Les espaces de Charlotte Perriand s’ouvrent à la Fondation Louis Vuitton
“Le monde nouveau de Charlotte Perriand” est le titre bien choisi de la très belle exposition qui ouvre demain à la Fondation Louis Vuitton. L’occasion rêvée de déambuler chez Charlotte Perriand comme si elle vous avait invités !
La démarche est chrono-thématique. Nous suivons l’évolution des intérêts de Charlotte Perriand de 1927, date où elle devient associée de Le Corbusier et Pierre Jeanneret pour l’équipement mobilier, jusqu’à sa mort, le 27 octobre 1999. Les dates de vie de Charlotte Perriand parlent d’elles-mêmes : 1903-1999. Elle incarne le XXe siècle et toute son oeuvre est un reflet des mouvements d’avant-garde qui ont secoué le siècle guerrier.
Elle s’empare des techniques automobiles pour créer des divans aux allures chromés. Elle, peut-on parler d’exil, passe la Seconde Guerre Mondiale de l’autre côté du front, au Japon, où elle est nommée, en 1940, conseillère pour l’art industriel … elle y restera jusqu’en 1946. On voit alors ses iconiques Fauteuil grand confort ( 1928) ou Chaise longue basculante (1928-29) être réinterprétés avec des matériaux venus d’Asie comme le Bambou.
L’un des grands apports de l’exposition est la place des reconstitutions. A plusieurs reprises, nous entrons réellement dans le monde de Pierrand, où les réflexions sont semblables à celle de Le Corbusier. Elle met l’humain au centre dans une volonté pratique qui parfois atteint ses limites. C’est le cas pour les logements Aux Arcs, minuscules … mais fonctionnels !
Les deux mots clés pour comprendre Perriand sont modernité et actualité. Rien de ce qu’elle n’a fait n’a pris une ride. Les deux-cents œuvres montrées, quelques fois en situation ( Le refuge tonneau, Le salon d’automne, La maison de jeune homme ( et sa salle de gym avec vue sur un immense Fernand Leger! ), son appartement de Saint-Sulpice (avec gramophone intégré au bahut ! )) sont toutes des propositions de vie, jusqu’à ce chef d’oeuvre qu’est La maison au bord de l’eau (1934) dont l’installation ici à Vuitton est à couper le souffle, au bord de la cascade de Frank Gehry.
Deux cents pièces de design et d’architecture dialoguent avec les toiles d’autres icônes, Leger en majesté car il était un ami de Perriand. Souvent d’ailleurs, elle intègre des toiles à ses meubles, comme ce Picasso dans une fenêtre coulissante… Alors cette proximité qu’elle avait avec la peinture entraîne un festival. Des dizaines et des dizaines de toiles, il faudrait une journée pour tout voir. Les peintures de Leger, Picasso, Braque, Delaunay, Hantaï, Soulages…sont là accrochées aux murs de ces pièces qui sont toutes comme des appartements.
Cette immersion totale dans le geste de Perriand occupe absolument tout le bâtiment. C’est à tout point de vue gigantesque. Perriand a créé en 1950 cette idée si moderne : l’art d’habiter, et on ne rêve que d’une chose.. vivre chez elle.
Le monde nouveau de Charlotte Perriand est à voir du 2 octobre au 24 février 2010 à La Fondation Louis Vuitton
Visuels :
Affiche ©Fondation Louis Vuitton
Charlotte Perriand, Bibliothèque de la Maison de la Tunisie, 1952. Bois, tôle pliée. Paris, Centre Pompidou – Musée national d’art moderne – Centre de création industrielle.©Adagp, Paris, 2019. ©Centre Pompidou, MNAM-CCI,Dist. RMN-Grand Palais/Audrey Laurans
Le Corbusier, P. Jeanneret, Ch. Perriand, Chaise longue basculante B306, 1928-1929 , Vitra Design Museum ©F.L.C/Adagp, Paris, 2019 ©Adagp, Paris, 2019. Courtesy of Vitra Design Museum