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Arles : La Fondation LUMA, au commencement

18 July 2021 | PAR David Hanau

Peu de monde y croyait, mais c’est bien pour faire fi de l’incertitude de l’année 2021 que la Fondation LUMA a ouvert ses portes au public fin juin. Si le Parc des Ateliers figure depuis très longtemps au cœur du parcours des Rencontres d’Arles, il faut bien avouer qu’il laissait depuis quelques années un goût d’inachevé face à une tour dont les travaux semblaient ne pas vouloir finir. C’est donc avec la curiosité bien aiguisée, et une pointe d’excitation, que nous sommes allés découvrir la Fondation LUMA.

Une nouvelle cartographie

Que l’on soit arlésien ou juste visiteur de passage, tout le monde s’accorde à le dire. La fondation LUMA a changé la physionomie d’Arles. Certes, l’imposante Tour de la Fondation fait désormais partie intégrale de la carte postale locale. Ce qui a bien sûr occasionné, et continuera de générer encore quelque temps, d’interminables discussions sur le bien-fondé de ce geste architectural de Frank Gehry (encore lui), qui impose une icône du XXIe siècle face à l’immuable visage camarguais et horizontal de la ville.

Mais c’est aussi une toute nouvelle donne dans les enjeux de politique culturelle locale qui vient d’émerger. Car la fondation est devenue, dès son ouverture, un important aimant culturel qui modifie de façon radicale les dynamiques de visite, une responsabilité qui s’inscrit au cœur du projet LUMA.

C’est donc pleinement conscient de cet enjeu, et le cœur plein d’envies, que nous avons poussé les portes de la fondation.

 

Un nouveau terrain de jeu

Il faut bien avouer que le projet était vraiment difficile à appréhender pendant les travaux. Les vraies dimensions de l’édifice, avec son imposante base, et l’ampleur du parc remodelé, n’ont révélé leur vraie nature que pendant la dernière ligne droite des travaux.

Car la Fondation LUMA, c’est bien plus qu’une tour. C’est un projet global de transformation du Parc des Ateliers en véritable pôle culturel. Et si les Rencontres ont encore un pied dans une partie de l’atelier de mécanique, il faut bien percevoir les ateliers comme des pivots de la fondation.

En cette phase d’ouverture, la tour propose avant tout de découvrir les œuvres de la collection de la famille Hoffmann, et quelques interventions sur le bâtiment et le parc. Tandis que les projets temporaires se concentrent dans les ateliers.

 

La force d’une tour

Lorsqu’on pénètre dans la Tour LUMA, qui offre 15 000 m2, dont 2 000 consacrés aux expositions, il faut bien avouer qu’on en prend plein les yeux. L’impressionnant et vaste hall fait la part belle à un tobogan de Carsten Höller.

On en prend aussi plein les oreilles, car c’est avec une performance signée Tino Sehgal que les faux guides de la fondation piègent les visiteurs de joyeuse façon.

Au rez-de-chaussée, on accède au bel espace de la galerie qui permet la découverte de deux œuvres de Philippe Parreno, Danny et No more reality.

En montant au deuxième étage, outre le départ du toboggan de Carsten Höller, on peut se plonger dans Endodrome, l’œuvre en VR de Dominique Gonzalez-Foerster (sur inscription).

Au premier étage, les terrasses vous permettront de mieux appréhender le projet dans son vaste ensemble, et aussi découvrir le skatepark imaginé par l’artiste coréen Koo Jeong A.

Mais c’est bien dans les niveaux inférieurs de la tour que le clou du spectacle vous attend.

Au niveau -1, plongez dans les archives des collections LUMA. Pénétrez les secrets de ce captivant couloir, et ouvrez les portes qui abritent des trésors signés Diane Arbus, Nan Goldin, Derek Jarman, Annie Leibovitz, Simon Fisher Turner…

Attardez-vous également à redécouvrir l’œuvre du très regretté Édouard Glissant, relue par Hans-Ulrich Obrist.

Perdez-vous dans la très vaste salle consacrée à The Impermanent Display, l’exposition éphémère de la fondation, qui révèle les acquisitions récentes ou moins récentes de la collection LUMA. D’imposantes œuvres signées Etel Adnan, Alighiero Boetti, Urs Fischer, Katharina Fritsch, Fischli/Weiss, Mike Kelley, Paul McCarthy, Michelangelo Pistoletto, Rirkrit Tiravanija…

Et surtout, ne manquez pas de trouver l’escalier qui vous emmènera au niveau -2. Là, vous pourrez y découvrir dans deux magnifiques salles de projection, deux œuvres vidéo majeures : If and Only If d’Anri Sala, et Four Nocturnes de John Akomfrah.

Et pour oublier le temps qui passe, mais surtout pas l’heure qu’il est, installez-vous sur les vastes et confortables canapés de la Glassroom pour voir ou revoir l’incroyable œuvre de Christian Marclay, The Clock.

 

Ballade intriguée

Lorsque vous arriverez au rez-de-jardin, vous n’aurez qu’une seule envie : partir vous perdre dans le vaste parc.

Laissez-vous guider par votre instinct, et vous pourrez découvrir les interventions d’artistes en extérieur.

Votre regard sera attiré et sans doute plongé dans l’interrogation face à la très grande sculpture rose de Franz West, Krauses Gekröse, au pied de la tour.

Mais dépassez vos doutes pour marquer le pas, et vous laisser guider au gré de votre déambulation par les Orientation Platforms de Liam Gillick.

Mais surtout, ne manquez pas d’emprunter le « pont » imaginé par Carsten Höller, Seven Sliding Doors, où les effets réfléchissants des portes et de l’étang environnant sauront vous surprendre.

 

Ateliers en assemblage

C’est donc dans les ateliers que la démarche de commande et de production, déjà initiée depuis de nombreuses années pendant la phase de travaux, se prolonge.

En cette phase d’ouverture, trois propositions vous y attendent.

La très vaste installation After UUmwelt de Pierre Huyghe s’impose dans la grande halle. Mais la grandeur de cette œuvre n’est pas tout à fait proportionnelle aux mètres carrés occupés… Nous avions déjà vu Pierre Huyghe plus inspiré.

À l’atelier de mécanique générale, dont une partie accueille des expos du programme des Rencontres de la photographie, vous pourrez explorer l’exposition collective Prélude qui fait place à quatre artistes émergents : Sophia Al Maria, Kapwani Kiwanga, P. Staff et Jakob Kudsk Steensen. Une tentative peu convaincante d’interroger nos relations avec la nature et les nouveaux récits écologiques.

À l’atelier des Forges, vous pourrez découvrir l’œuvre vidéo de Ian Cheng, Life After BOB: The Chalice Study. Une technique d’animation narrative et générative qui repose sur une intelligence artificielle, dont l’impressionnante qualité de rendu laisse toute de même planer quelques questions sur le sens qu’il faut donner à cette œuvre….

 

En devenir

Le voyage entamé il y a quelques années par la Fondation LUMA ne fait que commencer. Avec cet outil hors du commun, le projet LUMA nous révèle aujourd’hui son immense potentiel, entre les incroyables espaces offerts par la tour et les ateliers, et la beauté de ce parc qui sort à peine de terre. Un potentiel que les équipes LUMA et les visiteurs doivent encore apprendre à apprivoiser… Comptez sur nous pour suivre avec assiduité l’évolution de ce nouveau géant de l’art contemporain !

visuels © DH

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David Hanau

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