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“Aurore”: Critique du film – Rencontre avec Agnès Jaoui et la réalisatrice Blandine Lenoir

“Aurore”: Critique du film – Rencontre avec Agnès Jaoui et la réalisatrice Blandine Lenoir

24 April 2017 | PAR Gregory Marouze

Toute La Culture a aimé le second long-métrage de Blandine Lenoir – après Zouzou – : Aurore. Le film interprété par une Agnès Jaoui en état de grâce, est un beau portrait de femme qui fait la part belle à l’humour et l’émotion. Toute La Culture fait la critique de Aurore et vous offre une rencontre avec Blandine Lenoir et Agnès Jaoui.

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Il est réjouissant de voir exister un film comme Aurore dans le paysage cinématographique français. Les rôles de premier plans pour des femmes de plus de cinquante ans se raréfient (oui Catherine Deneuve, Fanny Ardant et Isabelle Huppert tournent mais elles sont des stars). Pendant ce temps là, producteurs, auteurs et spectateurs ne semblent pas gênés de voir de « vieux croulants » emballer de jeunes femmes de vingt ans au cinéma. Et nous ne parlons même pas de cette problématique dans le cinéma américain.

Qu’un film français aborde la difficulté de vieillir pour une femme dans une société patriarcale donnant la prime à la jeunesse, rassure. Qu’Agnès Jaoui – une actrice populaire, pas une star – accepte de tenir un rôle comme Aurore est une preuve de grande intelligence.

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Blandine Lenoir : « Pour ce film, il me fallait absolument un nom pour rassurer tout le monde. J’ai pensé très rapidement à Agnès Jaoui parce qu’il me fallait une femme de cinquante ans. Donc dans les « bankables », déjà, il n’y en a pas mille ! Et puis une femme de cinquante ans qui soit « droite dans ses bottes », quoi ! Qui soit dans son âge ! Qui soit à l’aise dans son âge. Ensuite, je trouvais ça intéressant pour Agnès. Comme c’est une femme qui est face au vieillissement, au rejet, d’avoir une actrice dont on connaît très bien le visage. Moi, mon premier souvenir d’Agnès c’était la scène des César, quand elle va chercher son César pour Resnais (Smoking / No Smoking: ndr) c’était vraiment une toute jeune femme, quoi. Et elle a beaucoup changé, Agnès. Elle a changé mais on continue de très bien la reconnaître, de très très bien la connaître. Moi je trouve qu’elle est de plus en plus belle, de plus en plus intéressante physiquement. Elle a un très beau corps hyper féminin. C’est comme quand je vois Jean-Pierre Léaud : je suis toujours bouleversée parce que c’est un visage qu’on connaît depuis sa tendre enfance. Il y a quelque chose qui est très beau de suivre les acteurs dans leur vie ».

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Aurore est le plus beau rôle de Agnès Jaoui depuis Une Femme d’Extérieur de Christophe Blanc. Dans le film de Blandine Lenoir, Jaoui ne minaude jamais. Elle est drôle, émouvante, simple, ne cherche jamais à faire de l’ombre à ses partenaires de jeu (du reste, elle ne l’a jamais fait). On tombe immédiatement amoureux de son personnage et de son histoire.

Agnès Jaoui : « Je n’ai pas hésité du tout à l’interpréter. C’est un rôle magnifique ! Et puis, le scénario m’a touché en fait. Avec Jean-Pierre Bacri on écrit. On est très lents, très laborieux. Donc, hormis les concerts etc., la vie de famille qui fait qu’on s’arrête parfois, … depuis toujours, on s’est toujours dit que s’il y a un projet auquel on ne peut pas dire non, hé bien il faut le faire ! On est avant tout des acteurs ! Donc, c’est comme ça à chaque fois ! Je reçois des scénarios. En général, quand j’hésite c’est pas bon signe ! Et quand je referme le scénario en me disant « Je ne peux pas dire non ! » Hé bien voilà : je ne peux pas dire non ! C’est ce qui s’est passé pour ce film-là ! Je me suis dit : « Je ne peux pas dire non ! » Et, en plus, le film me plait encore plus que la lecture du scénario. Donc, je suis très contente. D’avoir ressenti ça. » (rires)

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Agnès Jaoui et Blandine Lenoir ont en commun d’évoquer dans leurs films les soubresauts de la société, sous l’angle de la comédie (amère parfois, mais comédie tout de même). Nous avions envie de savoir si pour les deux réalisatrices, ce genre est le meilleur véhicule pour aborder les questions de société.

Blandine Lenoir : « En tout cas, c’est le nôtre ! Quand je pense au Goût des Autres, que je trouve être un film hyper intelligent, touchant, drôle et étonnant. Tout ce qui est abordé dans ce film si ça ne l’était pas sur le ton de la comédie, je ne vous pas à quoi ça ressemblerait. Je ne sais pas ce que ça serait. C’est vraiment un vecteur qui est ultra communiquant ».

Agnès Jaoui : « C’est une histoire de goûts, hein ! Justement ! (rires). Je ne sais pas si c’est le meilleur moyen parce qu’il y en a d’autres. Mais j’aime bien écrire ce que j’aime voir. Et j’aime bien rire. (rires). Après, parfois, les gens me disent « Ah, on s’est bien marrés ! ». Et je me dis : « Ah bon ? Putain, c’est tout ? » (rires). Mais je me dis que c’est déjà pas mal. Finalement. Et souvent par le rire, on passe plus vite aux larmes. Parce que moi, j’aime bien pleurer aussi. J’aime bien avoir le maximum d’émotions en fait. Et du coup, on se protège un peu moins. Et d’ailleurs, il y a des rires à la pace des larmes, des fois. En plus, on a tendance (Bacri et Jaoui : ndr) à être très moralistes et en faire des tartines, alors si on fait pas un peu rigoler après, avant, pendant, c’est très indigeste ! »

Aurore fait partie de ces films qui vous font sourire, rire, et qui en une fraction de seconde vous serrent le cœur. Et si Aurore, davantage qu’un film français, était une comédie italienne ?

Grégory Marouzé

Synopsis : Aurore est séparée, elle vient de perdre son emploi et apprend qu’elle va être grand-mère.
La société la pousse doucement vers la sortie, mais quand Aurore retrouve par hasard son amour de jeunesse, elle entre en résistance, refusant la casse à laquelle elle semble être destinée. Et si c’était maintenant qu’une nouvelle vie pouvait commencer ?

Aurore de Blandine Lenoir

Avec Agnès Jaoui, Thibault de Montalembert, Pascale Arbillot

Scénario Blandine Lenoir et Jean-Luc Gaget, d’après une idée originale de Blandine Lenoir

Adaptation et dialogues Blandine Lenoir et Océane Rose Marie

Image Pierre Milon A.F.C
Son Dimitri Haulet, Xavier Thibault, Emmanuel Croset
Montage Stéphanie Araud
Produit par Antoine Rein et Fabrice Goldstein
Producteur associé Antoine Gandaubert

Durée: 1h29

Sortie le 26 avril 2017

Remerciements au cinéma Le Métropole de Lille.

Visuels © Diaphana Films

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Gregory Marouze
Cinéphile acharné ouvert à tous les cinémas, genres, nationalités et époques. Journaliste et critique de cinéma (émission TV Ci Né Ma - L'Agence Ciné, Revus et Corrigés, Lille La Nuit.Com, ...), programmation et animation de ciné-clubs à Lille et Arras (Mes Films de Chevet, La Class' Ciné) avec l'association Plan Séquence, Animateur de débats et masterclass (Arras Film Festival, Poitiers Film Festival, divers cinémas), formateur. Membre du Syndicat Français de la Critique de Cinéma, juré du Prix du Premier Long-Métrage français et étranger des Prix de la Critique 2019, réalisateur du documentaire "Alain Corneau, du noir au bleu" (production Les Films du Cyclope, Studio Canal, Ciné +)

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