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[Critique] « Red Army » de Gabe Polsky, documentaire réussi sur l’étonnante histoire de l’équipe de hockey soviétique

[Critique] « Red Army » de Gabe Polsky, documentaire réussi sur l’étonnante histoire de l’équipe de hockey soviétique

28 February 2015 | PAR Gilles Herail

Gabe Polsky signe un premier long-métrage instructif, nous replongeant au cœur de la guerre froide à travers le prisme du sport. Red Army raconte une histoire de hockey, de géopolitique et d’URSS, avec un sens réel de la narration. On regrette une mise en scène parfois lourdingue et un manque de finesse d’analyse, mais le cœur y est. 

[rating=3]

Synopsis : Porté par Werner Herzog et le producteur Jerry Weintraub primé aux Emmy Awards, le documentaire RED ARMY retrace le destin croisé de l’Union Soviétique et de l’équipe de hockey sur glace surnommée « l’Armée Rouge » : une dynastie unique dans l’histoire du sport. L’ancien capitaine de l’équipe Slava Fetisov revient sur son parcours hors du commun : d’abord adulé en héros national, il sera bientôt condamné comme ennemi politique. La « Red Army » est au coeur de l’histoire sociale, culturelle et politique de son pays : comme l’URSS, elle connaît la grandeur puis la décadence, avant d’être secouée par les bouleversements de la Russie contemporaine.
Red Army raconte l’histoire extraordinaire de la Guerre Froide menée sur la glace, et la vie d’un homme qui a tenu tête au système soviétique.

Le genre documentaire donne souvent l’occasion de redécouvrir, par bribes, le sentiment d’une époque. C’est l’atout majeur de Red Army qui nous ramène quelques décennies en arrière, aux côtés d’une équipe de hockey soviétique adulée dans son pays et respectée à l’étranger. Un club sportif lié à l’armée, le Red Army, sélectionnant les meilleurs dès le plus jeune âge, pour les former à l’esprit d’équipe et au sacrifice patriotique. Un club d’où surgira un alignement invincible et mythique, s’entraînant dans un camp spécial en autarcie pendant la majeure partie de l’année. Les images d’archive revivent grâce aux interviews d’anciens joueurs, notamment Fetisov, devenu ministre des sports de Vladimir Poutine. Au moment où l’URSS s’ouvre à marche forcée, l’histoire prend un nouveau tournant en suivant l’exil des joueurs russes vers les clubs américains. En montrant l’accueil plus que réservé des expatriés russes par la presse locale et les fans, leurs performances moyennes au sein d’un championnat nord américain très physique où le public vient chercher de la baston et du sang. Les magiciens russes perdent de leur superbe en territoire hostile. Mais reviendront une dernière fois au firmament en reconstituant une improbable équipe de compatriotes au sein du club de Détroit.

Red Army a choisi un angle plutôt bien vu pour donner de la profondeur à cette histoire passionnante : le parallèle permanent entre le hockey et le destin de l’URSS. Le propos manque de finesse et l’opposition binaire entre le faste de l’ouest et la rigueur de l’est aurait pu être plus intelligemment traitée. Mis en scène à l’américaine, avec beaucoup de rythme, de musique, et de gros plans “émotion”, Red Army sur-scénarise son histoire et pourra déranger les puristes du genre documentaire. Mais le réalisateur peut compter sur la richesse de son sujet pour conserver l’attention du spectateur. La magie du jeu transperce en permanence à l’écran, y compris quand on est novice en la matière. Le hockey devient une danse et une performance esthétique, plus qu’un simple affrontement viril. Il faut reconnaître au film une vraie efficacité dans la narration, et un charme indéniable. Gabe Polsky met également à l’écran ses propres difficultés et laisse apparaître du off qui donne une saveur différente à cette épopée passionnante mais policée.

La relation entre l’intervieweur et Fetisov est quasiment cruelle. La légende sportive répondant au téléphone pendant l’interview, esquivant les sujets qu’il ne souhaite pas évoquer. Une forme d’arrogance qui illustre malgré lui la face sombre d’une Russie post-soviétique dominée par les oligarques. Un cercle de pouvoir dont il fait maintenant partie, après avoir mis un terme à son rêve américain déçu pour rentrer au pays et devenir par la suite ministre des sports. Red Army n’est cinématographiquement pas le documentaire de l’année mais le film divertit, étonne, intrigue, interroge. Alors soyez curieux!

Gilles Hérail

Red Army, un document de Gabe Polsky, durée 1h25, sortie le 25/02/2015

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Gilles Herail

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