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Clément Cogitore nous fait découvrir les marabouts de la Goutte d’or

Clément Cogitore nous fait découvrir les marabouts de la Goutte d’or

28 February 2023 | PAR Julia Wahl

Après la Sibérie (Braguino), Clément Cogitore nous fait découvrir un nouveau microcosme : celui des marabouts de la Goutte d’or.

Entre misère et maraboutage

La Goutte d’or, tout le monde connaît ou en a entendu parler : c’est ce quartier du XVIIIe arrondissement de Paris qui semble incapable de sortir de la misère. Décor de L’Assommoir au XIXe siècle, c’est à présent le lieu des échanges informels et de l’argent difficile. Pour s’en sortir, quoi de mieux que de profiter de la naïveté de ses semblables ? C’est le pari que font les voyantes et marabouts, dont les émissaires distribuent des flyers à la sortie du métro.

Ramsès est l’un de ces diseurs de bonne aventure. Son commerce est bien rôdé, il a mis en place un stratagème qui lui permet de s’attacher la confiance des clients. Il est toutefois rattrapé par une bande de gamins fraîchement arrivée dans la capitale, qui le somme de retrouver l’un d’eux. Ce qu’il parvient à faire avec une étonnante facilité.

Une esthétique de la sobriété

L’une des réussites du film tient dans sa simplicité et son absence de commentaire. Si les coulisses des prédictions de Ramsès sont rapidement montrées, la dramaturgie ne laisse place à aucun jugement : Ramsès use de la crédulité des gens pour s’en sortir. C’est de bonne guerre. Le jeu de Karim Leklou, qui incarne Ramsès, y est pour beaucoup. Le visage impavide, il exécute les actions de son personnage avec sobriété.

Clément Cogitore a également fait le choix d’éviter les représentations stéréotypées du marabout. Ici, nulle tenture foncée, ni statuette dorée. Les murs sont nus, blancs ou gris, et dessinent l’espace d’un appartement plutôt qu’une roulotte de diseuse de bonne aventure. Cet ancrage dans un décor quotidien participe du sentiment d’assister à l’envers d’une pièce de théâtre. Pourtant, plus la combine se révèle, plus le mystère s’épaissit : que lui veulent ces enfants ? Et, surtout, comment Ramsès a-t-il deviné où se trouvait l’enfant disparu ? Goutte d’or n’est pas seulement à la croisée du film policier et du film social : il introduit une part de mystère qui a partie liée avec le fantastique. Le mélange fonctionne au point qu’il devient difficile au spectateur de démêler le vrai du faux.

Visuel : Goutte d’or, Kazak productions

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Julia Wahl
Passionnée de cinéma et de théâtre depuis toujours, Julia Wahl est critique pour les magazines Format court et Toute la culture. Elle parcourt volontiers la France à la recherche de pépites insoupçonnées et, quand il lui reste un peu de temps, lit et écrit des romans aux personnages improbables. Photo : Marie-Pauline Mollaret

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