« A media voz » au Festival Biarritz Amérique Latine : s’exprimer par l’intimité
Toute La Culture est au Festival Biarritz Amérique Latine ! Nous avons vu A media voz, documentaire en compétition réalisé par Heidi Hassan et Patricia Pérez Fernández. Il raconte la difficulté de l’exil et de la construction personnelle sur fond de retrouvaille entre deux amies que la vie a séparées.
A media voz est en réalité un docufiction. Un documentaire parce que l’histoire qu’elles racontent est vraie, parce que les images qui accompagnent cette histoire sont des images d’archives, nées de leur compulsion respective à filmer leur vie. Une fiction parce que le documentaire met en scène des retrouvailles entre deux amies qui, après quinze ans, reprennent contact en s’envoyant lettres et vidéos.
Le documentaire raconte l’histoire de Heidi et Patricia, nées à Cuba, en pleine guerre froide. Amies d’enfance, elles se consacrent ensemble à leur amour pour le cinéma et l’image, en tournant des courts-métrages. Mais la perspective d’un avenir meilleur convainc Patricia de fuir l’île à l’occasion d’une présentation aux Pays-Bas de leur travail, sans en informer son âme-sœur et sans la recontacter. Heidi fera de même quelques années plus tard avec son compagnon. Un exil plus qu’une immigration puisque fuir Cuba signifie être interdit d’y revenir. L’enjeu de leurs retrouvailles consiste à expliquer l’une à l’autre ce qu’elles ont vécu, qui elles sont devenues, et ce qui les a construites ou minées.
Accepter de voir et d’écouter
A media voz est une introspection d’une intimité sans pareil, où la caméra devient le stylo qui écrit les lignes inavouables d’un carnet secret, et la voix qui parle pour ce qui ne parvient pas a être dit. En résulte un documentaire cathartique, mais construit, dans lequel le spectateur doit trouver sa place, quitte à être mal à l’aise de devenir le témoin privilégié d’un dialogue si intime. Mais quel dialogue ! Un dialogue qui met à nu deux vies déracinées. Deux vies où Cuba représente ce qui a été perdu, ce qui a été brisé, et paradoxalement le poids qui les retient chacune. Un dialogue qui permet à deux voix de parler, de se dévoiler, de se faire comprendre. Des voix féminine aussi, trop souvent absentes des récits de l’immigration.
Avec ce documentaire, nous sommes invités à écouter et à regarder en face l’existence de ces êtres qui expriment leur besoin de partager leur histoire. L’histoire de la difficile construction d’une identité après l’exil, incompréhensible sans l’expression de ceux et celles qui l’ont vécu.
Visuel : Catalogue du Festival Biarritz Amérique Latine.