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La peinture spirite s’invite au LaM dans une exposition qui rend hommage à trois artistes mineurs du Nord de la France !

La peinture spirite s’invite au LaM dans une exposition qui rend hommage à trois artistes mineurs du Nord de la France !

08 October 2019 | PAR Chloé Coppalle

Lesage, Simon, Crépin : peintres spirites et guérisseurs est la nouvelle exposition présentée au Lille Métropole Musée d’art moderne, d’art contemporain et d’art brut (LaM), qui se tiendra jusqu’au 5 janvier 2020 ! Le but de l’événement est de tisser des liens entre trois artistes originaires du bassin minier du Nord de la France : Augustin Lesage (1876-1954), Fleury Joseph Crépin (1875-1948), et Victor Simon (1903-1976), de les réunir pour la première fois depuis 1946, et d’établir des dialogues entre leurs différentes approches spirites.

Trois artistes, une découverte pour le public

Augustin Lesage fut le premier à peindre en 1911. Vient ensuite Victor Simon en 1933 et enfin Fleury Joseph Crépin, qui commença la peinture en 1939. C’est cette chronologie qui dessine l’exposition, ponctuée par des salles thématiques visant à éclaircir les questions historiques. Par exemple, la première salle présente le contexte spirite à partir de 1850 pour permettre aux visiteurs de comprendre de quel contexte spirituel ont hérité les trois artistes. En effet, Christophe Boulanger et Savine Faupin, commissaires de l’exposition, ont témoigné que les trois hommes sont parfois allés chercher des références lointaines, d’où l’envie d’expliquer les différentes nuances présentes dans le spiritisme. Cette première salle contextuelle est un réel apport car les visiteurs auront le plaisir de découvrir des objets un peu insolites de par leur lien avec le spiritisme ! En clair, l’événement permet à la fois de découvrir des artistes peu connus du grand public, et à la fois d’aborder des thèmes singuliers comme celui du lien entre la peinture et le spiritisme, sujet qui fait peu l’objet d’expositions.

Les deux professionnels ajoutent que l’événement a permis un grand travail de restauration des œuvres, notamment celles d’Augustin Lesage qui conservait ses toiles roulées. Comme Gustave Courbet pour Un enterrement à Ornans, il peignait dans un petit atelier. Pour peindre les grands formats, il les roulait tel un parchemin, en dépliant le côté vierge au fur et à mesure qu’il avançait sur le support. Ses tableaux avaient donc l’habitude d’être conservés, et surtout transportés en rouleau, ce qui provoqua une altération de certaines œuvres sur le long terme. 

La peinture spirite, qu’est-ce que c’est ?

Les commissaires racontent que les trois peintres ont tous entendu une voix, qui un jour leur a demandé de se mettre à peindre. Augustin Lesage l’aurait entendue quand il était à la mine, et c’est cette voix qui a guidé les dessins exposés dans la première salle consacrée à l’artiste. En tant que spectateur, apprendre cette anecdote et pouvoir les contempler en même temps est réellement intrigant car ces dessins sont une sorte de retranscription de l’énergie envoyée par la voix pour guider la main du peintre. Savine Faupin ajoute que le nom “Marie”, prénom de la jeune sœur de Lesage, est parfois écrit dans certaines toiles de ce dernier, et imagine que c’est cet esprit qui aurait guidé ses tracés. Toujours d’après la commissaire, l’artiste aurait raconté que le passage du dessin aux huiles de grand format fut également commandé par cette voix. Tous furent concernés par cette rencontre avec un esprit, comme Crépin également, à qui la voix commanda une série de Quarante cinq Tableaux Merveilleux, pour pacifier la période de l’Après-guerre. Malheureusement pour lui, il meurt avant d’avoir fini ce travail, et n’achève que quarante trois tableaux. L’exposition est aussi l’occasion de découvrir la technique très singulière de Crépin, qui consiste à poser délicatement des gouttes de peinture les unes à coté des autres sur la toile pour créer un motif. Selon les deux commissaires, on ne sait d’ailleurs toujours pas comment il réalisa cette technique !

Lesage, Simon, Crépin et l‘art contemporain

L’exposition veut montrer que ces peintres locaux n’étaient isolés ni dans la scène artistique de l’époque, ni dans les pratiques actuelles, bien que la peinture spirite soit très précise. La scénographie est donc organisée comme une sorte de boucle, qui commence et qui termine par de l’art contemporain. Avant de rentrer dans l’exposition, le visiteur découvre les portraits plein pied des trois peintres, réalisés par le dessinateur de bande dessinée Frédéric Logez, ce qui permet d’avoir dès le début du parcours une vision d’ensemble de leurs trois histoires. Cet hommage ferme l’exposition par une dernière salle consacrée à l’impact de ces peintres sur certains artistes contemporains. Néanmoins, le rapport à l’art contemporain n’est pas le plus clair de l’exposition. Des œuvres népalaises non datées sont exposées à côté d’artistes récents et des œuvres de Simon ou Lesage, mais sans donner de réelles explications sur le sens donné à cet accrochage. Est-ce que les trois peintres spirites ont vu les œuvres népalaises accrochées ?  Si oui, dans quel contexte ? Est-ce que ces œuvres les ont intéressé pour un travail de composition, ou pour une dimension spirituelle  ? Les commissaires ont également tenu à rythmer l’intérieur du parcours par les interventions d’artistes contemporains, mais encore une fois, sans fournir réellement d’explications sur ces créations.

En somme, l’exposition est cohérente et très bien documentée par les nombreuses archives et objets d’époque présentés au public, comme des photographies d’ateliers, des peintres avec leurs proches ou dans les lieux importants de leurs carrières. Malgré un manque important d’explications par les cartels, les galeries thématiques et ces archives sont une aide précieuse pour palier à ce manque. Après avoir été inaugurée au LaM, l’exposition partira dans une autre région minière, celle de Lyon, autre géographie qui aborde ces enjeux. A voir absolument pour découvrir trois artistes français peu connus, or réellement intéressants !

 

Visuels : 

– Affiche « Lesage, Simon, Crépin : peintres spirites et guérisseurs », Lille Métropole Musée d’art moderne, d’art contemporain et d’art brut (LaM), 4 octobre 2019, 5 janvier 2020, © LaM – Lille Métropole Musée d’art moderne, d’art contemporain et d’art brut, 2019
– Victor Simon, Composition, 1935. Dépôt du Musée régional d’ethnologie. © DR. Photo : J. Hoepffner
– Anonyme, Portrait d’Augustin Lesage, n.d. Archives du LaM, Villeneuve d’Ascq. Photo : N. Dewitte / LaM, © Adagp, Paris 2019 

 

 

 

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