Trésors de la Chine ancienne : d’antiques bronzes qui méritent le déplacement au musée Guimet
Après une exposition consensuelle sur le thé, le musée Guimet nous offre une exposition à la fois pointue et de toute beauté sur les bronzes antiques chinois de la prestigieuse collection Meiyintang. Réunis par un collectionneur éclairé, et bien que connus par de nombreuses publications, c’est la première fois que le public est invité à découvrir ces bronzes magnifiques.
Ayant traversés plusieurs millénaires , ces bronzes nous sont parvenus dans un parfait état de conservation. A peine oxydés, c’est parés de teintes brunes et bleutées qu’ils se présentent à nous.
Exposés à la fois chronologiquement et thématiquement, les œuvres témoignent de l’évolution du goût et des techniques au cours de cette longue période. Les premières pièces, très stylisées et épurées, témoignent déjà d’une grande maîtrise de la fonte effectuée non pas à la cire perdue mais avec des moules à sections. Tout commence avec le grand jue, ou coupe à alcool, témoignage exceptionnel de la civilisation Erlitou (XIXe-XVIe siècles av. J.-C.). Sous les Shang (XVIe-XIe siècles av. J.-C.) le décor s’enrichit de rinceaux et de masques taotie (figure animalière imaginaire empruntant des traits aux dragons et aux tigres) d’une fascinante abstraction. Au cours des siècles suivants, sous les règnes des Zhou, les formes animalières fantasmatiques de plus en plus reconnaissables structurent le décor tandis que la maîtrise, désormais acquise, des techniques de fonte permet l’évolution et la complexification des modèles : la puissance et la force subjuguent la séduction. Les rinceaux deviennent des pointes, les masques portent des cornes. Pendant la période des royaumes combattants (Ve-IIIe siècles av. J.-C.), la fonction rituelle des objets de bronze fait place à l’ostentation : le décor s’enrichit d’incrustations et les formes deviennent précieuses jusqu’à l’exubérance.
Peu à peu, les formes et le décor se complexifient, développant un fantastique bestiaire : tigres, dragons, béliers, oiseaux, poissons, bœufs, etc. Dans la Chine ancienne, les œuvres de bronze étaient principalement destinées à un usage votif, donc très peu utilisées. En Chine, dès le XIXe siècle avant J.-C., ces bronzes sont les instruments privilégiés des rites offerts aux mânes des ancêtres pour solliciter leur puissance, notamment sur le champ de bataille.
Scénographie agréable et aérée. Un grand soin a été apporté à l’éclairage qui fait ressortir les délicates moulures. Les vitrines sont assez vastes pour ne pas écraser les œuvres. Les cartels sont relativement dépouillés, mais la majorité des informations est réunie sur les grands panneaux indiquant le thème de chaque section. D’un point de vue pédagogique, de grands panneaux reprennent les silhouettes des bronzes et les replacent chronologiquement. On notera une petite liberté scénographique avec la reconstitution de l’autel regroupant des œuvres de provenances diverses. Cette liberté assumée permet toutefois d’imaginer l’aspect d’un autel votif traditionnel.
Pour conclure, cette nouvelle exposition propose des œuvres de toute beauté, foisonnantes de vie et de spiritualité qui ne peuvent que s’imprimer dans la mémoire du visiteur.
Activités culturelles autour de l’exposition :
Conférences « le culte des ancêtres dans la Chine pré-impériale » par Lyce Jankowski, sans réservation préalable, dans la limite des places disponibles. Billets à retirer aux caisses du musée. Lieu des conférences : Grand salon du Panthéon bouddhique
– Samedi 30 mars à 14h30 : histoire des dynasties royales Shang et Zhou
– Samedi 20 avril à 14h30 : usage et iconographie des vases rituels
Tél. : 01 56 52 53 45 ; fax 01 56 53 54 36 ; courriel : [email protected]
Trois cycles de documentaires et de films de fiction invitent à un regard sur la Chine d’hier et d’aujourd’hui :
– la Chine des rituels : des sinologues derrière la caméra
– Pékin : embarquement immédiat !
– la Chine de Joris Ivens et Marceline Loridan
Visuels : affiche de l’exposition et photographies Sandra BERNARD