
Ce soir le lion est mort: le dessinateur Aslan casse son crayon
Le « peintre des camionneurs et des garagistes » s’en est allé mardi soir, à 83 ans. Ses pin-ups dessinées, elles, restent. Son envie de rêver -au corps de la femme- et de donner du rêve s’est exprimée des années durant à travers ses dessins et toiles.
Alain Gourdon, dit Aslan -ou « le lion » en langue turque, fans de Narnia, vous êtes dans le juste- aimait être « le peintre préféré des camionneurs et des garagistes », pour l’absence de snobisme de ceux-ci –« ils aiment ce qu’ils aiment » disait-il- et pour leur « amour des femmes ». Ils les aimait également beaucoup, Aslan. Sa façon de le leur dire était de les dessiner. Nues. Quand on le questionnait sur les postures trop « offertes » de ses modèles, il répondait qu’elles « s’abandonnaient à un public » en posant, et par-là même, sans doute, à quelqu’un. Et que pour compenser l’impudeur d’un corps, il n’y avait rien de tel que « la pudeur d’un visage ».
C’est vrai qu’il était doué, Aslan. Lorsqu’on regarde ses dessins et peintures aujourd’hui, on peut encore louer leur qualité. Les Beaux-Arts de Bordeaux à 14 ans -et des problèmes avec les modèles femmes, du fait de son âge- un apprentissage sous la houlette de Jean-Gabriel Domergue, et une amitié avec César, ça vous forme un artiste. A tel point que son talent et ses amours profondes l’entraînèrent dans deux directions: auteur d’innombrables planches représentant des femmes dénudées pour Lui, le « magazine de l’homme moderne », édité, sous sa première forme, de 1963 à 1994, il effectua par ailleurs des commandes officielles. Un buste de Brigitte Bardot en Marianne, édité en 1968 par le Louvre, un autre de Mireille Matthieu, qui partit orner toutes les mairies … Et une superbe représentation de Dalida, pour orner sa tombe. Plus des travaux au Québec, où il vécut vingt ans.
Même si ce n’est pas, et ne fut jamais, aisé, regardons ses représentations sous l’angle artistique, pour une fois. Enfin, si désir il y a, laissez-le venir. C’est le meilleur hommage à lui rendre, surtout en ce 14 février.
Visuel: © couverture de Lui dessinée par Aslan