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Cinéma du réel : Grand Prix à Dry ground burning au terme de l’édition 2022

Cinéma du réel : Grand Prix à Dry ground burning au terme de l’édition 2022

21 March 2022 | PAR Geoffrey Nabavian

La quarante-quatrième édition du Festival prenant le pouls de la réalité s’est achevée le 20 mars, en couronnant notamment la description du Brésil d’un duo de cinéastes engagés, entre autres travaux s’approchant au plus près du réel chacun à leur manière particulière.

Cette année, le Grand Prix Cinéma du réel est venu distinguer un film aux ambitions très vastes, désirant offrir un aperçu de certaines régions du Brésil actuellement : Dry Ground Burning, de Joana Pimenta et Adirley Queiros Andrade. Prenant appui sur des faits réels pour dresser son tableau, et donnant à voir à rythme régulier au sein de son récit des scènes documentaires captant un contexte assez marquant, cette réalisation décrit le parcours de plusieurs femmes ayant travaillé ensemble à recueillir du pétrole dans les sols de leur région de façon clandestine, et tout ce qui a suivi pour elles, des tentatives de réussite à la prison et aux pactes avec les délinquants. Un Prix doté par la Bibliothèque publique d’information – à hauteur de 5 000 euros – et la Procirep (3 000 euros).

Nous, étudiants !, Sergueï Loznitsa, et autres actions pour le changement primées

On remarque cette année que plusieurs longs-métrages décrivant les parcours de personnes s’activant, parfois très dangereusement, pour le changement, se sont vus de la même manière distingués. Une idée de changement qu’on a pu sentir assez présente au sein de la Compétition pour le Grand Prix de cette année, notamment dans The United States of America, de James Benning, évocation via des fragments – un peu trop figés hélas – de tous les États unis au sein du continent Nord-Américain aujourd’hui. À l’heure des prix, une Mention spéciale du Jury Long-Métrage est venue saluer Nous, étudiants ! de Rafiki Fariala, qui s’attache aux vies d’étudiants en République Centrafricaine, et repart aussi au final avec le Prix des bibliothèques, doté par la Direction générale des médias et des industries culturelles du Ministère de la Culture, et s’accompagnant d’une proposition d’achat de droits par la Bibliothèque publique, permettant au film d’intégrer le Catalogue national – Les Yeux Doc.

S’est distingué également Mr. Landsbergis, très long documentaire signé par l’immense réalisateur ukrainien Sergueï Loznitsa, consacré au leader du Mouvement indépendantiste lituanien, qui conduisit son pays à faire sécession de l’URSS en 1990 : il remporte le Prix international de la Scam – doté à hauteur de 5 000 euros – et une Mention spéciale de la part du Prix des Bibliothèques.

Les Voix croisées de Raphaël Grisey et Bouba Touré, consacré à Somankidi Coura, coopérative agricole fondée au Mali en 1977, se voit lui couronné par le Prix de l’Institut français – Louis Marcorelles, doté par l’Institut français à hauteur de 5 000 euros, mais également par le Prix des Jeunes – Ciné+, représentant un achat du film par la chaîne pour un montant de 15 000 euros et sa diffusion sur l’antenne.

Quant au Prix Loridan-Ivens/Cnap, il va au final à Relaxe d’Audrey Ginestet, consacré à Manon, en procès car accusée d’avoir participé à des sabotages de lignes de TGV : le film se voit décerner 2 500 euros par Capi Films et 4 000 euros par le Cnap. Et le Prix Clarens du Documentaire Humaniste couronne Children of the mist d’Ha Le Diem, qui se penche sur le rite controversé du mariage à un très jeune âge au sein de la minorité ethnique des Hmong, au Vietnam, en se concentrant sur l’itinéraire d’une enfant de douze ans face à lui : 5 000 euros offerts par la Fondation Clarens pour l’Humanisme viennent saluer ce travail.

Les courts et moyens-métrages récompensés : des rêves au périls réalistes

Côté courts, certains cinéastes se sont vus reconnus pour avoir convoqués le rêve, les bribes de mémoires ou l’imagination afin de mieux s’approcher du réel. Des thèmes qui paraissent de même avoir habité la Compétition cette année, et qu’on a pu par exemple croiser dans La Lumière des rêves, de Marie-Pierre Brêtas, évocation simple dans la lueur du crépuscule de la figure de Michel Jouvet, qui se consacrait à l’étude les songes.  Cette année, le Prix du Court-Métrage a salué Urban Solutions, signé par Arne Hector, Luciana Mazeto, Minze Tummescheit et Vinicius Lopes : trente minutes encore centrées sur le Brésil, et les fantômes de son passé colonial, qui remportent 2 500 euros offerts par la Bibliothèque Publique d’Information. Une Mention spéciale du Jury Court-métrage et Premier film est allée de surcroît à Hors-titre de Wiame Haddad, qui se centre sur le hors-champ d’une manifestation de 1961 à Paris pour l’indépendance de l’Algérie.

Doté par la passionnante plateforme Tënk à hauteur de 500 euros et d’un achat de droits de diffusion Svod en son sein, le Prix Tënk s’en est allé couronner Domy+Ailucha : Ket stuff ! : un court consacré au Mozambique en 2020, et signé par Ico Costa.

Quant au Prix du patrimoine culturel immatériel, il va à Langue des oiseaux d’Erik Bullot : ce court consacré à des tentatives de communication poussées entre humain et volatile remporte 2 500 euros de la part de la Direction générale des patrimoines et de l’architecture du Ministère de la Culture.

D’autres ont su questionner en s’attachant à un réel pur et dur. Début d’hiver de Louis Barthélémy Rousseau, consacré à ceux qui se trouvaient enfermés dehors à l’orée des jours froids en l’année 2020, gagne le Prix du public Première Fenêtre, décerné via des votes sur Mediapart et représentant un contrat du CNC avec l’auteur (à hauteur de 2 000 euros) équivalent à un pré-achat de droits pour le catalogue CNC-Images de la culture. Le Prix des Détenus va au Croissant de feu de Rayane Mcirdi, consacré aux changements urbains, via des destructions d’immeubles, dans le quartier des Mourinoux à Asnières : un Prix décerné par un jury de détenus, représentant 500 euros offerts par la Fondation Monique Desfosse.

Il ne restait qu’à entourer, cette année encore une fois, les regards documentaires émergents. Le Studio Orlando a par ailleurs choisi son Coup de coeur 2022 pour un accompagnement en post-production : Rio Rojo de Guillermo Quintero, qui s’attache à des vies menacées au bord d’une rivière de l’Amazonie Colombienne. Et côté autres films en train d’être conçus, les courts A nos fantômes de Juliette Piccolot et Les Traces de nos luttes de Juliette Bourgoin sont au final lauréats du Prix Route One/Doc, représentant des contrats du CNC avec les autrices à hauteur de 2 000 euros équivalent à des pré-achats de droits pour le catalogue CNC-Images de la Culture.

Le Jeudi 24 mars, la Scam (Paris 8e) offre à revoir ou à découvrir Dry Ground Burning et Mr. Landsbergis. Et du 28 mars au 30 juin, le programme La Circulation de Cinéma du réel propose partout en France cinq films du Festival 2022, en partenariat avec Images en Bibliothèque et la Cinémathèque du Documentaire.

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Visuel : © Dry Ground Burning © Terratreme FIlmes / Cinco Da Norte

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Geoffrey Nabavian
Parallèlement à ses études littéraires : prépa Lettres (hypokhâgne et khâgne) / Master 2 de Littératures françaises à Paris IV-Sorbonne, avec Mention Bien, Geoffrey Nabavian a suivi des formations dans la culture et l’art. Quatre ans de formation de comédien (Conservatoires, Cours Florent, stages avec Célie Pauthe, François Verret, Stanislas Nordey, Sandrine Lanno) ; stage avec Geneviève Dichamp et le Théâtre A. Dumas de Saint-Germain (rédacteur, aide programmation et relations extérieures) ; stage avec la compagnie théâtrale Ultima Chamada (Paris) : assistant mise en scène (Pour un oui ou pour un non, création 2013), chargé de communication et de production internationale. Il a rédigé deux mémoires, l'un sur la violence des spectacles à succès lors des Festivals d'Avignon 2010 à 2012, l'autre sur les adaptations anti-cinématographiques de textes littéraires français tournées par Danièle Huillet et Jean-Marie Straub. Il écrit désormais comme journaliste sur le théâtre contemporain et le cinéma, avec un goût pour faire découvrir des artistes moins connus du grand public. A ce titre, il couvre les festivals de Cannes, d'Avignon, et aussi l'Etrange Festival, les Francophonies en Limousin, l'Arras Film Festival. CONTACT : [email protected] / https://twitter.com/geoffreynabavia

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