[BERLINALE] “Öndög” de Wang Quan’an : L’amour est dans la steppe
Le réalisateur mongol Wang Quan’an propose avec Öndög un film beau et atypique. Sa réussite réside entre l’habile fusion de ses images et de son rythme, au profit d’une atmosphère saisissante.
Un corps de femme assassinée est retrouvé dans la steppe mongole par une vadrouille de police. Celle-ci confie à son plus jeune membre le soin de préserver le cadavre des loups errants pendant que le reste de l’escouade retourne chercher des renforts et enquêter en ville à plus de 100 kilomètres de là. Une bergère isolée, vivant dans les environs et se déplaçant en chameau, est chargée de tenir main forte au jeune policier. Au cours de la seconde nuit de veille, ils se réchaufferont ensemble du froid glacial par un feu, de l’alcool et la chaleur de leur corps. Le lendemain matin, la mission terminée les deux jeunes gens se séparent. Ce qui n’aurait pu être qu’une aventure anecdotique prend par la force des choses une importance considérable dans leur biographie respective : tandis que le jeune garçon, ayant goûté ce soir-là pour la première aux plaisirs propres à l’âge adulte, rentre dans sa bourgade et s’affirme comme un homme capable de séduire, la jeune bergère découvrira bientôt qu’elle est enceinte et devra en conséquence faire un choix de vie.
Le scénario qui, à sa lecture et à raison, peut sembler assez commun, est transcendé par le cadre, lui, tout à fait hors du commun de la steppe mongole : sa monotonie et son ciel surdimensionné aux couleurs folles n’ont esthétiquement pas d’équivalent et Wang Quan’an capture celles-ci avec virtuosité. Aussi le film alterne successivement entre atmosphères qui se rapprochent du documentaire, de la peinture vivante ou encore du théâtre d’ombres. Les longs plans fixes ainsi que les travellings horizontaux, épousant la ligne d’horizon entre steppe et ciel, sont d’une beauté inouie et méritent d’être mentionnés en tant que tel. La steppe offre une panoplie de lumières et de sons qui, mis au service et enrichis par de très belles idées de mise en scène ainsi que par un traitement de la temporalité hyperréaliste, sublime un grand nombre de scènes et font oublier les quelques longueurs du film.
Öndög s’inscrit ainsi dans la série des beaux films asiatiques présentés en compétition de la Berlinale, comme Crosscurrent par exemple il y a trois ans. Autant de films qui jouent du mystère que procurent des esthétiques rares et poussées au bout de leur idée.
Bilder: Wang Quan’an