Cinema
Dernier jour de Compétition 2018 pour le Festival Entrevues

Dernier jour de Compétition 2018 pour le Festival Entrevues

25 November 2018 | PAR Yaël Hirsch

« Nous on a été voir Bunuel on s’est éclaté » entend-on dans le public en attendant la première projection de la journée à 11:15… Note d’ouverture tout à faire représentative de cette belle journée de Cinéma.

Dans le cycle des « Premiers films… » la vie restaurée de Plus qu’hier moins que demain de Laurent Achard (1998, Grand Prix à Belfort). Film poétique et estival qui semble se concentrer sur les premières amours d’une jeune-femme, le film se transforme de sous-bois en rivière en drame familial terrible où le passé empoisonne tout; en jeune premier de ce premier long assez hypnotisant, l’acteur Pascal Cervo a du être une puissante révélation.

Le deuxième film de la journée nous a permis d’entrer de plain pied dans la transversale « Second rôle » avec Règlements de comptes (The big heat) de Fritz Lang (1953) où Gloria Grahame dans la peau d’une poule à gangsters devient le centre de toutes nos attentions. De facture très classique, cet « avant-pénultième » film de Lang dans sa période américaine commence avec ombres et fracas dans la plus grande tradition expressionniste et par un suicide. C’est un flic, la veuve n’a pas l’air si éplorée que cela et un autre flic sent que le magnat de la pègre local est l’ombre derrière tout cela. On touche à la famille du héros et là tout s’intensifie dans cette intrigue classique et efficace. Et il est vrai qu’avec un second rôle qui ne cesse de croître, minaudant au point de faire éclater le cliché comme la grenouille qui se gonfle trop, Grahame est juste irrésistible : à la fois une figure de distanciation, de séduction, d’humour et aussi d’empathie avec un final vraiment touchant. Voir ce classique méconnu en copie non restaurée, tout craquant, nous a encore plus réjouis!

Dans l’après-midi, nous nous sommes attelés à suivre un trio de documentaires importants.

Yolande Zauberman est venue présenter avec émotion le documentaire qu’elle a filmé en 1987 et en 16mm en Afrique du Sud: suivant des « Classified people » échappant aux classification de l’apartheid, elle livre un témoignage puissant. Un jeune photographe sert de Cicérone dans une société infiniment ségréguée mais ou quelques inclassables dont un couple mixte de deux amoureux de 91 et 71 ans et un journaliste classé « De couleur » quand ses frères  apparaissent comme « Européens ». Images un peu troubles, plans gris tendres, le film est plein de grain et d’émotion et montre comment l’apartheid sépare aussi les familles.

A 16h l’on pouvait voir My name is Kazan, de André S Labarthe, mis à l’honneur cette année à Belfort, film retrouvé et monté après sa mort par sa femme. Alors que Labarthe est le créateur de la série “Cinéastes de notre temps” et a été très présent à Belfort, aux côtés de Janine Bazin, cette année, le public peut lui envoyer des cartes postales uniques de sa main depuis le Pathé de Belfort ! Nous n’avons pas vu le film sur Kazan mais avons suivi le court métrage I Claudius, seul film de montage de André Labarthe à partir des rushs du film de Joseph von Sternberg d’après le texte de Robert Graves et qu’il n’a pas pu terminer. Avec la voix de Jeanne Moreau jeune et claire pour raconter, des chapitres écrits en toutes lettres et les témoignages du réalisateur allemand, le film revient en noir et blanc sur cette aventure de 1936 qui commençait sous les meilleurs auspices avec Charles Laughton, qui a incarné Henri VIII à l’écran,, dans le rôle titre. Si la mort de Merle Oberon met fin à un tournage pharaonique, l’on peut déjà voir grâce à Labarthe une des scènes principales du film où tout le génie du réalisateur de L’Ange bleu brille : une scène d’opprobre populaire comme Sternberg en avait le secret.

Troisième et dernier documentaire de la journée pour Toute La Culture Born in Flames, de Lizzie Borden nous plonge dans un mouvement féministe activiste et dissident du socialisme dans le NYC des années 1970, avec des questionnements, des demandes (égalité de salaire, liberté de son corps, parité, course pour avoir de la place dans les media, question de l’intersectionnalisme )mais aussi l’irruption de la violence à travers l’armée, un meurtre et la prison. Un film qui semble important pour prendre du recul sur notre ère secouée entre autres par le mouvement #metoo.

Alors que nous sommes en route pour suivre le Palmarès (lire notre article) et voir le film de clôture qui a déjà brillé à la Semaine de la Critique, Diamantino (lire notre article).

Rendez-vous demain pour une dernière journée de Festival avec un beau rattrapage des films delà compétition.
Visuels : YH

Mozart VS Stadler, la Grande Partie au Centre de Musique de Chambre de Paris
Palmarès de la 33e édition du Festival Entrevues : « Classical Period » de Ted Fendt Grand Prix
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Yaël Hirsch
Co-responsable de la rédaction, Yaël est journaliste (carte de presse n° 116976), docteure en sciences-politiques, chargée de cours à Sciences-Po Paris dont elle est diplômée et titulaire d’un DEA en littérature comparée à la Sorbonne. Elle écrit dans toutes les rubriques, avec un fort accent sur les livres et les expositions. Contact : [email protected]

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