Chronique de Cannes : France vs Amérique

Un seul film américain en compétition, cette année, au Festival de Cannes. Depuis les Frères Lumières à la fin du XIXe siècle, le cinéma français dominait son confrère américain. Le Plan Marshall et l’intrusion de pellicules états-uniennes tua cette suprématie. Le cinéma français n’eut jamais pu rivaliser ensuite, avec le cinéma hollywoodien. Les acteurs n’étaient point meilleurs Outre-Atlantique, mais les moyens manquaient, les techniques n’évoluaient pas si rapidement, les héritiers d’Edison perpétrait un empire industriel. La situation s’est inversée : cette année, quatre films français aspirent à remporter la Palme d’Or.

Pire, “Inglorious Basterds”, du trublion Tarantino, seule exportation de l’Oncle Sam sur la Croisette jouit d’un casting peu américain. On dénombre pas moins d’une demie-douzaine d’acteurs français, parmi lesquels Mélanie Laurent (actrice émouvante de “Je vais bien, ne t’en fais pas”), Anne-Sophie Franck, Denis Ménochet ou Julie Dreyfus. Une véritable invasion. Le sanglant western de guerre sera en lice contre “Herbes Folles”, dernier film d’Alain Resnais, réalisateur de “Mon Oncle d’Amérique.” Un joli pied-de-nez historique. Les deux frères ennemis du cinéma se seront toujours livrés une guerre froide : entre deux univers opposés, deux conceptions différentes du jeu des acteurs, deux visions fécondes de la réalisation.

Haut lieu de luttes, de ventes et de séduction, le Marché du Film de Cannes reste le plus fréquenté au monde : les 10.000 producteurs et distributeurs viennent présenter des millions d’œuvres. “La répartition géographique est à peu près la même. On a une baisse de 5 % de la participation des Etats-Unis,” précisait timidement le directeur du Marché, Jérôme Paillard. Un hasard ?

Jérémy Collado