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“My Lady” : Au cœur de la justice britannique, un beau portrait de femme avec une sublime Emma Thompson

“My Lady” : Au cœur de la justice britannique, un beau portrait de femme avec une sublime Emma Thompson

31 July 2018 | PAR Gregory Marouze

My Lady,  le nouveau film de Richard Eyre, est l’adaptation du roman de Ian McEwan. Centré sur la rencontre d’une juge et d’un adolescent, My Lady aborde des questions morales importantes. Il est surtout un beau portrait de femme qui donne l’occasion de voir une grande comédienne à l’œuvre : Emma Thompson.

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Le réalisateur de My Lady : Richard Eyre

My Lady est réalisé par Richard Eyre, grand metteur en scène britannique de théâtre et d’opéras (Henri IV, La Traviata, Carmen), il a aussi dirigé le Royal National Théâtre. Au cinéma, Eyre se fait plus discret. Pourtant, le réalisateur aujourd’hui âgé de 75 ans, met en scène des films plus qu’honorables, dont le classicisme flirte parfois avec un certain académisme. Son film le plus célèbre, Chronique d’un scandale (2006) avec Cate Blanchett et Judi Dench, est une étude sociale réussie qui porte toute son attention sur le travail de deux grandes comédiennes. Il en est de même avec My Lady. Avec ce film, Richard Eyre adapte un texte de Ian McEwan : The Children Act (qui donne son titre original au film, et rebaptisé L’intérêt de l’enfant pour l’édition française). The children act est le nom d’une loi anglaise de 1989, qui porte l’intérêt de l’enfant au-dessus de toute considération, en cas de conflit familial.

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Portrait de femme

Le film se concentre sur l’histoire de Fiona Maye (Emma Thompson), Juge de la Haute Cour. Absorbée par son travail, elle délaisse son mari (Stanley Tucci) homme attentionné, qui vit très mal le rejet de sa femme. Fiona est en charge d’une affaire délicate : statuer sur l’avenir d’un jeune garçon, témoin de Jéhovah comme ses parents, refusant une transfusion sanguine qui pourrait le sauver. Si My Lady pose des questions morales et éthiques passionnantes (la Justice peut-elle nier les convictions religieuses profondes d’un être humain pour le maintenir en vie? La juge peut-elle pénétrer la sphère intime de l’adolescent ?), il est avant tout le portrait d’une femme engloutie par son travail. D’une femme forte, qui va vaciller et perdre ses repères.

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Si la mise en scène de Richard Eyre est un peu fonctionnelle (on notera cependant son choix inspiré de confier la musique à Stephen Warbeck) , elle demeure toutefois suffisamment élégante pour qu’on ne se désintéresse pas du récit. Pourtant, on voit très bien ce qui intéresse le plus le réalisateur : les comédiens (Stanley Tucci est merveilleux, tout comme le jeune Fionn Whitehead, vu dans Dunkerque). Mais c’est Emma Thompson que Eyre filme avec le plus de sensibilité. Elle le lui rend d’ailleurs bien en livrant une prestation de tout premier ordre. Thompson se met au service de l’histoire, de son personnage, de son réalisateur. Elle alterne la comédie et le drame avec une facilité déconcertante. Parfois dans la même scène. On croit Fiona dure alors qu’elle n’est que cicatrices et dissimule des trésors de sensibilité. On pense alors à la phrase de l’écrivain Henri Calet « Ne me secouez pas, je suis plein de larmes ». Peu à peu la chrysalide va s’ouvrir pour laisser apparaître une femme blessée, qui craque. Enfin.

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Portrait de Emma Thompson ?

Emma Thompson, immense comédienne, arrive encore à surprendre. Alors qu’on devine assez vite les tenants et aboutissants du récit, on se laisse porter par l’émotion. C’est à Emma Thompson qu’on le doit. On regarde le visage de l’actrice (merveilleusement filmé par Richard Eyre), on s’abandonne à son regard empli de mépris ou de compassion. A sa façon de se mouvoir, aussi. Un autre film se dessine alors sous nos yeux, comme un sous-texte au récit qui nous est raconté. My Lady devient alors en documentaire passionnant sur Emma Thompson, le travail, le courage, la force vitale qu’elle déploie pour incarner Fiona. La pudeur qu’elle accepte de perdre pour son metteur en scène. Finalement, c’est peut-être ce film qui passionne et émeut le plus.

Grégory Marouzé

My Lady (The Children Act) un film de Richard Eyre

Avec Emma Thompson, Stanley Tucci, Fionn Whitehead, Kevin Henry, Jason Watkins

Scénario de Ian McEwan d‘après son roman publié chez Folio Gallimard

Image Andrew Dunn

Montage Dan Farrell

Musique Stephen Warbeck

Durée 1H45

Sortie le 1er août 2018

Synopsis : Faut-il obliger un adolescent à recevoir la transfusion qui pourrait le sauver ? Fiona Maye, Juge de la Haute Cour, décide de lui rendre visite, avant de trancher. Leur rencontre bouleversera le cours des choses.

Visuels : ARP Sélection

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Gregory Marouze
Cinéphile acharné ouvert à tous les cinémas, genres, nationalités et époques. Journaliste et critique de cinéma (émission TV Ci Né Ma - L'Agence Ciné, Revus et Corrigés, Lille La Nuit.Com, ...), programmation et animation de ciné-clubs à Lille et Arras (Mes Films de Chevet, La Class' Ciné) avec l'association Plan Séquence, Animateur de débats et masterclass (Arras Film Festival, Poitiers Film Festival, divers cinémas), formateur. Membre du Syndicat Français de la Critique de Cinéma, juré du Prix du Premier Long-Métrage français et étranger des Prix de la Critique 2019, réalisateur du documentaire "Alain Corneau, du noir au bleu" (production Les Films du Cyclope, Studio Canal, Ciné +)

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