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Une banane à 150 000 dollars

Une banane à 150 000 dollars

09 December 2019 | PAR Caroline Arnaud

Une banane à 150 000 dollars? Dans l’art et son marché tout est possible! Pendant que des artistes manifestent  pour lutter contre leur précarité d’autres gagnent 150 000 dollars en scotchant des bananes sur les murs… 

L’artiste contemporain Maurizio Cattelan a scotché sur un mur une banane qu’il vendait avec la galerie Perrotin à 120 000 dollars à la Foire Art Basel Miami Beach en Floride, une des 10 foires d’art les plus chères au monde selon Quotidien de l’art

Selon le New York Times l’oeuvre à 120 000 dollars aurait été vendue à une française, la cofondatrice des magasins Colette, Sarah Andelman. Cet achat a lancé les dés et réveillé 2 autres acheteurs car l’oeuvre existe en 5 exemplaires, dont 2 consacrés à être exposés dans des musées. La troisième banane vendu sur le même stand de la foire a vu son prix augmentait de 30 000 dollars pour atteindre la somme de 150 000 dollars pour le troisième acheteur. Juste pour être sûre que nous nous comprenons bien, c’est une vraie banane qui est scotchée sur le mur de la galerie par un bout d’adhésif gris qui a été vendue à ce prix. 

La banane de l’artiste est intitulée “Comedian”/”Comédien”. Le titre de son oeuvre est bel est bien équivoque, remet-il en question le statut d’artiste dans l’art contemporain ou est-il lui même un comédien qui se joue du monde de l’art ? Cela faisait déjà un an que l’artiste italien travaillait sur cette oeuvre, selon Artnet news, l’artiste avait travaillé d’abord avec le bronze ainsi que la résine, mais cette matérialité proche de ce qui peut sembler pour nous de l’art ne correspondait pas aux attentes de Maurizio Cattelan. Il finit par décider de fixer une véritable banane sur le mur, une petite banane dont nous ignorons la provenance, et la date de fin de consommation.

Ce 150 000 dollars est difficile à ingurgiter… Mais peut être pas si difficile pour l’artiste Américain David Datuna qui pour sa performance “Hungry artist”/”artiste ayant faim” a pris la banane accrochée au mur le 7 décembre et l’a mangée, paisiblement sur le stand Perrotin avant d’être renvoyé par la sécurité de la foire. Mais il faut rassurer nos chers acheteurs, il a été remis à la place de l’authentique banane une nouvelle banane tout aussi authentique. Parce que Walter Benjamin (philosophe et historien de l’art) adorait parler de la photographie comme un médium reproductible en série dans l’art, nous sommes surpris qu’il n’ait pas pensé à la banane…
L’oeuvre achetée sera ainsi cette banane, ce scotch mais aussi la signature de l’artiste contemporain comme “certificat d’authenticité”.  Et quand la banane est pourrie l’acheteur pourra changer la banane avec une nouvelle, une bio ou une d’Espagne, l’acheteur est pleinement libre de ses choix.

« Il a toujours été question de prolonger l’effervescence artistique au-delà de la foire », expliquait le maire de Miami Beach lors de la conférence d’ouverture de la foire. Mais quelle réussite! Tout le monde en parle et rêve de croquer à pleines dents dans cette banane où le jaune de son enrobage ne semble plus être un packaging naturel tant il est fait d’or! On ressent une véritable dévotion de l’artiste à parler de son environnement et des émissions de gaz à effet de serre aussi lourdes qu’un lingot qui ont transportées cette banane…  mais alors une question nous brûle les lèvres…En a t-on fini de jouer avec l’art contemporain et son marché ? 
Après Banksy et son oeuvre réduite en confettis, que faut-il, pour faire comprendre au marché de l’art ses limites ? Ou quelles sont les limites de l’art contemporain ? Pouvons nous toujours rire de ce qui se passe sur le marché de l’art quand on continue de classer ces événements dans la rubrique “art contemporain” de nos news?  Parler encore de ce phénomène dans nos articles ne serait ce pas légitimer ce phénomène dont nous rions tous mais que l’on continue à diffuser ?

Mais où est donc passé l’art? Nous sommes proches des fameuses boites de Piero Manzioni (Merda d’Artista, 1961), non ? 

Visuel: ©Public Domain Mark 1.0

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Caroline Arnaud

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