
75e Festival de Cannes : les films de la programmation Acid Cannes
En 2022, la sélection de l’ACID montrée au Festival de Cannes dévoilera comme habituellement neuf films, entre le 18 et le 26 mai. Choisis exclusivement par des réalisateurs et réalisatrices, ils témoignent à première vue de regards forts, entre portraits ouverts du réel et rêveries risquées.
Proposant son lot de points de vue internationaux singuliers dans le cadre du Festival de Cannes depuis 1992, l’Association du Cinéma Indépendant pour sa Diffusion répond à nouveau présent cette année, avec sa sélection de neuf films. Les décennies précédentes ont vu passer dans sa programmation annuelle des noms comme Radu Jude, Ours d’or à la Berlinale en 2021, Sophie Letourneur, avec sa Vie au ranch, Justine Triet et sa Bataille de Solférino, Virgil Vernier et ses Mercuriales, ou encore la géniale Kaouther Ben Hania, Présidente cette année du jury cannois qui devra départager les longs-métrages montrés dans le cadre de la Semaine de la Critique.
Les sélectionneurs de cette année
Pour composer cet ensemble de neuf titres, quinze cinéastes sélectionneurs se sont mis à l’œuvre, essayant notamment de cibler des premières réalisations ou des travaux n’ayant pas encore de distributeur français : Bojena Horackova, retenue en 2020 dans le programme ACID Cannes avec son très réussi film Walden, Corto Vaclav, co-réalisateur de Kongo, présent au sein de la sélection 2019, Thomas Paulot, présent l’an dernier dans cette même section avec Municipale, Nicolas Peduzzi, lui aussi convié en 2021 avec son Ghost Song et auteur auparavant de Southern Belle, Laure Portier, sélectionnée également l’an dernier avec Soy libre, Mathieu Lis, signataire du moyen-métrage Sans rivages avec Carlo Brandt, Frédéric Ramade, qui signa lui le moyen-métrage Ode pavillonnaire, Idir Serghine, auteur de Cross, Vladimir Perisic, réalisateur d’Ordinary People, Reza Serkanian, signataire de Noces éphémères, Emmanuelle Millet, réalisatrice de La Brindille, Aline Fischer (Meteor Street), Kathy Sebbah (La Harde), Ina Seghezzi (Histoires de la plaine), et Maria Reggiani (L’Autonomie en herbe).
Ceux que l’on recroise
D’emblée, en se penchant sur ce cru 2022, on remarque peu de noms “installés” ou connus de tous, et on s’en réjouit. Tout de même, on salue la présence dans la sélection du génial Damien Manivel, l’un des réalisateurs les plus sensibles et fins du paysage français actuel : on a pu le découvrir avec le magnifique Un jeune poète, puis le retrouver dans la programmation ACID Cannes 2016 avec Le Parc. En cette année 2022, il dévoile Magdala, un itinéraire de Marie-Madeleine, la célèbre protagoniste ayant suivi le Christ, confrontée ici à sa disparition et cherchant une voie pour le retrouver. Un rôle tenu par Elsa Wolliaston, interprète au centre du dernier segment, le plus fort et déchirant, du précédent film de Damien Manivel, Les Enfants d’Isadora. Passionnant programme pour ce film qui sortira dans les salles françaises distribué par Météore Films.
Le grand documentariste Denis Gheerbrant, signataire de Grands comme le monde ou de l’œuvre-fleuve La République Marseille, est également présent, avec le film qu’il co-réalise avec Lina Tsrimova La Colline, centré sur un grand monticule essentiellement formé par des déchets, au Kirghizistan, avec lequel doivent composer les populations vivant aux alentours.
Les révélations en herbe, entre fantastique et réel cru
Deux fictions françaises présentées choisissent de prendre, elles, les sentiers du quasi fantastique : dans Grand Paris, de Martin Jauvat, deux jeunes adeptes des combines découvrent un artefact via lequel la banlieue parisienne devient le théâtre d’événements curieux. Avec au casting, le réalisateur lui-même, Mahamadou Sangaré, William Lebghil et Sébastien Chassagne, expert dans l’art de flotter en apesanteur entre réalisme et décalage. Et dans Jacky Caillou, de Lucas Delangle, un garçon s’échine à devenir magnétiseur-guérisseur, et traite une patiente atteinte par un mal ardu. Avec notamment, au casting, la présence du génial Jean-Louis Coulloc’h.
Au programme des autres fictions montrées cette année figurent Yamabuki, portrait d’une ville minière japonaise conduit par Juichiro Yamasaki, qui sortira dans les salles françaises distribué par Survivance. Ainsi que le film suisse 99 Moons, de Jan Gassmann, dans lequel une femme et un homme qui croient leurs vies toutes prévues d’avance se rencontrent et s’abandonnent.
Enfin, cette sélection est complétée par trois autres documentaires. Deux d’entre eux arborent des sujets durs par certains aspects : Atlantic Bar de Fanny Molins se penche sur un bar en instance de fermeture, cette dernière signifiant, pour les habitués et ceux qui travaillent dans le lieu, la perte d’un lieu de perdition et d’un lieu de vie, tout à la fois. Et How to save a dead friend, signé par Marusya Syroechkovskaya, s’intéresse à deux jeunes russes à l’horizon totalement obscurci par l’autoritarisme du gouvernement en place.
Quant à Polaris, d’Ainara Vera, il se centre sur une femme capitaine de bateau navigant en Arctique, qui apprend que sa sœur vient de devenir mère, et se trouve par là-même obligée de replonger dans un passé qu’elle fuyait. Un travail qui sortira dans les salles françaises distribué par Jour2Fête.
“Territoires déchirés”, “corps ébranlés”, “résistance au temps qui passe” : l’éditorial accompagnant l’annonce de cette programmation ACID Cannes 2022 affirme que face à ces sujets, les films choisis au final “opposent la fulgurance de leur geste”. Des gestes qu’on ne demande qu’à recevoir.
La sélection ACID Cannes 2022 sera montrée pendant le temps du Festival, entre le 18 et le 26 mai.
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Visuel : affiche de la programmation ACID Cannes 2022 (auteur : Three Koma)