en bâtiment, vivant dans la campagne bavaroise et construisant à ses parents une superbe maison, lors de son temps libre. Affublée d’une mère froide et désagréable (Erni Mangold) auquel il offre sans cesse des fleurs, et d’un père affairiste absent (Alexander Allerson) qui remplace l’affection par le don de quelques Marks, Peter fait tout pour attirer leurs bonnes grâces. Quand il épouse la douce Erika, (Elke Aberle) il sent bien qu’ils ne sont pas les bienvenus dans la nouvelle maison de ses parents. Aussi décide-t-il de tenter sa chance à Munich et d’emmener sa femme pour y vivre. Mais malgré ses grandes compétences d’ouvrier, il est peu payé et la vie dans la grande ville est d’autant plus chère que l’achat à crédit lui donne envie d’offrir à sa femme tout ce que les autres peuvent se permettre. Par ailleurs, cette dernière tombe enceinte et ne peut travailler. Peter multiplie les heures supplémentaire, et s’épuise pour s’assurer par des dépenses somptuaires l’affection de sa femme…

Tiré d’un fait réel, et inspiré par un essai de psychiatrie, “Je veux seulement que vous m’aimiez” analyse avec précision la part d’ombre du miracle économique allemand. Dans l’économie florissante de la RFA, les ouvriers restent néanmoins des ouvriers et ne peuvent se permettre les dépenses d’électroménager et de vacances que réalisent les classes moyennes. Par-delà le constat social, le film est l’autopsie d’un manque criant d’amour. Trop pris par leurs soucis de fortune, les parents du personnage principal lui laissent imaginer que l’argent est la seule manière d’obtenir une tendresse durable. Fassbinder filme ce drame social et conjugal à la Douglas Sirk comme une pièce de théâtre. Si la structure use sans abuser du flash back, et si certains plans sont inévitablement des séquences tournant autour des personnage, la majeure partie de l’intrigue se ressert sur l’appartement du couple, l’Isar, et le bar où l’histoire prend fin. La narration se résume peu à peu à la course au remboursement des dettes, et la caméra se centre sur le personnage principal et sur son sentiment qui tend le film pour le transmuer en tragédie classique.  Celle-ci est encore renforcée par les ellipses, soulignées par des écrans intertitres tout droit sortis de l’univers du muet. Aucun des acteurs fétiches du cinéma de Fassbinder n’apparaît dans ce film (l’excellent Vitus Zeplichal a souvent travaillé avec le réalisateur, mais surtout en tant que comédien pour son Theater am Turm de Francfort), même si son compositeur Peer Raben signe bien la musique de “Je veux seulement que vous m’aimiez”.

Un superbe Fassbinder, concentré sur le mélange amour/argent, et plus tendre que grinçant, à découvrir à partir du 20 avril prochain en salles.

“Je veux seulement que vous m’aimiez”, de Rainer Werner Fassbinder, avec Vitus Zeplichal, Elke Aberle, Erni Mangold et Alexander Allerson, RFA, 110 min, sortie le 20 avril 2011.

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Yaël Hirsch
Co-responsable de la rédaction, Yaël est journaliste (carte de presse n° 116976), docteure en sciences-politiques, chargée de cours à Sciences-Po Paris dont elle est diplômée et titulaire d’un DEA en littérature comparée à la Sorbonne. Elle écrit dans toutes les rubriques, avec un fort accent sur les livres et les expositions. Contact : [email protected]

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