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Césars 2014: les héros très discrets

Césars 2014: les héros très discrets

31 January 2014 | PAR Geoffrey Nabavian

Non, pas de tempête nommée Jacques (Audiard) pour tout emporter sur son passage cette année aux Césars. A la place, quoi ? Une explosion, qui s’appelle Guillaume (Gallienne) ; une épidémie de « folie insidieuse » : Desplechin, Farhadi, Polanski et l’enfin révélé Alain Guiraudie ; des histoires d’amour « fou » : Kechiche et Dupontel. Mais plus profondément, qui met-elle en lumière, cette sélection 2014 ? Préparez-vous pour un voyage en souterrain.

On se réjouit de retrouver, dans les nominations aux Césars 2014, Jimmy P. –pour la présence de Desplechin, le film, lui, étant un peu exsangue- Le Passé, La Vénus à la fourrure, L’Inconnu du lac et les deux premiers chapitres de La Vie d’Adèle. Vive les atmosphères oppressantes, les plans très rapprochés des visages, et la psychologie à outrance. C’est que ces films-là sont signés par des gens qui savent, grâce à l’outil dont ils usent, nous rendre leurs sujets, guère évidents sur le papier, intenses et proches.

N’oublions pas non plus l’humour, qui fait du bien, celui dont Dany Boon regrettait tant la présence en 2009. Mais cette année, c’est l’humour qui autorise des performances d’acteurs qu’on trouve mis à l’honneur : d’une part, Albert Dupontel et Sandrine Kiberlain, d’autre part, Guillaume Gallienne et…sa mère. En bref, de la qualité, de celle qui transporte et qui émeut. Un fond, une forme. C’est là qu’est la beauté, dans le cinéma.

Mais mais… Si ces films occupent une grande place au sein des nominations, n’oublions pas des noms plus discrets –pour combien de temps encore ?- qui ont su se tailler une part dans ce grand gâteau. Qui sont donc nos « héros en sous-sol » cette année ?

La Fille du 14 juillet

Vincent Macaigne

Il est nommé dans la catégorie « Meilleur jeune espoir masculin » pour La Fille du 14 juillet. Il eût pu l’être également pour 2 automnes, 3 hivers ou pour Tonnerre, deux autres films de cette saison où il tient le haut de l’affiche. Cerise sur le gâteau, il incarne aussi le premier rôle des Lézards, un court-métrage de Vincent Mariette nominé cette année ! On le connaissait barbu à la voix cassée, metteur en scène jusqu’au-boutiste, le voici, à 35 ans, égérie d’une nouvelle génération de réalisateurs français.

Katell Quillévéré

Cinq nominations pour Suzanne, le film de la cinéaste bretonne, très beau récit de vie porté par de superbes mais absolument superbes acteurs…tous nominés ! François Damiens sans sa barbe, notamment, dont on espère qu’il saura quand même nous faire rire aussi bien que l’an dernier lors de la cérémonie. Le talent, comique comme tragique, n’empêche pas l’humour, très noir et très belge.

Arnaud des Pallières

Son adaptation de Michael Kohlhaas d’Heinrich von Kleist, interprétée par Mads Mikkelsen est citée six fois. Bien que le cinéma de cet ancien documentariste se réfère encore trop au domaine des idées, bien que ce troisième film de fiction manque de chair, et demeure ennuyeux par moments, il n’en reste pas moins que les idées, chez Arnaud des Pallières, sont intéressantes. Cinéma de thématique, cinéma en mouvement, en action, il ne lui manque que peu de choses pour arriver à toucher. A suivre.

Philippe Le Guay

Trois nominations, ce n’est pas beaucoup. Mais franchement, en janvier 2013, la plupart des comédies françaises qui sortaient ont été des fiascos. Une rescapée : Alceste à bicyclette. Ah ce public, quel bon goût de préférer Molière à d’autres bêtises ! Honorons-le. Le réalisateur de ce film avec Fabrice Luchini et Lambert Wilson  n’est pas très connu, mais il nous a déjà fait bien du plaisir ; Souvenez-vous : Les Femmes du 6ème étage, Le Coût de la vie, L’Année Juliette

Dead man talking

Patrick Ridremont

Qui a vu son Dead man talking, sorti en France en mars 2013 ? L’exécution publique, filmée et diffusée sur un écran, d’un prisonnier, qui fait à l’écran sa dernière déclaration. Il parle, parle, parle. Impossible de l’exécuter tant qu’il parle. Un scénario plus qu’intriguant mais…pas de public. Ridremont, belge qui réalise et interprète ce film, voit un honneur lui être rendu avec cette nomination au Meilleur film étranger. Une redécouverte s’impose-t-elle ?

Paolo Sorrentino

Encore et toujours ! On veut que La Grande Bellezza, son magnifique film reparti bredouille de Cannes, obtienne un prix. Si ce n’est pas aux Oscars, ce sera aux Césars. On tient !

Fanny Ardant

Blonde pour les besoins du film de Marion Vernoux, Les Beaux Jours. Cela mérite d’être salué ! On ne l’a pas beaucoup vue comme ça.  Même si le César de la meilleure actrice sera difficile à obtenir…

Stimulant, tout ça !
Que des héros, des gentils… ?
Non ! un « bad guy » !

Jean-Pierre Jeunet

L’Extravagant Voyage du jeune et prodigieux T.S. Spivet n’a que trois nominations techniques. Jeunet se fâchera-t-il ? En tout cas, il est loin, le temps solaire et radieux où Amélie Poulain et le Long Dimanche nous ravissaient, et raflaient la mise. Gardons-les en tête. La pyramide du Louvre étant remplie de salles d’expo, de boutiques et de vie, et pas totalement creuse…

Quoi qu’il en soit, rendez-vous le 28 février avec… Cécile de France !!! En maîtresse de cérémonie. Souvenez-vous d’elle à Cannes en 2005… Ca va être délicieux !

Visuels: © affiche de La Fille du 14 juillet

© affiche de Dead man talking

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Geoffrey Nabavian
Parallèlement à ses études littéraires : prépa Lettres (hypokhâgne et khâgne) / Master 2 de Littératures françaises à Paris IV-Sorbonne, avec Mention Bien, Geoffrey Nabavian a suivi des formations dans la culture et l’art. Quatre ans de formation de comédien (Conservatoires, Cours Florent, stages avec Célie Pauthe, François Verret, Stanislas Nordey, Sandrine Lanno) ; stage avec Geneviève Dichamp et le Théâtre A. Dumas de Saint-Germain (rédacteur, aide programmation et relations extérieures) ; stage avec la compagnie théâtrale Ultima Chamada (Paris) : assistant mise en scène (Pour un oui ou pour un non, création 2013), chargé de communication et de production internationale. Il a rédigé deux mémoires, l'un sur la violence des spectacles à succès lors des Festivals d'Avignon 2010 à 2012, l'autre sur les adaptations anti-cinématographiques de textes littéraires français tournées par Danièle Huillet et Jean-Marie Straub. Il écrit désormais comme journaliste sur le théâtre contemporain et le cinéma, avec un goût pour faire découvrir des artistes moins connus du grand public. A ce titre, il couvre les festivals de Cannes, d'Avignon, et aussi l'Etrange Festival, les Francophonies en Limousin, l'Arras Film Festival. CONTACT : [email protected] / https://twitter.com/geoffreynabavia

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